Que faudra-t-il pour mettre fin à l’épidémie de VIH en Europe ? – POLITIQUE
Selon le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC), les pays de l’UE et de l’Espace économique européen (EEE) progressent vers l’atteinte des objectifs 95-95-95, mais les progrès sont inégaux.1 Des efforts accrus sont nécessaires pour améliorer les services de prévention, de dépistage et de traitement afin de garantir que ces objectifs soient universellement atteints et que personne ne soit laissé de côté.
Les élections européennes de 2024 marqueront le début du dernier mandat complet de la Commission avant 2030, offrant ainsi la dernière opportunité de tenir l’engagement de mettre fin au VIH/SIDA dans le cadre de l’agenda 2030 des objectifs de développement durable (ODD). Aujourd’hui, nous nous entretenons avec des parties prenantes du gouvernement, de la société civile et de l’industrie pour discuter du statut et du plaidoyer intersectoriel en cours nécessaires pour garantir que les objectifs d’élimination deviennent une réalité.
Cyrus Engerer
Membre du Parlement européen
Bertrand Audoin
Vice-président, Partenariats stratégiques et FTCI Europe chez IAPAC
Jean Bernard Siméon
Vice-président senior et responsable Europe, ViiV Healthcare
Quel est l’état de l’Union européenne en matière de VIH/SIDA et pourquoi devrions-nous en parler maintenant ?
Député ingénieur :
Le VIH est une priorité dans l’agenda politique de santé de l’Europe depuis des années, conformément à l’engagement de l’UE à atteindre les ODD à l’horizon 2030. La Déclaration de Dublin2 , adopté en 2004, a été le premier engagement régional visant à « mettre fin à l’épidémie de sida ». Par la suite, deux plans d’action successifs ont été mis en œuvre pour lutter contre le VIH/SIDA dans l’UE et dans les pays voisins, soutenus par un financement continu du programme EU4Health pour des projets communautaires de dépistage du VIH. Même si des progrès ont été réalisés, la réalisation des objectifs de 2030 nécessite encore beaucoup de travail.
Les diagnostics de VIH ont augmenté en Europe ces dernières années,3 reflétant une tendance plus large à l’augmentation des infections sexuellement transmissibles (IST)4 dans la population générale. En outre, le fardeau du VIH et d’autres maladies infectieuses, notamment l’hépatite virale et la tuberculose, est aggravé. Le VIH reste un problème urgent et le prochain mandat de l’UE doit reconnaître l’urgence de lutter contre cette épidémie.
À l’approche des élections, nous aurons bientôt un Parlement rempli de nouveaux fonctionnaires chargés d’élaborer les politiques et le financement susceptibles de mettre fin à l’épidémie de VIH. Il est donc essentiel d’écouter toutes les parties prenantes impliquées pour garantir que cette conversation vitale ait lieu avant qu’il ne soit trop tard.
Sur quoi devrait se concentrer le nouveau mandat de l’UE ?
Bertrand Audoin, IAPAC :
L’Europe a besoin d’un plan et d’un financement dédié pour le mettre en œuvre. Si nous commençons alors à examiner les lacunes à combler, il y aura du travail à faire sur plusieurs fronts.
Nous devons encourager le dépistage – en particulier le dépistage opportuniste – le diagnostic précoce et les programmes intégrés pour le VIH, la tuberculose, les IST et l’hépatite. Des méthodes innovantes telles que les tests basés sur les réseaux sociaux et les auto-tests devraient être explorées pour encourager le dépistage et éliminer les obstacles à la stigmatisation.
Il est crucial de renforcer les stratégies de prévention primaire, notamment en améliorant l’accès aux préservatifs, à la PrEP et à la PPE dans le cadre de programmes de prévention combinée, en mettant l’accent sur les populations clés les plus exposées au risque d’infection par le VIH, notamment les professionnel(le)s du sexe, les migrants et les prisonniers.
En matière de traitement, le nouveau mandat de l’UE devrait se concentrer sur l’investissement dans des approches holistiques et centrées sur la personne à long terme qui améliorent la gestion du VIH, des co-infections et des comorbidités, améliorant ainsi la qualité de vie liée à la santé des personnes séropositives.
Jean Bernard Siméon, ViiV Healthcare :
Il est crucial de répondre aux besoins non satisfaits des groupes marginalisés, notamment aux formes croisées de stigmatisation, d’autostigmatisation et de discrimination, pour mettre fin à l’épidémie. Nous devons continuer à investir dans des options innovantes en matière de dépistage, de prévention et de traitement pour améliorer la qualité de vie des personnes touchées ou vivant avec le VIH.
Nous devons reconnaître la valeur ajoutée des nouveaux produits et formulations capables de surmonter les barrières de la stigmatisation – y compris l’auto-stigmatisation due à des méthodes discrètes – et d’améliorer l’observance et la rétention des soins. Plus l’éventail de choix disponibles est large, plus grandes sont les chances d’atteindre ceux qui en ont le plus besoin et de garantir l’équité en matière de santé dans toute l’Europe.
Quel est le consensus général sur les prochaines étapes pour nous amener à atteindre les objectifs de 2030 et au-delà ?
Député ingénieur :
C’était l’objet d’une table ronde que j’ai organisée au Parlement plus tôt cette année. Plus de 30 parties prenantes représentant des organisations internationales, des gouvernements nationaux, la société civile et l’industrie ont discuté des actions prioritaires pour garantir que l’Europe reste sur la bonne voie pour mettre fin au VIH/SIDA en tant que menace pour la santé publique d’ici 2030.
Bertrand et Jean Bernard ont déjà énuméré bon nombre de ces actions, qui sont compilées dans une prochaine déclaration de consensus multipartite ouverte à l’approbation. Au niveau politique, il est crucial d’accroître l’engagement et le leadership de l’UE dans la lutte contre le VIH/SIDA en fournissant des orientations aux pays membres et en soutenant l’ONUSIDA, le Fonds mondial et le Bureau régional de l’OMS pour l’Europe à l’échelle mondiale.
Outre les efforts nationaux, les institutions de l’UE peuvent jouer un rôle unique dans la mise en œuvre d’un cadre global capable d’orienter l’action régionale vers la réalisation des objectifs de 2030.
Bertrand Audoin, IAPAC :
Un autre point de consensus met l’accent sur le renforcement du leadership communautaire en garantissant la participation active de la société civile à la formulation des politiques et à la prise de décision. L’UE devrait jouer un rôle plus actif pour garantir une mise en œuvre cohérente de GIPA5 et MIPA6 des principes.
Cela ne veut pas dire que nous n’avons pas déjà un rôle de leadership. La table ronde mentionnée par le député européen Engerer faisait suite à une lettre envoyée par l’IAPAC et d’autres organisations de la société civile au commissaire Kyriakides plaidant en faveur d’un nouveau plan d’action européen contre le VIH. Nous avons tendance à réclamer davantage, mais pour être efficaces, nous avons besoin d’un siège permanent et significatif à la table, ce que devrait garantir le prochain mandat de l’UE.
Jean Bernard Siméon, ViiV Healthcare :
Nous nous trouvons à un tournant critique dans le cheminement visant à mettre fin à l’épidémie de VIH en Europe, et il est très encourageant de constater la dynamique politique en faveur du VIH au cours des derniers mois — y compris pendant la présidence espagnole du Conseil de l’UE — et la prochaine déclaration de consensus multipartite, qui appelle à une réflexion stratégique et à une action collective pour combler les lacunes de la réponse de l’UE au VIH.
Cela inclut les lacunes actuelles et futures, garantissant que longtemps après la fin de l’épidémie, les personnes vivant avec le VIH aient un large accès à des outils innovants et efficaces qui réduisent les disparités, améliorent les résultats en matière de santé et garantissent la qualité de vie des personnes vivant avec le VIH. Chez ViiV Healthcare, nous continuerons d’exhorter les institutions européennes à mettre en place des systèmes capables d’exploiter la valeur de l’innovation et d’encourager la recherche et le développement qui offrent des avantages cliniques et sociaux supplémentaires au-delà de la suppression virale.
Le nouveau mandat de l’UE doit réaffirmer son engagement à lutter pour mettre fin aux nouvelles acquisitions du VIH et garantir que l’Europe atteigne les objectifs mondiaux de l’ONU en matière de VIH d’ici 2030. Nous avons besoin d’un plan qui intègre et finance des stratégies pour un avenir où le fardeau du VIH/SIDA cessera d’exister pour tout le monde. .
(1) Les cibles 95-95-95 sont les suivantes : 95 pour cent des personnes vivant avec le VIH connaissant leur statut sérologique ; 95 pour cent des personnes vivant avec le VIH connaissent leur statut et suivent un traitement ; 95 pour cent des personnes vivant avec le VIH suivent un traitement avec une charge virale supprimée. Selon les dernières données de l’ECDC, les pays de l’Union européenne (UE)/Espace économique européen (EEE) comptent 91 pour cent des personnes vivant avec le VIH connaissant leur statut, 93 pour cent de celles sous traitement et 92 pour cent de celles sous traitement. étant viralement supprimé.
(2) Déclaration de Dublin sur le partenariat pour lutter contre le VIH/SIDA en Europe et en Asie centrale – https://www.osce.org/files/f/documents/b/a/29873.pdf
(3) Selon le rapport de surveillance du VIH/SIDA en Europe 2023 de l’OMS et de l’EDCD (données 2022), en 2022, une augmentation des diagnostics de VIH s’est produite dans l’ensemble de la région européenne, et en particulier dans 26 pays de la région UE/EEE.(2), en grande partie à cause du mouvement croissant de population de l’Europe de l’Est vers l’Europe de l’Ouest. https://www.ecdc.europa.eu/en/publications-data/hivaids-surveillance-europe-2023-2022-data
(4) Infectieux sexuellement transmissible
(5) MIPA – Implication significative des personnes vivant avec le VIH. Pour certains, MIPA – l’implication significative des personnes vivant avec le VIH – est un terme préféré à GIPA car il signifie que les personnes vivant avec le VIH sont des agents de changement actifs et égaux, et non des bénéficiaires passifs de services.
(6) GIPA – Participation accrue des personnes vivant avec le VIH. Le principe GIPA est un principe qui vise à réaliser les droits et responsabilités des personnes vivant avec le VIH, y compris leur droit à l’autodétermination et à la participation aux processus décisionnels qui affectent leur vie. Il a été formalisé lors du Sommet de Paris sur le sida en 1994 et approuvé par 189 pays des Nations Unies en 2001. Source : https://data.unaids.org/pub/briefingnote/2007/jc1299_policy_brief_gipa.pdf