Inscrivez-vous ici pour le recevoir gratuitement chaque matin notre newsletter Libélympique.
Il n’était pas favori, mais un judoka japonais éliminé en quart de finale, c’est toujours bizarre. Pour l’intéressé aussi, d’ailleurs. Samedi 27 juillet, lors des quarts de finale des -60 kg, pendant une poignée de minutes qui ont semblé durer une éternité, Ryuju Nagayama a refusé de saluer son adversaire Francisco Garrigós (pas n’importe qui, champion du monde en 2023, après tout) puis de quitter le tatami. La stupeur a été dans les tribunes, quand on connaît l’importance de l’étiquette dans l’archipel. On se souvient surtout de la polémique – géopolitique cette fois, plus que sportive – quand le poids lourd égyptien Islam El Shehaby a refusé de serrer le poing de l’Israélien Or Sasson, après leur combat aux Jeux de Rio en 2016.
Pour revenir à Nagayama, horriblement laborieux toute la matinée, il faut dire que l’affrontement s’était terminé dans la plus grande confusion. Les deux hommes étaient étrangement enlacés dans une phase de ne-waza, le combat au sol. L’Espagnol, sur le dos, a tenté de comprimer la trachée de son adversaire, par un étranglement grossier, les mains sur la nuque, à la limite de ce qui est autorisé. Le Japonais, le cou écrasé mais martial jusqu’au bout, a refusé de frapper pour abandonner. Situation stérile : en principe, on dit « mat », les combattants sont obligés de se lever. C’est exactement ce qu’a fait l’arbitre mexicain, même si un peu tard.
En colère ou encore dans un état second ?
Sauf que Nagayama est resté au sol quelques secondes avant de se relever. Simplement épuisé ou vraiment groggy ? Et donc, par définition, étranglé, et, par conséquent, ippon ? Les juges de table semblent avoir retenu la seconde hypothèse. Mais peut-on accorder un ippon pour étranglement a posteriori, surtout si le combattant n’a pas jeté l’éponge ? Et Garrigós, n’a-t-il pas mis un peu de temps à lâcher prise, malgré les injonctions de l’arbitre ? Les exégètes de la voie de la flexibilité (ô ironie) en débattront sans doute encore quelque temps – à commencer par la légende Shohei Ono, écouteur en oreille de chou-fleur, en duplex avec Tokyo.
Quant à Nagayama, furieux (ou encore inconscient ?), il rôde dans la zone rouge du tatami désert, sous les huées, tandis que son personnel hue les surveillants. Finalement, le Japonais accepte son sort et finit par se diriger sur la pointe des pieds vers la sortie, sous les applaudissements soulagés du public. Étrange moment.