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Quand notre parapluie nucléaire essaie nos alliés

AURELEN MORISSARD / AFP

Emmanuel Macron a photographié à Paris le 2 juillet 2024 lors de la revue des troupes du défilé du 14 juillet

Politique – partenaire particulier, cherchant un partenaire avec nucléaire? Les élections législatives prévues en Allemagne ont vu la victoire, sans surprise, du parti conservateur dirigé par Friedrich Merz. L’arrivée de ce dernier, responsable de la formation d’une coalition et d’un gouvernement, intervient dans un contexte géopolitique émouvant.

Le rapprochement de Donald Trump avec Vladimir Poutine sur la question ukrainienne augmente le soutien militaire américain dans le cadre de l’OTAN. Sauf que depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, les États-Unis sont précisément le premier allié militaire des Allemands et est responsable de la réponse en cas de grève nucléaire.

C’est dans ce contexte que Friedrich Merz a déclaré qu’il était prêt à placer son pays sous le parapluie nucléaire français. Une déclaration historique comme expliqué au Huffpost Michel Goya, ancien officier des troupes navales et historienne.

Le HuffPost. Pourquoi la proposition de Friedrich Merz est-elle majeure et annonce une petite révolution dans le paradigme transatlantique?

Michel Goya. Jusqu’à présent, l’Allemagne a été le bon étudiant de l’OTAN, le fidèle allié des États-Unis, dont l’ambition était d’être l’assistant du shérif en Europe. L’Allemagne s’est réarmé à partir de 1955, par décision des États-Unis et c’est dans le cadre de l’OTAN qu’il a conçu sa défense. Il a des armes nucléaires américaines sur son territoire, B61 Bombs.

Cependant, nous assistons à un début de divorce car il y a une crise de confiance. Nous ne savons plus si Donald Trump accepterait d’utiliser des armes nucléaires en cas d’attaque russe contre le sol européen. Et dans ce contexte, pour la première fois, l’Allemagne a fait des progrès en France.

La doctrine nucléaire française le permettait-il? Déjà, en 2024, Emmanuel Macron avait proposé d’ouvrir le « Parapluie français » et l’a décrit comme «  Un élément essentiel dans la défense du continent européen ».

La France n’a jamais donné une définition précise de ses intérêts vitaux et c’est ce qu’on appelle l’ambiguïté ou l’embarras stratégique. Dès le début, De Gaulle a déclaré que les intérêts vitaux ne s’arrêtent pas à nos frontières et que la France n’accepterait pas une invasion de l’Allemagne, et Macron était également clair. Mais là où le flou reste, c’est contre lequel la France utiliserait d’abord l’énergie nucléaire.

Pour les États-Unis, il y avait dans la relation transatlantique, l’idée que les pays européens sont pour les intérêts vitaux de Washington avec des inconvénients: il était nécessaire d’empêcher que la réponse soit faite sur le sol américain, c’est la raison pour laquelle les armes nucléaires américaines sont basées Allemagne. Bien que, en termes absolus, il n’est pas nécessaire. Dans le cas où ce sont des armes nucléaires françaises pour protéger l’Allemagne, on peut imaginer que la réponse de l’ennemi se fait d’autre part sur le sol français. Nous pouvons clairement voir l’intérêt vital que Berlin ou Rome représente à Paris, mais plus il est bien géographiquement et moins il est évident de le percevoir.

La France a-t-elle les moyens techniques d’étendre son parapluie nucléaire à son voisin allemand et à d’autres pays européens? Offrirait-il les mêmes garanties?

Il y a un aspect technique. Les armes américaines sont des armes substratégiques, relativement faibles pour donner un signal à l’ennemi. Ce qui permet un petit B61 plutôt qu’un missile intercontinental. Cela vous permet de franchir le seuil symbolique du nucléaire sans avoir de destruction d’échelle. Cela fait partie du principe de réponse proportionnelle. Paradoxalement: plus l’arme nucléaire est courte, plus son utilisation est probable.

Le problème est que nous n’avons pas d’armes substratégiques. En France, c’est le principe de juste suffisance avec cette idée en termes de doctrine « Si nous sommes attaqués, nous envoyons tout, pas de réponse graduée ». Même s’il y a des adaptations, nous n’avons que deux types d’armes atomiques. Nos têtes sur des missiles SLBM (qui ont été dessinées pour les sous-marins), et qui sont d’environ 240-250, et environ quarante têtes de missiles ASMP sol-air, tirées de l’avion en rafale, et qui sont l’équivalent de 20 fois Hiroshima. Nous sommes donc très puissants et nous n’avons pas grand-chose.

Malgré ce « grand écart technique » avec la solution américaine, comment pouvons-nous imaginer concrètement ce « partage » de l’arsenal nucléaire français?

En droit, le nucléaire n’est pas partagé: il ne peut y avoir qu’un seul décideur, un seul propriétaire et nous n’avons pas le droit de fournir des armes nucléaires à d’autres pays. La présence d’armes nucléaires américaines en Europe est également antérieure au traité de non-prolifération; En les gardant, nous sommes à la limite.

On pourrait imaginer un système à double clé. Mais la prochaine étape serait de développer nos munitions, moins de têtes nucléaires moins puissantes. Une petite révolution technique avec derrière la question des investissements et des coûts.

Nous pourrions installer tout cela sur des bases polonaises ou allemandes, mais dans les échanges, ces pays seraient obligés d’acheter des rafales plutôt que des avions américains. Ce serait une copie de ce que fait les États-Unis. Le plus simple serait néanmoins que nous ayons des avions français basés en Pologne, mais dans le cas où ils frappent, nous serions alors exposés à une réponse sur le sol français.

C’est là que nous voyons qu’il s’agit d’un lourd engagement même s’il reste un instrument d’influence. Soit dit en passant, cela signifie que nous pourrions éventuellement nous passer de la présence américaine en Europe et signer la fin de l’OTAN en faveur d’une alliance militaire européenne. La France assumant le rôle des États-Unis.

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Gérard Truchon

An experienced journalist in internal and global political affairs, she tackles political issues from all sides

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Gérard Truchon

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