Dans « When the Fall Come », François Ozon imagine une grand-mère paisible, peut-être un peu trop. Le film, à découvrir sur Canal + à partir du 22 avril, est en fait basé sur un souvenir très personnel du cinéaste, aussi banal que dérangeant.
Quand l’automne vient: un repas avec des champignons qui coule mal
Le point de départ de Quand l’automne arrive ne vient pas d’un roman noir ou d’une nouvelle, mais d’un déjeuner en famille qui est resté à travers la mémoire du réalisateur. Enfant, François Ozon Aider un repas organisé par une tante, qui cuisinait des champignons qu’elle avait elle-même ramassée. Résultat: tout le monde passe la nuit à vomir, sauf elle. Un détail qui intrigue le futur cinéaste, au point de nourrir une suspicion tordue et, quelques décennies plus tard, un scénario.
Ce fantasme d’empoisonnement sert de terreau pour une histoire beaucoup plus large. Le film suit Michelle (Hélène Vincent), un octogénaire à la retraite installé dans un petit village en Bourgogne, que la visite de sa fille et l’arrivée de son petit-fils agiteront lentement.
Derrière le décor bucolique et les gestes ordinaires, Ozon glisse les tensions sourdes, les silences lourds et les secrets de famille jamais digérés. Michelle semble inoffensive, mais le doute fait partie: et si elle a besoin d’être aimée cachée autre chose? Et si, à force de non, le pire avait fait son chemin dans la banalité quotidienne?
Entre le thriller discret et le portrait de femmes
Pour François Ozon, ce nouveau long métrage marque un tour plus raffiné, après le fantasme supposé de « My Crime ». Il voulait, a-t-il dit, « revenez à un film plus ancré dans la réalité, plus dépouillé ». Le ton est étouffé, mais la tension est très réelle. Inspirée par Simenon, le cinéaste favorise l’ellipse, les zones grises et laisse volontairement des clés hors de la campagne. L’objectif? Laissez le spectateur gérer avec ses propres projections, entre la culpabilité fantastique, l’instinct de survie et le désir inconscient.
Ce flou moral est largement basé sur des actrices, filmées avec des soins rares. Hélène Vincent campe Michelle avec un mélange de douceur, de détermination et de froideur discrète. Josiane Balasko, à Marie-Claude, incarne une amie en proie à la culpabilité maternelle, brisée dans le passé de son fils, récemment hors de prison. Ozon voulait montrer la beauté de ces femmes, «faire du temps qui passe», à l’inverse d’un cinéma qui les effaçait trop souvent. Le film leur donne un endroit central, sans filtre ni raidis.
À cela s’ajoute un motif plus intime: le lien intergénérationnel. La relation entre Michelle et son petit-fils Lucas structure le film, tout en creusant un vide: celui d’une transmission ratée avec sa propre fille, Valérie. Le personnage de ce dernier, joué par Ludivine Sagnier, hante également le film jusqu’à ce qu’il devienne littéralement un fantôme. « Nous vivons avec nos fantômes, surtout quand nous vieillissons », explique Ozon. Le cinéma ici matérialise.
Tourné en Bourgogne, dans le directeur du directeur du directeur, « When the Fall Come » est bien son titre. Un film automnal, littéralement et au figuré, où la beauté paisible de la nature cache parfois des désirs enterrés. Et où une cueillette de champignons peut être suffisante pour tout changer.
Quand l’automne arrive doit être vu sur le canal +.