Une révolution dans la révolution ? Il s’agit sans aucun doute d’une double victoire pour la gauche mexicaine. Symbolique d’abord avec l’élection, dimanche 2 juin, d’une femme à la tête de ce pays à la réputation profondément machiste et où l’ONU estime que 10 féminicides ont lieu chaque jour.
L’ancienne maire de Mexico, Claudia Sheinbaum, 61 ans, est ainsi entrée dans l’histoire en étant élue, haut la main (environ 58% des voix, selon les premiers résultats annoncés par l’Institut national électoral), aux commandes du deuxième plus grand parti latino-américain. Puissance économique américaine.
Mais c’est surtout d’un point de vue politique que le résultat est frappant, avec une constante claire et indubitable : la coalition de gauche formée par le Mouvement de régénération nationale (Morena), le Parti travailliste (PT) et le Parti vert écologiste du Mexique (Pvem) a tout simplement pulvérisé la droite. Unie derrière la figure controversée de l’ancien sénateur du Parti d’action nationale, Xóchitl Gálvez, la coalition du bloc conservateur (auquel ont adhéré le Parti révolutionnaire institutionnel, PRI, et celui de la Révolution démocratique, PRD) n’a obtenu que 28% des voix. voix.
Le mouvement Morena contrôle 24 des 32 États du pays
La déroute de la droite va bien au-delà du processus électoral le plus important de l’histoire du pays. Plus de 98 millions de Mexicains ont été appelés aux urnes pour élire, outre la présidence de cette République fédérale, huit postes de gouverneur, le chef du gouvernement de la ville de Mexico, plus de 19 000 postes d’élus locaux et, surtout, pour rénover le toute la Chambre des députés et le Sénat.
Et c’est peu dire que la gauche a relevé le défi : en remportant 7 des 9 États et en parvenant à garder la capitale du pays sous son contrôle, la coalition dirigée par le mouvement Morena a renforcé son pouvoir territorial avec le contrôle de 24 des États. les 32 États du pays. Un succès également au Congrès où la coalition de gauche a obtenu la majorité qualifiée à la Chambre des députés (entre 346 et 380 sièges sur 500, selon les premières estimations) et pourrait également l’obtenir au Sénat, où elle dispose déjà d’un majorité absolue.
Des résultats qui confirment le virage politique historique amorcé en 2018 avec l’arrivée au pouvoir d’Andrés Manuel López Obrador (Amlo), premier président de gauche de l’histoire du pays. S’il ne fait aucun doute que la victoire de Claudia Sheinbaum doit beaucoup à l’énorme popularité de son mentor, c’est surtout l’assurance de voir le projet politique porté par lui, la « quatrième transformation du pays » (4T), perdurer dans le temps. qui aura assuré le triomphe du bloc progressiste.
« Outre son propre parcours et le fait qu’elle a pu s’appuyer sur les résultats positifs d’Amlo, la victoire de la candidate de Morena est avant tout une confirmation de la volonté des Mexicains de continuer à transformer le pays. », explique le spécialiste du Mexique, Obey Ament. Pour cet ancien patron de l’Amérique latine du PCF, « le peuple, qui a choisi en 2018 de mettre fin aux gouvernements néolibéraux, vient de confirmer qu’il est opposé à un retour en arrière. Les Mexicains savent qu’elle poursuivra la lutte pour mettre fin au régime qui a fait du Mexique un pays extrêmement riche mais ravagé par la pauvreté, un butin pour une oligarchie. « .
Victoire pour la continuité d’un « projet de nation »
« On savait que la gauche allait gagner parce que le président Amlo a tenu parole, il y a eu un vrai changement (avec son gouvernement) », a assuré le quotidien dimanche soir le jour des partisans de Claudia Sheinbaum venus célébrer sa victoire sur la place centrale de la capitale. Situé entre 60 et 80 % selon les sondages, le taux de popularité du président sortant ne tombe pas du ciel.
Ayant bénéficié d’un contexte macroéconomique très favorable, elle peut se targuer d’avoir renforcé l’économie du pays. Mais celui qui a promis de gouverner « d’abord pour les pauvres » a surtout respecté ses engagements durant un sexennat de nombreuses politiques, qualifiées de très populaires, au premier rang desquelles on retrouve une multiplicité de programmes sociaux ciblant les secteurs les plus précaires de la société. Plus de 30 millions de personnes, sur une population totale de 130 millions d’habitants, ont pu en bénéficier, dans un pays où les classes populaires étaient plutôt habituées à voir l’argent public se perdre dans les méandres d’une corruption généralisée.
La lutte contre ce fléau a ainsi été l’un des principaux chevaux de bataille d’un président qui a osé mener à bien son programme ouvertement de gauche, mettant en avant la nécessité d’un État providence. Nationalisation des ressources naturelles, retour d’un État fort et interventionniste placé au cœur de la vie économique du pays…
Les nombreuses réformes sociales menées par Amlo visant à résoudre les pires défauts d’une société profondément marquée par l’injustice sociale (dont l’augmentation symbolique du salaire minimum de 120 % en termes réels) n’ont certainement pas été suffisantes pour changer la donne. structure capitaliste du pays, mais ils auront réussi à déclencher le début d’une meilleure répartition des richesses.
Un projet national
Son gouvernement peut notamment se vanter d’avoir sorti plus de 5 millions de personnes de la pauvreté, la réduction la plus significative des seize dernières années. Et d’avoir ravivé l’intérêt pour le débat politique dans une société qui avait perdu toute référence idéologique, avec une repolitisation des classes populaires qui restera aussi comme l’un des héritages les plus importants du sexennat.
Avec Claudia Sheinbaum, élue sur un programme suivant la même ligne directrice élaborée par le 4T, la succession est assurée. « Ce n’est pas une personne qui a été élue, mais un projet de nation », a-t-elle indiqué lors de sa première déclaration publique après l’annonce des résultats. Soutenue par la majorité d’un peuple aux attentes multiples, la petite-fille de juifs ayant fui le nazisme devra affronter, du 1euh Octobre, de nombreux défis.
A commencer par celui de mettre fin à une violence devenue exponentielle depuis l’offensive lancée en 2006 contre les cartels de la drogue, et que même les programmes sociaux les plus ambitieux d’Amlo n’ont pas réussi à juguler.
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