Près de Niort, une résidence rassemble personnes âgées et jeunes migrants
« J’aime voir des mamies, ça me fait penser à mes parents ». Dans les Deux-Sèvres, 15 mineurs non accompagnés (UMA) cohabitent avec des personnes âgées dans un nouveau type de résidence intergénérationnelle, unique en France.
Arrivés l’année dernière d’Egypte, de Côte d’Ivoire, du Bangladesh ou de Guinée, placés sous la protection du Département et d’abord hébergés dans des hôtels à Niort, ces jeunes migrants ont été accueillis en janvier dans l’établissement des Vignes, à Sciecq près de Niort, menacé de fermeture faute de nouveaux résidents.
Après de nombreuses consultations et réunions publiques en présence des habitants de la commune, des résidents et des familles, le projet de cohabitation a été validé. « Une première au niveau national »fait valoir la présidente du conseil départemental, Coralie Dénoues (DVD).
Ces mesures « coûte moins cher » comme d’autres formes d’hébergement et répond à l’interdiction d’héberger les mineurs non accompagnés dans les hôtels, en vigueur depuis le 1er février, ajoute l’élu. La collectivité des Deux-Sèvres accueille 240 mineurs non accompagnés sur son territoire et près de 1 100 autres enfants sont pris en charge par l’assistance sociale départementale.
Autonomie
Depuis son arrivée à la résidence Vignes, Adama* » sent mieux « . « Ici, il y a de la place, je peux cuisiner »sourit le jeune de 15 ans, contrairement à l’hôtel où il mangeait des kebabs.
Mafé, sauce cacahuète, riz… Les produits traditionnels ivoiriens s’entassent dans la cuisine du logement qu’il partage avec Samba, un autre mineur non accompagné. «Cela me ramène à la maison pour cuisiner des plats typiques.»
Les jeunes vivent de manière indépendante. «Ils font leurs courses seuls, gèrent leur budget et font le ménage», précise Valentine Boulanger, leur guide. En plus de l’argent de leurs courses, ils disposent de 40 euros par mois pour leurs « plaisirs personnels ». Et des vélos sont mis à leur disposition pour se déplacer.
Le soir, après l’école, certains rejoignent les personnes âgées dans le salon commun, même si « c’est juste pour être présent »note Stéphanie Antigny, cadre de secteur de l’Association de coordination des soins et de l’aide à domicile (ACSAD) qui gère l’établissement.
« En Côte d’Ivoire, nous vivons chez nos grands-parents, donc ça ne me dérange pas du tout »témoigne Adama. « Ils apportent un peu de jeunesse »sourit Roselyne Guiyonnet.
Cette résidente septuagénaire a enseigné à certains son jeu de cartes préféré, une façon de créer des liens malgré la barrière linguistique initiale. « Les premiers jours, on jouait au Loto et Ahmed est venu tout de suite. Il était heureux. »
Lors d’un repas partagé, ce garçon bangladais de 15 ans leur a cuisiné un plat typique de son pays, le biryani. » C’était vraiment bien « apprécie Roseline.
Métiers
En quelques mois, les discussions se sont approfondies. « Madame Tramp m’a dit que dans la vie, il ne faut jamais abandonner, aussi difficile soit-elle. Parfois, il faut vivre le pire pour obtenir le meilleur. »dit Adama.
Le conseil fait écho au parcours souvent douloureux et difficile à raconter pour ces jeunes. « Cela me rappelle trop de choses pour en parler », confie Issa. Pour tenter de les soulager, l’équipe d’encadrement réfléchit au recrutement d’un psychologue.
En attendant, les professionnels se concentrent sur le suivi médical et professionnel. « Nous les aidons à trouver un apprentissage, pour les orienter vers l’autonomie pour qu’à 18 ans, une fois qu’ils ne seront plus sous la protection du département, ils aient de l’argent, un salaire et un logement »explique le guide.
Adama veut devenir menuisier et Issa, qui a découvert l’école en France, mécanicien. Ils aimeraient faire un CAP ou une formation professionnelle l’année prochaine.
« A terme, l’objectif est d’évaluer s’ils sont capables de mieux s’intégrer en étant dans ces conditions plutôt que dans une résidence jeunesse par exemple », projette le président du Département.
Ce nouvel appareil, « observé à l’échelle nationale » selon elle, pourrait être dupliqué dans les Deux-Sèvres d’ici la fin de l’année dans d’autres résidences indépendantes « perdre de la vitesse ».
* les prénoms des mineurs ont été modifiés
ivv/ppy/dch