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Près de dix ans après les attentats de janvier 2015, le rôle du jihadiste Peter Cherif enfin examiné lors d’un procès

C’est un troisième procès qui s’ouvre pour les attentats de janvier 2015. Près de dix ans après les 17 assassinats perpétrés par les frères Saïd et Chérif Kouachi et Amedy Coulibaly à la rédaction de Charlie HebdoA Montrouge et à l’Hyper Cacher, un nouveau prévenu comparaît devant la justice. Le jihadiste Peter Cherif, 42 ans, est jugé à partir de lundi 16 septembre devant la cour d’assises spéciale de Paris. Renvoyé pour association de malfaiteurs terroriste criminelle, il est notamment soupçonné d’avoir joué un rôle aux côtés de Chérif Kouachi depuis le Yémen, où il a travaillé pour Al-Qaïda dans la péninsule arabique (AQPA) entre 2011 et 2018.

Arrêté en décembre 2018 à Djibouti, Peter Cherif était la pièce manquante du premier procès, qui s’était soldé par les condamnations des 11 accusés présents, dont Ali Riza Polat, renvoyé pour complicité de crimes terroristes – ce dernier a été condamné à trente ans de prison en appel. Peter Cherif, alors mis en examen et en détention provisoire, avait pourtant été entendu comme témoin par visioconférence depuis la prison de Fresnes. Après avoir récité un verset du Coran et fait des déclarations religieuses, il avait refusé de répondre aux questions du tribunal, assurant n’avoir pas été interrogé par la justice. « rien à voir avec ça » avec ces attaques.

« J’ai été obligé de venir ici pour une affaire qui ne me concerne pas, je ne répondrai à aucune question. »

Pierre Cherif, témoin

lors du premier procès des attentats de janvier 2015

Sera-t-il plus enclin à parler lors de son propre procès ? « Nous ne savons pas »note une source judiciaire à franceinfo. Lors de son interpellation en 2018, Peter Cherif s’est dit « dans une dynamique de coopération totale pour fournir des éléments pouvant sauver des vies humaines ». Mais dans leur ordonnance de renvoi, les juges d’instruction antiterroristes constatent qu’il a depuis largement exercé son droit au silence lors de ses interrogatoires et « n’a donné aucune information » sur Aqpa. Il nie également avoir participé à l’enlèvement pendant six mois, à partir de mai 2011 au Yémen, de trois membres français de l’ONG Triangle Génération Humainitaire. Ce dernier a décrit un geôlier qui parlait français et dont les caractéristiques physiques pourraient correspondre à Peter Cherif. Il sera également jugé pour ces faits.

Alors qu'il risque la prison à vie pour son implication présumée dans l'attentat qui a décimé la rédaction du "Charlie Hebdo" En 2015, le djihadiste français Peter Cherif s'efforçait de nier son implication. Les experts affirment que son passé contredit cette affirmation.

Charlie Hebdo : Peter Cherif, l’un des derniers témoins de la préparation de l’attentat, va-t-il livrer ses secrets ?
Alors qu’il risque la prison à vie pour son implication présumée dans l’attentat qui a décimé la rédaction de « Charlie Hebdo » en 2015, le djihadiste français Peter Cherif s’efforce de nier son implication. Pour les experts, son parcours contredit cette affirmation.
(France 2)

Connu également sous le pseudonyme d’Abou Hamza, Peter Cherif est une figure du jihadisme international. Il apparaît au début des années 2000 dans le répertoire des terroristes recherchés par les Américains, qui l’arrêtent en 2004 alors qu’il combat à Falloujah, en Irak. Ce pays le condamne deux ans plus tard à quinze ans de prison, mais Peter Cherif s’évade en 2007 vers la Syrie. Il est expulsé début 2008 et transféré en France.

Même si l’accusé ne fournit pas ses propres réponses, « Ce procès est intéressant car Peter Cherif est un personnage intéressant, c’est un précurseur du djihadisme français »estime à franceinfo Antoine Casubolo-Ferro, avocat de l’Association française des victimes du terrorisme ainsi que de Michel Catalano et Lilian Lepère, pris en otage par les frères Kouachi dans l’imprimerie de Dammartin-en-Goële (Seine-et-Marne). Ses clients ont « question naissante » :comment se fait-il qu’au début de l’année 2011, Peter Cherif ait suivi un stage de conduite dans une auto-école de Dammartin, « À 500 mètres » de l’imprimerie où les frères Kouachi se sont réfugiés lors de leur fuite ?

A l’époque, il comparaissait libre dans le procès d’un réseau de transport de combattants vers l’Irak, dit réseau des Buttes-Chaumont. Mais juste avant sa condamnation à cinq ans de prison, il décida de fuir vers le Yémen, via la Tunisie et Oman.

Peu après son arrivée au Yémen, Peter Cherif a reçu la visite, à l’été 2011, de deux autres djihadistes français, Chérif Kouachi, un ami d’enfance, et Salim Benghalem, décédé en 2017 en Syrie. Les juges estiment qu’il « intégration facilitée » au sein de l’Aqpa du co-auteur de l’attaque Charlie Hebdo en le présentant à Anwar al-Aulaqi, un prédicateur radical yéménite-américain et membre éminent de l’organisation terroriste. Selon l’accusation, Peter Cherif aurait ainsi « conscience » de « la mission » de mener un attentat en France confié à Chérif Kouachi. L’intéressé aurait également « contacts maintenus » avec son ami à son retour en France, ce qui « confirmé »pour les juges, « La connaissance de Pierre Chérif de la mission qui lui a été confiée » au plus jeune des frères Kouachi.

Peter Chérif ne sera cependant pas jugé pour complicité, car « il n’a pas pu être démontré qu’il ait directement aidé Chérif Kouachi dans la commission de l’attentat du 7 janvier 2015 à Charlie Hebdo »explique une source judiciaire à franceinfo. Mais « il est à tout le moins établi qu’il a participé à un accord avec ce dernier en vue de faciliter son intégration dans l’organisation terroriste Aqpa, ce qui lui permettrait d’être formé, agréé et chargé d’une mission pour son projet criminel »et que Peter Cherif, « en sa qualité de responsable au sein d’Al-Qaïda », « a participé à la définition et à la diffusion de propagande, visant notamment Charlie Hebdo« poursuit la même source.

Accusations rejetées par Peter Cherif. Tout au long de l’enquête judiciaire, il s’est limité à affirmer que Chérif Kouachi et Salim Benghalem lui avaient dit « qu’ils allaient ressortir à nouveau » du Yémen pour « un travail à l’extérieur »sans précision. « Je ne savais pas. Je l’ai dit mille fois à la police. »« Je ne sais pas si je suis ou non », a-t-il déclaré lors d’un interrogatoire en juin 2021. Contactés par franceinfo, ses avocats, Ouadie Elhamamouchi et Sefen Guez Guez, n’ont pas donné suite.

Bien que les débats ne porteront pas uniquement sur les attentats de 2015 mais aussi sur ses activités au sein d’AQPA et l’enlèvement des otages, les parties civiles « toujours en attente »dix ans plus tard, « explications »selon Antoine Casubolo-Ferro. « Quoi qu’il en soit, justice sera rendue et c’est nécessaire. »il ajoute. « Ce « Ce procès est important pour moi car il a ce lien avec le pays de mon enfance, Djibouti. »témoigne pour sa part Sigolène Vinson, chroniqueuse à Charlie Hebdoépargné lors du massacre de la rédaction, et qui s’est retrouvé « par hasard » dans l’avion qui a ramené Peter Cherif en France fin 2018. Elle espère avoir des réponses sur un plan plus idéologique.

« Dans les deux premiers procès, c’était très technique, il était très peu question d’idéologie. Qu’est-ce qu’il y a derrière ces attentats, c’est toujours ça qui me manque, cette question fondamentale. »

Sigolène Vinson, chroniqueuse à « Charlie Hebdo »

à franceinfo

Concernant le délai entre les faits et ce procès, le Parquet national antiterroriste rappelle à franceinfo que cinq ans se sont écoulés depuis l’arrestation de Peter Cherif : «Il est le seul Français identifié au sein d’Aqpa Yémen, les actes terroristes qui lui sont reprochés sont multiples et concernent une période de prévention de près de huit ans, donnant lieu à de longues enquêtes. »

Les rapports de la prison donnent un aperçu de son comportement lors du procès. Dans leur ordonnance de renvoi, les juges soulignent que les sons captés par les microphones dans sa cellule « tendance à démontrer » qu’il continue d’adhérer aux thèses djihadistes. Incarcéré un temps, fin 2020, aux côtés de Mohamed Abrini, l’« homme au chapeau » de l’attentat de l’aéroport de Bruxelles en mars 2016, Peter Cherif lui a confié qu’il était « l’ambassadeur du Prophète ». Selon un rapport de la prison daté d’août et consulté par franceinfo, ce détenu « dort par terre et refuse d’utiliser la télévision » dans sa cellule de la prison de Toulon-La Farlède (Var), où il est désormais incarcéré. Il a repris « deux cursus universitaires » à distance et refuse de voir ses deux enfants depuis plusieurs mois car « selon lui, la justice française lui donne une image négative qui pourrait nuire à son épanouissement »Peter Cherif risque la prison à vie.

Eleon Lass

Eleanor - 28 years I have 5 years experience in journalism, and I care about news, celebrity news, technical news, as well as fashion, and was published in many international electronic magazines, and I live in Paris - France, and you can write to me: eleanor@newstoday.fr
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