Souvent seuls et isolés, les femmes et les personnes seules de plus de 60 ans sont particulièrement touchées.
Deux millions de personnes vivent dans leurs vieux jours sous le seuil de pauvreté, notamment les femmes et les célibataires qui se retrouvent ainsi encore plus isolés, prévient le rapport annuel de l’association Les Petits Frères des Pauvres, publié lundi. Ce chiffre correspond aux personnes âgées de 60 ans et plus qui vivent sous le seuil de pauvreté monétaire, un niveau relatif fixé à 60% du niveau de vie médian (soit 1.216 euros par mois pour une personne seule, 1.824 euros pour un couple), selon l’association. La pauvreté touchait 10,6% des 65-74 ans en 2022 contre 7,5% en 2017, selon l’Insee. Les seniors sont cependant moins touchés que la population générale : neuf millions de personnes en France vivent sous le seuil de pauvreté, soit 14,4 % de la population.
Vivre en couple protège de la pauvreté, qui touche 18,8 % des personnes âgées seules, contre 6,4 % de celles vivant en couple, selon l’Insee. Les femmes, qui vivent plus longtemps que les hommes, et donc seules, sont plus exposées. De plus, le moins de travail des femmes parmi les générations plus âgées, la suppression de carrières pour suivre leurs maris dans les changements professionnels, le travail à temps partiel pour s’occuper de leurs enfants ou de leurs proches, ont entraîné une baisse des pensions de retraite. . À cela s’ajoutent les divorces et les séparations qui réduisent leur niveau de vie.
« J’ai arrêté de travailler pour élever mes deux enfants. Après 23 ans de travail, j’ai pris ma retraite à 47 ans, c’était possible en tant que fonctionnaire »explique Raymonde, 81 ans et 1100 euros de pension mensuelle. Mais son partenaire l’a alors quittée, la laissant sans « de quoi vivre » tandis que son fils, étudiant, était sous sa garde. Selon des entretiens réalisés en 2024 auprès de 12 personnes concernées par Les Petits Frères des Pauvres, 31 % ont rencontré des difficultés à payer leurs factures quotidiennes. Si vivre seul vous expose à la pauvreté, cela renforce l’isolement.
Quatre personnes sur dix se sont abstenues d’aller au restaurant, sont parties en vacances ou ont limité leurs déplacements au cours des 12 derniers mois, 26% se sont abstenues d’inviter leurs proches. « C’est très difficile de recevoir à la maison, ou à Noël d’offrir des cadeaux à mes proches »explique Martine Bourgery, 73 ans, qui perçoit une pension de 1 100 euros. « J’étais éducateur, nous étions très mal payés. Et je ne travaillais pas le mercredi pour élever mes deux enfants. Ma retraite en a souffert.dit cette femme qui a perdu son mari dans un accident. « Quand j’ai été invitée à dîner, j’ai refusé, car je ne pouvais pas venir avec des fleurs. Quand mes amis allaient au cinéma, je disais que je ne voulais pas voir le film, parce que je ne pouvais pas payer et que je ne voulais pas qu’ils paient pour moi.explique-t-elle.
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Vulnérabilité des auto-entrepreneurs
Même si leur quotidien est fait de calculs et de privations, les personnes interrogées par l’enquête ne se définissent pas comme pauvres, mot qui correspond pour elles à des situations plus graves que la leur. Plus d’une personne sur deux ne reçoit aucune aide et se sent mal informée. Les trois quarts sont mal à l’aise avec les démarches administratives en ligne. Le projet de solidarité à la source que prépare l’administration devrait réduire le taux de non-recours à l’aide sociale, en l’attribuant directement en fonction des revenus enregistrés par l’administration.
L’association demande que le minimum vieillesse soit relevé au niveau du seuil de pauvreté. Cette prestation non contributive – c’est-à-dire sans être liée à une cotisation antérieure – qui permet aux personnes âgées d’accéder à un seuil minimum de ressources, est de 1012 euros. Une mesure qui coûterait 2 milliards d’euros par an aux finances publiques, selon Yves Lasnier, le délégué général des Petits Frères des Pauvres. Les difficultés d’accès à la propriété pour les jeunes générations et la montée du statut d’indépendant sont des facteurs de risque de précarité pour les personnes âgées. L’association demande donc de prévenir la pauvreté future en organisant une réunion pour les assurés dont les estimations de retraite sont inférieures au seuil de pauvreté.