Pourquoi voir et entendre la mer fait du bien au moral – Ouest-France édition du soir
Contempler l’horizon face à l’océan. Se laisser bercer par le bruit des vagues. Se rafraîchir dans les eaux azurées d’un lac… Les espaces « bleus » naturels, liés à l’eau, semblent avoir un effet calmant, bénéfique à notre équilibre psychologique. Plusieurs grandes études scientifiques se sont penchées sur la question. Quelle est la véritable histoire ? Éléments de réponse avec Stéphanie Martin, psychologue clinicienne et psychothérapeute.
Le 13 juillet 2022, l’hebdomadaire international de vulgarisation scientifique Nouveau scientifique consacre sa une, ainsi qu’un long article, à la « thérapie bleue », c’est-à-dire aux bienfaits pour la santé mentale des milieux naturels comportant un plan d’eau – mers et océans, lacs et rivières. Le magazine anglophone souligne que plusieurs études se sont penchées sur la théorie selon laquelle les espaces naturels sont bons pour le moral.
En 2013, une étude avait déjà été menée au Royaume-Uni pendant cinq ans auprès d’un panel de plus de 1 000 volontaires qui avaient déménagé dans des espaces plus ou moins verts, comme des forêts, des montagnes, etc. Les résultats ont montré que, trois ans après leur déménagement, ces personnes vivant près de la nature étaient plus heureuses que celles qui avaient déménagé dans une zone urbaine.
Une étude internationale menée auprès de 18 838 répondants
La même année, en 2013, une autre étude britannique s’est également intéressée aux espaces naturels, mais en incluant les espaces « bleus ». 20 000 personnes représentant la population moyenne ont été interrogées à l’aide d’une application mobile. Selon leur situation géographique, les volontaires devaient répondre à un questionnaire sur leur ressenti. Les résultats ont confirmé l’impact positif des espaces verts sur la santé mentale mais ont aussi montré que les espaces bleus sont significativement plus sources de bonheur, selon les réponses reçues. Les répondants ont accordé aux espaces marins six points de plus, sur une échelle de 0 à 100, par rapport au bien-être qu’ils avaient ressenti.
Plus récemment, entre juin 2017 et avril 2018, un groupe de chercheurs a mené une étude intitulée Le BlueHealth autour de la question du lien entre espaces bleus, santé mentale et bien-être. Cette enquête a pris une ampleur inédite sur ce sujet, puisque 18 838 personnes ont été interrogées, dans 18 pays. Les questions portaient notamment sur la fréquence à laquelle les répondants fréquentaient les espaces naturels. Leurs résultats ont confirmé les conclusions de 2013. Ils ont montré « que les personnes vivant près de la côte rapportent une meilleure santé générale et mentale, plus d’activité physique et que les bénéfices sont plus importants pour les personnes à faibles revenus ou dans les zones plus défavorisées »on peut le lire dans le rapport d’étude.
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«Renouer avec nos sources»
Pourquoi les espaces naturels – verts ou bleus – ont-ils un tel pouvoir sur notre santé mentale ? Nouveau scientifique Parler de « Douce fascination » : notre attention est attirée par la lumière et les sons au bord de l’eau, nous faisant oublier nos pensées négatives. Cette théorie a été décrite pour la première fois à la fin des années 1980 par deux chercheurs, Stephen et Rachel Kaplan, sous le nom « restauration de l’attention ».
Mais pour Stéphanie Martin, psychologue clinicienne et psychothérapeute à Aix-les-Bains (Savoie), interrogée par l’édition du soir en 2022, adepte des thérapies en milieu naturel, il y a une autre raison : « Je pense que c’est lié au fait que le cerveau peut vraiment se déconnecter dans un environnement naturel. Le bruit de la ville est beaucoup plus stressant car il attaque le système nerveux. Il y a moins de stimuli, donc moins d’informations à traiter pour le cerveau, donc moins de stress physiologique. »elle résume.
Un autre élément important, selon le psychologue : « L’être humain n’est pas une espèce à part, il fait partie de cet écosystème naturel. Les sons de la nature font donc partie de nous. C’est une façon de renouer avec nos sources. »
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120 minutes de nature par semaine
Mais alors, vaut-il mieux se déplacer à proximité d’un espace naturel ou s’y rendre régulièrement ? Dans une étude publiée en juin 2022, à l’occasion de la 10e Conférence asiatique sur les sciences environnementales et comportementales, il est mentionné qu’être en contact avec la nature au moins 120 minutes par semaine est associé au bien-être et à une bonne santé. « Il faut trouver le bon équilibre, il n’y a pas de recette miracle. Il faut rester connecté à la nature mais ce n’est pas tout. Faire une promenade une fois par semaine c’est très bien mais bien sûr, cela dépend de la personne. »conclut Stéphanie Martin.