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Pourquoi Matthieu Jasseron, ancien prêtre star de TikTok, annonce se « retirer » du sacerdoce

« Je me retire du sacerdoce. Il me semble que je ne suis plus suffisamment en phase avec l’Église institutionnelle pour continuer à rester (…) un de ses fonctionnaires religieux. » Dans une vidéo de 45 minutes publiée dimanche 20 octobre en fin de journée sur YouTube, Matthieu Jasseron, le curé, ancienne star de TikTok, a annoncé qu’il mettait fin à ses activités pastorales, tout en cultivant une certaine ambiguïté sur son avenir à l’intérieur ou à l’extérieur. de l’Église. « Dans l’absolu je reste prêtre, un peu comme un couple marié qui fête sa séparation sans divorcer »a-t-il déclaré.

Dans ce long enregistrement, sur lequel il apparaît en extérieur, souriant mais fatigué, Matthieu Jasseron promet des révélations sur l’Église, dénonce le mélange des genres entre le spirituel et le politique en son sein, sans toutefois éviter lui-même la confusion. et des contradictions. Il en profite également pour promouvoir ouvertement son nouveau livre Le pouvoir du Kintsugi : sublimer ce qui est briséune collection de 124 « conseils » spirituel pour « Réussir à surmonter le pire ».

L’ancien curé de Joigny, ordonné en 2019, qui s’est fait connaître grâce à de courtes vidéos sur les réseaux sociaux, a quitté TikTok en décembre 2023, par peur de devenir un « gourou », selon ses propres mots. Depuis juin, il n’a plus de mission officielle dans son diocèse. Dans sa vidéo, l’ancien influenceur catholique, pour justifier son départ, lance des accusations extrêmement graves, qualifiant même une partie de la hiérarchie catholique de « mafia » et de des « traîtres ».

« J’ai été agressé et agressé physiquement par un évêque »il accuse sans le citer, tout en énumérant une longue liste de « révélations » : «pression des services secrets pour ne pas (se rendre) à un rassemblement religieux» par «  peur «  qu’il ne révèle pas « scandales » à propos « certains prélats »révélation dans la presse de« un secret équivalent au secret de la confession » « par un archevêque »voire diffamation « par plusieurs journaux chrétiens » vouloir « faire un public ».

« agressé par un évêque »

Le prêtre – qui n’a pas encore formellement demandé à être relevé de l’état clérical – explique tout au long de sa vidéo qu’il a traversé une longue période difficile de « interrogatoire » et des tests. En effet, après des positions ou attitudes jugées controversées ou trop progressistes, le Père Jasseron, qui savait toucher un large public souvent éloigné de l’Église, avait en effet essuyé des critiques parfois virulentes.

Plus profondément, le prêtre justifie aussi son abandon de ministère en invoquant les problèmes structurels de gouvernance de l’institution catholique, depuis son climat clérical jusqu’aux abus de pouvoir qui y règnent. Des questions qui ne sont pas sans actualité, mais qui, pour beaucoup, laissent dans l’ombre les difficultés propres à son parcours dans l’Église.

Car face aux lourdes accusations du prêtre, qui se décrit au fond comme victime d’un système ecclésial défaillant, ceux qui ont travaillé en étroite collaboration avec le père Matthieu Jasseron, 39 ans, ont avancé une autre version des faits, et dénoncé des propos « diffamatoire » et le comportement du prêtre. En fait, Electron Libre, le profil du Père Matthieu Jasseron, avait déjà soulevé de sérieux doutes avant même son ordination. Selon nos informations, les responsables du séminaire d’Orléans où il a été formé avaient alerté son évêque, à l’époque Mgr Hervé Giraud, sur un profil psychologique inadéquat pour le ministère sacerdotal.

Dans un premier avis, « une prolongation de son diaconat avait même été demandée pour permettre une étude psychologique approfondie, rappelle une source au sein du séminaire. Ce à quoi nous assistons aujourd’hui est une explosion que nous avions malheureusement anticipée, sans parvenir à convaincre l’évêque qui était censé la ordonner. » Cette même source mentionne une personne qui a le goût de « provocation » avec « un énorme besoin de reconnaissance » qui avait « un rapport difficile à l’autorité ».

Main courante et protection policière

Au fil des années, à mesure que la notoriété du prêtre explosait sur Internet, les relations entre Mgr Hervé Giraud et Matthieu Jasseron se dégradèrent. Accusé par sa hiérarchie d’avoir trahi le secret de la confession des paroissiens dans son deuxième ouvrage, le curé ne s’est pas présenté à la convocation du diocèse pour répondre. Ensuite, le lancement d’une collecte de fonds pour un projet de rénovation d’une église paroissiale à hauteur de deux millions d’euros avait aggravé des relations déjà compliquées. « C’était prématuré par rapport à une affaire qui n’avait pas fait l’objet d’une enquête et qui concernait des sommes importantes »expliquait alors Mgr Giraud.

Alors que le conseil diocésain des affaires économiques s’opposait à ces travaux, le curé avait sollicité à plusieurs reprises son évêque, au point que celui-ci, se sentant « intimidé » par le curé a fini par porter plainte contre Matthieu Jasseron, en mars 2024. Quelques jours après l’annonce de la nomination de Mgr Giraud dans le diocèse de Viviers, à la fin du même mois, les tensions étaient telles qu’une présence policière a été déployé dans la cathédrale de Sens lors de la messe d’adieu de l’ancien archevêque, ce dernier craignant une attaque publique de la part de l’ancien curé. Contacté, Matthieu Jasseron n’était pas joignable dans l’immédiat.

Réagissant à la vidéo de Matthieu Jasseron, l’archevêque de Sens-Auxerre, Mgr Pascal Wintzer, son actuel supérieur, a sobrement enregistré un « décision de quitter l’exercice du ministère sacerdotal »et prévoyait de rencontrer le prêtre dans les prochains jours. « Un tel événement n’est pas sans interroger notre Église dans l’Yonne, le ministère sacerdotal, la formation »il a ajouté.

Quelle présence pour les prêtres sur les réseaux ?

A côté de ces questions, le départ de Matthieu Jasseron pose aussi le sujet de la gestion des prêtres qui créent des contenus sur les réseaux sociaux. Au-delà du cas singulier de l’ancien curé de Joigny, l’épiscopat réfléchit depuis plusieurs mois à la manière d’approcher ces missionnaires 2.0. : « On ne sait pas trop comment les accompagner. Leur présence numérique, la façon plus individuelle dont ils envisagent leur mission, la relation qui peut se nouer entre l’exposition personnelle, le large public et l’ego bouleversent le modèle d’autorité et de soutien traditionnel du prêtre.nous analysons au CEF.

« L’Église, comme beaucoup d’autres organisations, doit trouver les moyens de s’adapter à ces nouvelles générations connectées, qui entretiennent une relation plus horizontale avec les structures hiérarchiques ». Le sujet des influenceurs catholiques pourrait aussi être une des questions abordées en marge de la prochaine Assemblée plénière, qui se tiendra du 5 au 10 novembre à Lourdes.

Cammile Bussière

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