Pourquoi l’Europe est moins attractive pour les investisseurs étrangers
Pour la cinquième année consécutive, la France conserve son titre de championne européenne des investissements étrangers dans le classement établi par le cabinet E&Y pour 2023. Bonne nouvelle à relativiser : en France comme dans toute l’Europe, les investissements étrangers ont globalement reculé.
Le nombre de nouveaux projetsInvestissements étrangers est en baisse de 4% sur le continent européen. Les investisseurs se sont particulièrement détournés de l’Europe des 27.
En Allemagne, où l’économie est en déclin, la chute est brutale : -12%, comme en Italie, -6% pour l’Espagne, -5% pour la France. Selon la CNUCED, l’Asie arrive en tête, suivie par les États-Unis. La première puissance économique mondiale a bénéficié de l’effet Loi sur la réduction de l’inflation. Le soutien public à l’industrie mis en place par Joe Biden attire les entreprises étrangères et maintient en partie les entreprises américaines chez elles. Les États-Unis restent le premier pays investisseur en Europe, mais avec un nombre de projets en baisse de 15 % par rapport à 2022.
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Un nouveau signal de déclassement de l’Europe ?
En ces temps géopolitiques et économiques incertains, l’Europe, en mauvaise posture, avec une croissance anémique, apparaît soudain très vulnérable. L’empilement de différents niveaux de décision fait fuir les investisseurs, selon Marc Lhermitte, membre associé d’E&Y. » Les managers interrogés nous disentil continue, oui, l’Europe a de la diversité, mais aussi de la dispersion ». Les lenteurs et les atermoiements en matière de politique énergétique ou commerciale les inquiètent et finissent par les pousser vers d’autres domaines, plus compréhensibles.
Le rebond surprise du Royaume-Uni
Aux marges de l’Europe des 27, il existe aussi des pays qui, au contraire, attirent les investisseurs. C’est particulièrement le cas au Royaume-Uni. +6% d’investissements étrangers. C’est la véritable surprise du millésime 2023 de ce baromètre d’attractivité. La technologie et la finance sont les deux secteurs à l’origine du regain d’intérêt pour ce royaume post-Brexit. Un rebond sain, mais encore insuffisant pour réparer les dégâts causés à la filière depuis cinq ans, selon Marc Lhermitte. La Turquie a également enregistré une augmentation vertigineuse des projets d’investissements étrangers : +17 %. Cette excellente performance confirme l’attrait que ce pays exerce depuis plusieurs années déjà. Grâce à son marché national et régional, et à une main d’œuvre abondante et peu coûteuse.
La délocalisation de l’industrie vers la périphérie
A noter que d’autres pays situés à la périphérie de l’Union bénéficient grandement de la délocalisation de l’industrie. +70% d’investissements industriels pour la Hongrie ou la République tchèque, +30% pour la Serbie. La Pologne, mais aussi l’Italie et l’Espagne, voire la Turquie, connaissent également une multiplication des créations d’usines à capitaux étrangers. Également en raison de leurs coûts de main d’œuvre très compétitifs. L’Espagne, par exemple, coûte deux fois moins cher que la France. En 2023, Paris reste néanmoins la première destination des investissements industriels avec les mégaprojets annoncés dans les batteries électriques. Les soldes globaux sont inchangés. Les trois pays en tête du classement européen, la France, le Royaume-Uni et l’Allemagne, reçoivent encore la moitié des projets d’investissements étrangers sur l’ensemble du continent.
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