Nouvelles locales

Pourquoi les super-riches menacent-ils de quitter la Suisse ?

Et si les super-riches vivant en Suisse voyaient leurs héritages taxés à 50% ? C’est la proposition lancée il y a deux ans par les Jeunes socialistes suisses (Juso), qui pourrait rapporter 6 milliards de francs supplémentaires par an à l’Etat, selon les estimations rapportées par le site d’information Swissinfo.

L’augmentation de cet impôt toucherait toutes les successions d’une valeur supérieure à 50 millions de francs suisses, soit environ 52 millions d’euros.

Financer le climat

Actuellement, la Suisse ne dispose pas d’un impôt sur les successions uniforme au niveau fédéral : le taux varie fortement en fonction des cantons qui le prélèvent, du lien entre le défunt et ses héritiers et du montant de l’héritage.

La proposition du projet « Initiative pour l’avenir » de Juso, qui a récolté plus de 130 000 signatures en février dernier – de quoi forcer une votation nationale – est donc plutôt inédite. Pour ceux qui la soutiennent, elle se justifie par le fait que « les plus riches sont responsables d’une grande partie du changement climatique et devraient donc apporter des réparations », indique le site d’information suisse. Cet impôt sur les super-riches permettrait en effet de financer « des mesures de protection de l’environnement et de développement des énergies renouvelables et des transports publics », ainsi que de contribuer à réduire les inégalités.

Un exode des super-riches suisses ?

Sans surprise, les principaux intéressés n’ont pas accueilli cette perspective à bras ouverts. Et pour cause, la proposition Juso «va à contre-courant de la tendance qui consiste à rendre les choses moins pénibles pour la population en général», explique Swissinfo. C’est l’une des raisons pour lesquelles la Suisse est une destination particulièrement prisée des très fortunés. Le média rappelle qu’entre le milieu des années 1990 et le début des années 2000, plusieurs cantons suisses avaient supprimé l’impôt sur les successions pour leurs proches.

L’initiative est d’autant plus inquiétante que 60% des 300 personnes les plus riches de Suisse ont acquis leur fortune par héritage, selon une étude du Centre de recherches économiques KOF, basé à Zurich.

«Les Jeunes socialistes me forcent à émigrer», a réagi récemment Peter Spuhler, président du conseil d’administration du constructeur suisse Stadler Rail, dont la fortune s’élève à 3 milliards de francs. Et il ne serait pas le seul riche à avoir suggéré son départ. Pour l’économiste Isabel Martinez, l’exode potentiel de ces milliardaires pourrait avoir un effet contreproductif pour la Suisse, qui risquerait alors de «perdre à la fois l’impôt sur les successions et les revenus annuels de l’impôt sur le revenu et la fortune si les très riches émigrent».

Un vote populaire sur cette question n’est toutefois pas attendu avant 2026. Si elle est mise en œuvre, la mesure affecterait environ 2 000 personnes dans le pays, où la richesse moyenne par adulte reste la plus élevée au monde.

Gérard Truchon

An experienced journalist in internal and global political affairs, she tackles political issues from all sides
Bouton retour en haut de la page