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pourquoi les penseurs français intéressent la nouvelle droite catholique américaine

Aux États-Unis, les auteurs catholiques français sont populaires. Une nouvelle garde conservatrice catholique particulièrement mise en avant dans la foulée de la désignation de JD Vance, qui les fréquente assidûment, comme colistier de Donald Trump. Si ce phénomène reste peu connu en France, dans ces milieux, les penseurs français sont particulièrement à la mode.

Appartenant à l’origine plutôt aux classes populaires, issues principalement de l’immigration ouvrière irlandaise, polonaise, italienne – mais très peu françaises, les catholiques américains, d’origine européenne, gravissent progressivement les échelons de la société. Ils vivent leur « rêve américain » tout en entretenant un certain complexe d’infériorité vis-à-vis de l’élite protestante. Aujourd’hui, pour une nouvelle génération aspirant à gouverner l’Amérique, le panthéon intellectuel d’un certain catholicisme français fait ainsi office de source d’inspiration.

Une identité conflictuelle

Quelles écoles cherchent-ils à remplacer ? Jusqu’à présent, les références intellectuelles de la droite américaine étaient logiquement plutôt anglo-saxonnes : Edmund Burke, John Locke, John Stuart Mill… Chez les catholiques, de plus en plus nombreux au sein de la droite américaine, les tendances protestantes et libérales de cette tradition donnent suscite des critiques, formulées notamment par le philosophe politique Patrick Deneen, régulièrement associé à JD Vance, dans son ouvrage Pourquoi le libéralisme a échoué (2018).

En quête d’autres références, motivés par l’idée de former une « nouvelle aristocratie », ces catholiques se sont tournés notamment vers des sources françaises. Patrick Deneen, comme de nombreux universitaires américains, cite régulièrement Alexis de Tocqueville comme un grand théoricien de l’identité politique des États-Unis.

Dans ces milieux, l’écrivain normand est aussi une figure du dialogue franco-américain dont certains passages sur le futur catholique d’Amérique revêtent des aspects prophétiques : « L’Amérique est le pays le plus démocratique du monde et c’est en même temps le pays où, selon des rapports fiables, la religion catholique fait le plus de progrès. C’est surprenant à première vue. (…) (N)Nos neveux auront de plus en plus tendance à se diviser en deux parties seulement, les uns sortant entièrement du christianisme, et les autres entrant dans le sein de l’Église romaine. »

Figure influente parmi les jeunes juristes conservateurs, Adrian Vermeule, professeur de droit à Harvard, s’appuie surEssai sur le principe générateur des Constitutions (1814) par Joseph de Maistre pour développer son constitutionnalisme du bien commun (2022). « Un renouveau est à l’œuvre en France, notamment chez les jeunes, il a publié le 24 octobre sur X. Le catholicisme français a une grandeur et une vitalité sans cesse renouvelées. » L’image de fond de son compte sur le réseau social montre également la façade du Conseil d’État français.

Théologiquement, la nouvelle garde catholique conservatrice compte parmi les disciples de saint Thomas d’Aquin. Cependant, le thomisme arrive aux États-Unis dans les années 1920 et 1930 grâce à des Français invités à enseigner dans les grandes universités américaines, notamment Étienne Gilson et Jacques Maritain. L’essai de ce dernier sur la démocratie chrétienne, Humanisme intégral (1936) était initialement une série de conférences données aux États-Unis et fait encore l’objet de nombreux débats.

Un passage de flambeau ?

Les liens universitaires franco-américains ne s’arrêtent pas là. Le philosophe et critique littéraire René Girard, professeur à Stanford (Californie) pendant l’essentiel de sa carrière, a profondément marqué son ancien élève Peter Thiel, mécène des milieux postlibéraux et premier investisseur majeur de Facebook, en 2004. Plus contemporain, on peut également noter l’influence de Rémi Brague, ancien professeur invité à l’université de Boston, ainsi que de Pierre Manent, largement lu et traduit.

Au-delà du monde politique, des personnalités comme Danielou ou Henri de Lubac ont marqué des générations de prêtres, comme le très médiatisé Mgr Robert Barron, évêque de Winona-Rochester et apologiste, qui a rédigé un doctorat en théologie à l’Institut catholique de Paris.

Cependant, au sein de cette nouvelle garde conservatrice catholique, certains ne veulent pas se réduire à cette influence française qu’ils perçoivent comme réductrice et objectent qu’en termes de dynamisme intellectuel catholique, les États-Unis auraient surpassé la France, où certains débats théologico-politiques arriver quelques années plus tard. Ils mettent également en avant leur propre tradition anglo-saxonne, allant de Thomas More à JK Chesterton, en passant par John Henry Newman.

Eleon Lass

Eleanor - 28 years I have 5 years experience in journalism, and I care about news, celebrity news, technical news, as well as fashion, and was published in many international electronic magazines, and I live in Paris - France, and you can write to me: eleanor@newstoday.fr
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