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pourquoi les partis politiques font davantage campagne dans les domaines où ils sont déjà bien implantés

Bien plus que pour une élection présidentielle ou municipale, les forces politiques engagées dans la bataille européenne misent sur les territoires et les catégories d’électeurs qui leur ont souri lors des élections précédentes.

Les élections européennes approchent à grands pas et le spectre d’une forte abstention continue de planer sur le scrutin, alors que près d’un électeur sur deux (49,9%) ne s’est pas rendu aux urnes en 2019. Pour tenter d’obtenir le meilleur score possible, dimanche juin 9, les différentes listes concernées doivent donc une nouvelle fois convaincre les Français de se rendre aux bureaux de vote.

« L’enjeu, dans une élection pour laquelle nous avons un Français sur deux votant, c’est avant tout d’assurer la mobilisation de son cœur électoral »explique Christelle Craplet, directrice de BVA Opinion. « Le plus grand risque est que nos électeurs restent chez eux, pas qu’on nous vole les électeurs », confirme le député LFI Matthias Tavel, directeur de campagne de La France insoumise. Les différents camps tentent donc en priorité de mobiliser ceux qui les ont soutenus lors des élections précédentes.

A ce petit jeu, chacune des principales forces politiques a ses zones privilégiées. Tête de liste Renaissance, « Valérie Hayer est originaire de l’ouest de la France, mais notre cœur électoral, c’est l’Ouest », insistait début avril un membre influent de la majorité. Les déplacements de l’eurodéputé depuis début mars traduisent la volonté de séduire cet électorat, avec de nombreuses visites effectuées dans la région Pays de la Loire et dans d’autres régions de la moitié ouest, comme la Nouvelle-Aquitaine ou la Normandie.

La France Insoumise privilégie les autres territoires. « On part beaucoup à l’étranger, où Jean-Luc Mélenchon a souvent dépassé les 50% », souligne Matthias Tavel. LFI privilégie également les quartiers populaires des grandes villes, où il a obtenu de bons scores lors des élections présidentielles de 2017 et 2022. Durant ces deux dernières semaines de campagne, le mouvement a décidé d’organiser un « Manifestal » dans cinq villes qui ont plutôt connu du succès par le passé : Paris , Lille, Rennes, Montpellier et Marseille. L’événement rennais a cependant été interdit par la préfecture par crainte de troubles à l’ordre public, ce que dénonce Louis Boyard, le député initiateur de la manifestation.

« Dans les grandes villes étudiantes, on sait qu’on a une base de sympathie qu’il faut mettre en mouvement. »

Matthias Tavel, directeur de campagne de Manon Aubry

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Ces choix se retrouvent également aux opérations de porte-à-porte et de distribution de tracts menées par les différentes listes à l’approche du vote. « Nous avons ciblé la distribution postale des tracts là où nous avions les meilleurs scores, car les électeurs ont de grandes chances de devenir lecteurs. Tout le monde fait ça »justifie un cadre Renaissance.

Pour mobiliser votre électorat potentiel, il ne suffit pas de cibler les bonnes zones sur la carte de France. « Il peut y avoir des raisonnements géographiques entre les partis, mais aussi socio-démographiques », soutient Christelle Craplet. La stratégie est donc de concentrer ses efforts sur des catégories de population a priori favorables. Pour certains, il s’agira de jeunes ou de ruraux, pour d’autres de catégories socioprofessionnelles supérieures ou de seniors par exemple. Cette stratégie sociodémographique peut conduire à cibler des secteurs géographiques, comme certaines villes ou zones rurales.

Ce ciblage prioritaire présente cependant deux inconvénients. Le premier risque est de déployer de gros efforts pour courtiser un électorat qui ne viendra pas le jour du scrutin. « LFI fait une erreur en s’en prenant aux quartiers populaires et aux jeunes, c’est un électorat qui ne votera pas », donne un cadre à la campagne macroniste. Les jeunes, plus nombreux que la moyenne à soutenir LFI, selon une enquête Ipsos pour France Télévisions et Brut publiée mercredi 29 mai, pourraient en effet s’abstenir à près de 60 %.

Le camp présidentiel est également préoccupé par ce danger. « D’habitude, les macronistes ont un électorat qui vote, avec des personnes plutôt âgées, traditionnellement pro-européennes. Cette année, ce n’est pas vraiment le cas”note Christelle Craplet.

« Les électeurs traditionnels du camp macroniste ne semblent pas trop mobilisés, du moins moins que ceux du RN. »

Christelle Craplet, directrice de BVA Opinion

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Cette différence de mobilisation, mesurée par la multitude d’enquêtes d’opinion qui ont été publiées ces derniers mois, explique notamment l’écart important entre les listes RN et Renaissance dans les sondages.

Aucune des têtes de liste n’ayant le don d’ubiquité et les militants ne formant pas une armée capable de frapper à toutes les portes de la France, il faut parfois, en campagne, abandonner certaines zones du territoire. « Nous n’allons pas perdre trop de force là où nous sommes moins performants », avait prévenu le député Renaissance Pieyre-Alexandre Anglade, directeur de campagne de Valérie Hayer, aux journalistes fin mars. Les consignes ont évidemment été intégrées par les troupes macronistes : « Je ne cherche pas à convaincre les gens qui sont trop loin de nous. Je n’arrive pas à convaincre les partisans de Jordan Bardella, mais plutôt les pro-européens.»confie un ministre de la Renaissance. «On ne va pas finir la campagne à Nice»ironise Matthias Tavel de LFI.

C’est justement à Nice que Marion Maréchal terminera sa campagne pour la Reconquête, jeudi 6 juin. L’objectif, pour la candidate, est de franchir la barre des 5% et d’envoyer des élus au Parlement européen. En 2019, avec 22,6 millions de suffrages exprimés, il a fallu environ 1,13 million de voix pour y parvenir. A quelques jours du verdict des urnes, faire le plein dans les zones de force est donc une nécessité absolue. Dans une ville et un département des Alpes-Maritimes qui ont voté à 14 % pour Eric Zemmour au premier tour de l’élection présidentielle de 2022, avec 78 000 voix, la nièce de Marine Le Pen l’a bien compris.

Ray Richard

Head of technical department in some websites, I have been in the field of electronic journalism for 12 years and I am interested in travel, trips and discovering the world of technology.
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