Pourquoi les Français se servent de moins en moins de leur appli bancaire
(AVIS D’EXPERT) Hormis la validation des paiements en ligne, l’usage des applications bancaires est en déclin. Décryptage avec notre expert Guillaume Almeras, fondateur du site de veille et de conseils Score Advisor.
Retour sur les résultats étonnants qui ressortent de la dernière étude réalisée par l’Ifop pour la Fédération bancaire française sur « Les Français, leur banque, leurs attentes ». Des résultats qui sont passés presque inaperçus.
Aujourd’hui, la banque digitale s’est définitivement imposée : 94 % des Français consultent le site Internet ou l’application mobile de leur banque – 79 % des Français ont téléchargé cette dernière, soit l’un des taux les plus élevés tous secteurs d’activité confondus.
Oui mais voilà, en 2022, le taux était de 96 %. Différence statistique simple et négligeable ? En fait non, comme le montrent les chiffres suivants, les applications bancaires ont tendance à être de moins en moins utilisées.
Parmi les Français qui utilisent l’application de leur banque, 57% le font pour suivre l’évolution de leurs comptes. Ils étaient 63% en 2018. 48% l’utilisent pour maîtriser leur budget et leurs dépenses, contre 56% en 2018. Le pourcentage d’utilisation pour la gestion des transactions reste stable et bien qu’il grimpe à 36% (contre 16% en 2018) pour la validation des paiements en ligne, cela dépend des usages du e-commerce et non des utilisateurs eux-mêmes. Pour d’autres fonctions – peu acceptées compte tenu de leurs tarifs d’utilisation – la consultation des placements et de l’épargne s’est accrue avec les difficultés de pouvoir d’achat, tandis que la possibilité offerte par l’application de ne pas se rendre en agence et de faciliter le contact avec son conseiller stagne (la première étant même en légère baisse par rapport à 2018).
La tentation du moindre effort
Comment expliquer ces baisses inattendues ? Apparemment, ils ne sont pas dus aux applications elles-mêmes puisque les tendances sont comparables chez les clients qui consultent plutôt le site Internet de leur banque.
En fait, l’explication semble résider dans la tentation du moindre effort qui est l’un des principaux effets de la digitalisation des services. Alors que la même étude tente d’identifier quelle serait la banque idéale pour les Français, les seuls avis tranchés concernent la volonté d’être alerté en cas de mouvements suspects sur ses comptes et la garantie de sécurité de ses données bancaires. Cela exprime la volonté d’une gestion automatisée, presque déléguée.
D’autres études le montrent également : on s’attendait à ce que la banque numérique change les comportements. C’est effectivement le cas, mais pas dans le sens attendu. Il était censé rendre les clients plus actifs dans la gestion de leurs finances. Ils espèrent plutôt être soulagés au maximum, l’appli ne devant pas être de plus en plus utilisée mais au contraire être oubliée.
Assistant automatisé et contact direct
Bref, la prochaine étape devrait être celle du robot client. L’application bancaire devenant (ou étant concurrencée par) un assistant automatisé, un robot auquel nous déléguerons en grande partie la gestion de nos finances et la tâche de parler aux robots que notre banque aura mis en place pour distribuer ses services.
Mais à une condition : que la possibilité d’atteindre un interlocuteur humain, y compris par contact direct, soit toujours assurée.
Il s’agit d’un modèle hybride qui est le plus coûteux pour les banques et qui n’est peut-être même pas tenable si l’on considère les derniers résultats des banques de détail en France. Il suffit de dire que la banque numérique ne représente pas en soi un nouveau modèle. Celle de la relation bancaire doit être réinventée. Hé, et si on reparlait des agences de franchise ?