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pourquoi le Vatican se concentre sur les objectifs humanitaires

Ce sont deux mots qui résonnent chaque semaine sur la vaste place Saint-Pierre. « L’Ukraine est martyrisée. » Depuis plus de deux ans, à la sortie de l’Angélus de dimanche et lors de ses audiences de mercredi matin, le pape François n’a cessé d’utiliser cette expression forgée dès le début de l’attaque russe. Une attention constante, maintenue malgré tout, et manifestée une nouvelle fois mercredi 12 juin, avant le sommet pour la paix en Ukraine, qui se tient les 15 et 16 juin, en Suisse.

Au Vatican, ces deux jours de négociations seront suivis de près, puisque le pape, officiellement invité au sommet, envoie le cardinal Pietro Parolin, secrétaire d’État du Saint-Siège, qui prévoit également de se rendre en Ukraine fin juillet. Ce dernier a également reçu, le 8 juin, le bras droit du président ukrainien, Andriy Yermak. Le pape doit rencontrer vendredi 14 juin le président Volodymyr Zelensky, en marge du G7, ainsi que les présidents américain Joe Biden et Emmanuel Macron.

«Un sommet de paix où manque la moitié des belligérants peut-il vraiment être utile ? »

Ces dernières semaines, Kiev a multiplié les contacts avec Rome pour tenter d’obtenir un soutien explicite du Saint-Siège à la formule de paix proposée par les autorités ukrainiennes. Mais au Palais Apostolique, où nous avons toujours prétendu parler  » avec tout le monde « , et pas à « Ne fermez jamais la porte à quiconque, quel qu’il soit », comme l’explique un responsable, nous ne cachons pas notre perplexité quant à l’opportunité du sommet suisse. «Un sommet de paix où manque la moitié des belligérants peut-il vraiment être utile ? « , » s’interroge une source vaticane, ajoutant que l’absence annoncée de la Chine compromet encore davantage la possibilité que ce sommet aboutisse à un résultat.

Au fil des mois, François, puis la diplomatie papale, ont choisi de concentrer leurs efforts sur des objectifs humanitaires. L’espoir, nourri au Palais apostolique au début du conflit, d’une médiation entre la Russie et l’Ukraine s’est dissipé assez vite, tout comme la perspective d’un voyage du pape à Kiev, très sérieusement envisagé à l’été 2022.

Le Vatican se concentre désormais sur la libération des enfants ukrainiens kidnappés en Russie. Pour cela, le pape François a nommé en mai 2023 Matteo Zuppi, cardinal italien, figure de la communauté de Sant’Egidio, à la tête d’une mission ayant pour objectif de « pour aider à avancer vers une solution pacifique ». Le cardinal, qui s’est depuis rendu à Washington, Pékin, Kiev et Moscou, tente ces dernières semaines de finaliser un protocole d’accord pour la libération de ces mineurs. Travail réalisé avec le soutien de la Secrétairerie d’État, point central de la diplomatie vaticane.

« Les canaux sont ouverts des deux côtés »

Selon le journal des évêques italiens, Avvenire, 388 mineurs ont été libérés, principalement par l’intermédiaire de l’organisation Save Ukraine, suite à la médiation de plusieurs acteurs, dont le Saint-Siège. Selon nos informations, le cardinal Zuppi, qui bénéficie d’un fort soutien de la Maison Blanche, plaide également en faveur de la libération d’autres civils, notamment des médecins et des aumôniers militaires, également prisonniers en Russie.

Certains diplomates occidentaux sont également convaincus que le Vatican aurait un « fenêtre politique » jouer un rôle important entre le sommet suisse et les élections américaines de novembre. Le prélat italien s’entretient régulièrement avec Kiev et Moscou. « Les canaux sont ouverts des deux côtés » dit-on à Rome.

 » C’est très difficile, témoigne une source diplomatique à Rome. Lorsqu’ils ont vu la liste établie par le Vatican, les Russes ont barré de nombreux noms d’enfants, prétendant qu’ils étaient russes, que leur famille l’était ou qu’ils étaient devenus majeurs entre-temps. »« La position russe est très peu constructive » » une autre source euphémise. Qui ajoute : « Pour les Ukrainiens, ce n’est pas facile de négocier avec le diable… »

William Dupuy

Independent political analyst working in this field for 14 years, I analyze political events from a different angle.
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