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pourquoi le rôle du Rassemblement national reste central dans le choix du Premier ministre

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Marine Le Pen, présidente du groupe RN à l'Assemblée nationale, arrive à l'Elysée pour une rencontre avec Emmanuel Macron, le 26 août 2024, à Paris. (UMIT DONMEZ / ANADOLU / AFP)

Avec 126 députés, le groupe d’extrême droite à l’Assemblée nationale pèse lourd en cas d’éventuelle motion de censure, d’où son influence dans la désignation du futur chef du gouvernement.

Que veut le Rassemblement national ? La question est loin d’être anodine dans la situation politique actuelle, avec une Assemblée nationale divisée en trois blocs et sans majorité claire. L’entourage de Jordan Bardella, président du parti, a fait savoir mardi 3 septembre à franceinfo que le RN était prêt à accepter un gouvernement technique sous certaines conditions, notamment l’instauration d’une représentation proportionnelle pour les prochaines législatives. Cela pourrait peut-être guider le choix d’Emmanuel Macron, qui poursuit ses consultations pour trouver un Premier ministre, près de deux mois après les législatives anticipées.

Bien sûr, le parti d’extrême droite n’est plus un candidat immédiat au pouvoir. Après le second tour des élections législatives, il est même passé de la position de« acteur principal » à celui de « spectateur »note le sociologue et spécialiste de l’extrême droite Erwan Lecœur. Le slogan « Bardella Premier ministre » Arrivé troisième aux élections anticipées de juillet, l’ancien parti de Jean-Marie Le Pen n’a pas pu prétendre à Matignon. Mais avec un nombre inédit de 126 députés, le groupe de Marine Le Pen s’est imposé comme une force centrale à l’Assemblée nationale, dont il faudra tenir compte dans le choix du Premier ministre. « NNous sommes indispensables pour voter une motion de censure ou même voter ou rejeter un texte »se vante le député RN Julien Odoul.

En l’absence d’une coalition entre la gauche et la droite républicaine, le parti d’extrême droite – avec le renfort possible des 16 députés du groupe d’Eric Ciotti – est capable d’apporter un poids décisif pour renverser un gouvernement, reconnaît-on dans le camp macroniste.

« Le Rassemblement national détient les clés de la censure. »

Un conseiller de l’exécutif

à franceinfo

« Ils sont majoritaires avec le NFP s’ils décident d’agir de concert pour quoi que ce soit »note le député Renaissance Mathieu Lefèvre. « Emmanuel Macron cherche quelqu’un que le RN ne censurera pas, sinon ça ne marchera pas »ajoute Erwan Lecœur. Marine Le Pen est la maîtresse du jeu. Elle peut dire : « Untel je censure, untel je ne censure pas ».

Problème : la stratégie du parti d’extrême droite est variable et peu claire pour le camp présidentiel. Le 11 juillet, Marine Le Pen a dû prendre la succession du secrétaire général de son groupe, Renaud Labaye. « Par principe, nous ne censurons jamais pour censurer. Tout dépendra du gouvernement, du discours de politique générale ou des textes présentés. »il a assuré le Figaro sur une éventuelle nomination à Matignon de la candidate de gauche, Lucie Castets. « Le groupe RN censurera tout gouvernement où LFI et les écologistes auront des responsabilités ministérielles »Marine Le Pen a immédiatement clarifié sur X. Jordan Bardella est allé encore plus loin en annonçant sur X que son parti « censurerait immédiatement un gouvernement NFP minoritaire »en fait, y compris d’autres forces de gauche.

« On ressent les différentes séquences qui s’y déroulent »observe le député Renaissance Antoine Armand.Acte 1 : Ils tentent de faire oublier leurs candidats désastreux de la campagne législative. Acte 2 : Ils s’expriment à nouveau, mais ne savent plus qui et quoi censurer.

Le 26 août, après avoir été reçue à l’Elysée, Marine Le Pen a également écarté l’hypothèse d’un gouvernement technique. « Je n’y crois pas du tout. (…) Il n’y a que des gouvernements politiques cachés derrière des noms techniques »a déclaré l’ancien candidat à la présidentielle. Selon les dernières déclarations de l’entourage de Jordan Bardella, le RN semble avoir changé d’avis sur la question.

Ce revirement ne surprend guère Erwan Lecœur. Le parti à la flamme gagnerait à se doter d’un gouvernement technique, ce qui placerait Emmanuel Macron en première ligne, estime cet enseignant-chercheur à l’université Grenoble Alpes.

« Marine Le Pen a intérêt à avoir le gouvernement le plus fantoche possible, qui dépend entièrement de Macron pour qu’elle puisse le critiquer tous les jours. Un gouvernement technique lui permettrait de cibler le président. »

Erwan Lecœur, spécialiste de l’extrême droite

à franceinfo

Le RN a toutefois écarté l’option de Thierry Beaudet, le président du Conseil économique, social et environnemental, dont la possible nomination à Matignon a été largement évoquée lundi. Une telle personnalité représenterait une docilité à l’égard de l’Elysée, « laquais incarné »selon le député RN Jean-Philippe Tanguy. Le parti à la flamme n’a pas été très satisfait des positions anti-RN de Thierry Beaudet à quatre jours du premier tour des législatives. « Le RN met en péril l’avenir des corps intermédiaires »il a déclaré dans une interview avec La Tribuneaprès s’être également opposé publiquement à la loi sur l’immigration.

Les options plus politiques, qu’elles soient de droite ou de gauche, ne sont pas beaucoup plus plébiscitées par le RN. Le parti a indiqué mardi vouloir censurer un gouvernement dirigé par Xavier Bertrand ou Bernard Cazeneuve, dont les noms circulent pour Matignon. Dès son entretien avec le chef de l’Etat fin août, Marine Le Pen avait assuré qu’elle ne voulait pas de Xavier Bertrand. En 2015, elle avait perdu face à l’ancien ministre de la Santé lors des élections régionales dans les Hauts-de-France. « On a connu quelqu’un d’un peu plus ferme et moins soumis à Macron que Xavier Bertrand dans les rangs de la droite »justifie Julien Odoul.

Comme lors de la législature précédente, le RN se trouve en position d’arbitre. « L’hypothèse Cazeneuve, Beaudet, Bertrand… Tout cela ne tient que par l’attitude du RNanalyse le politologue Benjamin Morel. Le RN a aussi intérêt à démontrer sa crédibilité et sa responsabilité et à faire monter les enchères. C’est ce qu’on appelle un soutien sans participation du RN.

Le 26 août, Marine Le Pen soulignait la respectabilité de son parti. « Nous avons dit : soit il y aura une majorité stable du Rassemblement national, soit ce sera le chaos. Emmanuel Macron a choisi le chaos »a-t-elle assuré. En réalité, Marine Le Pen a tout intérêt à voir cette cacophonie politique perdurer, tout en adoptant une attitude supérieure. « L’idée du RN c’est : « Plus il y aura de chaos, plus nous apparaîtrons comme des démocrates et plus nous profiterons de ce chaos pour arriver à la prochaine élection présidentielle. »déclare Erwan Lecœur. Pendant ce temps, le RN se réjouit de sa capacité à renverser n’importe quel gouvernement, quand il le juge approprié. « La censure dépend de la ligne politique. Nous sommes libres », a-t-il ajouté. sourit Jean-Philippe Tanguy.

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