La situation est inédite sur le marché immobilier, dont le ralentissement doit être relativisé, rappelle Nicolas Bosquet, à la Chambre des notaires de Bretagne, après une période de taux exceptionnellement bas synonyme d’explosion du nombre de transactions et des prix. Depuis, le nombre de ventes est tombé à un niveau historiquement bas, tout comme le nombre de constructions de maisons. La conséquence d’une série de facteurs défavorables qui pèsent sur le marché, mois après mois, sans perspective d’évolution rapide.
1 Les prix restent élevés
« Le problème, c’est d’abord le prix », explique le notaire breton. Acheter une maison à moins de 150 000 € est devenu quasiment impossible en Bretagne, à moins de se tourner vers le centre de la région ou de choisir, par défaut, un passoire thermique. Ces maisons classées F ou G sont les plus vendues car leurs propriétaires sont les seuls à accepter de revoir leur prix à la baisse. « Tout dépend de la nature et de la localisation du bien », résume Nicolas Bosquet, rappelant que Rennes et Nantes, où des hausses record avaient été enregistrées ces cinq dernières années, affichent des baisses de prix importantes depuis le début de l’année.
Pas de quoi toutefois relancer le marché dans l’attente d’une correction plus forte à la baisse des prix. Une évolution qui, selon la chambre des notaires, ne privera pas les propriétaires – pendant au moins cinq ans – de plus-value.
2 La hausse des coûts de construction
Relancé, le marché pourrait vite retrouver un élan renforcé par des candidats à la construction contraints de se rabattre sur l’ancien. En quatre ans, les conséquences des confinements de la pandémie de covid et de la guerre en Ukraine ont aussi fait flamber le coût de la construction.
Conséquence de la hausse du prix des matériaux maintenus, pour l’instant, à des niveaux élevés. Mais aussi de la hausse des revenus des salariés du BTP. Si bien qu’en l’espace de deux ans, le nombre de ventes enregistrées par les constructeurs a été divisé par deux. Sans visibilité pour 2025, Alban Boyé, le patron de Trecobat, plaide pour une reprise du marché qui stabiliserait le nombre de constructions.
3 Une hausse rapide des taux
D’autant que la hausse des prix se double d’une hausse des taux d’emprunt et d’une politique prudentielle des autorités bancaires peu favorable à la relance du marché, tant pour le neuf que pour l’ancien. « Le Haut Conseil de stabilité financière nous a contraint, avec de nouvelles règles, à un endettement maximum de 35 % des revenus, quel que soit le niveau de revenu du ménage », rappelle Karim Ganaï. Pour le directeur départemental Ille-et-Vilaine du Crédit Mutuel de Bretagne, « ces deux effets combinés ont cassé la dynamique du marché et l’ont très fortement contraint ». Y compris en matière d’investissement locatif, dans une période où le manque de logements est criant.
4 Terres plus rares
Dans ce contexte, la perspective du zéro artificialisation nette (Zan) inquiète les professionnels de l’immobilier. La loi climat et résilience prévoit une division par deux de la consommation foncière d’ici 2031, puis une impossibilité d’étendre la construction sans renaturer une surface équivalente. Pour le géographe spécialiste de l’aménagement Guy Baudelle, « le risque d’inflation sur le prix du foncier est évident ».
Une communauté qui n’avait rien consommé et qui soudainement a des projets de développement, elle est coincée.
Mais le patron de Trecobat voit un risque néfaste immédiat pour les communes qui n’ont pas encore consommé de terrain : « Une commune qui n’a rien consommé et qui a tout d’un coup des projets de développement, elle est coincée », dénonce-t-il, appelant à plus de flexibilité.
Il est vrai, concède Laurence Fortin, « la Zan demande beaucoup plus, de la part des élus locaux à travers les documents d’urbanisme, de maîtriser le foncier ». Mais pour la vice-présidente de la Région en charge du dossier, « il n’existe actuellement aucun plan local d’urbanisme dans les normes de la Zan ».
5 Peu de perspectives d’amélioration
Dans ces conditions, quelles sont les perspectives pour le marché de la maison individuelle ? Les maisons resteront hors de portée d’une grande partie des primo-accédants. C’est une évidence pour tous les acteurs du marché immobilier. Cela oblige les jeunes ménages à se tourner vers les appartements.
Incapable de prédire quand les prix de l’immobilier commenceront réellement à baisser et en plus d’un changement dans les règles entourant le ratio d’endettement, Karim Ganaï appelle les acheteurs potentiels à prendre en considération le fait que les taux d’emprunt actuels ne devraient plus varier d’ici la fin de l’année.