Face aux enjeux climatiques, les vignerons sont plus que jamais conscients de l’utilité de développer d’autres plantations. La multiplication des cultures démontre ses bénéfices au service de la biodiversité et de la diversification des revenus.
Au Château La Verrerie, dans le Luberon, Valentine Tardieu-Vitali, l’œnologue et directrice du domaine, veille sur une propriété de 150 hectares, composée d’une belle forêt, de vignes et d’oliviers. « Dans Provence , autrefois, c’était la culture de la vigne et de l’olivier, mais aussi celle des arbres fruitiers, qui prédominait. La polyculture a toujours existé, elle constituait une économie à part entière dans les exploitations agricoles et permettait d’échapper économiquement aux aléas climatiques. Mais le remembrement des terres et les politiques agricoles qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale ont encouragé une augmentation de la production et orienté les agriculteurs vers une spécialisation des cultures.« , elle dit. Afin de créer des exploitations agricoles mécanisables et productives, les parcelles ont été regroupées et la polyculture a progressivement disparu du paysage. Et pourtant à l’origine, il faut rappeler que la vigne domestiquée, de l’espèce Vitis vinifera qui appartient à la famille des Vitacées, évoluait dans la canopée aux côtés d’autres plantes comme les arbres, indispensables à sa prolifération. « La vigne n’a pas toujours été la monoculture impeccable que l’on connaît aujourd’hui, cette plante cultivée à la « baguette », attachée, taillée, effeuillée, effeuillée (…) De par sa nature même de liane, dès sa naissance elle s’est mariée l’arbre s’élève vers la lumière», résument Léa et Yves Darricau, de leur travail La vigne et ses plantes compagnespublié aux Editions du Rouergue.
« Trouver un équilibre »
Au Château de Selle, à Taradeau dans le Var, Jean-François Ott, le directeur général des Domaines Ott, évoque l’histoire agricole de sa propriété sur laquelle le vignoble cohabitait avec de nombreuses cultures : «A l’époque de mon arrière-grand-père, on élevait des vers à soie, on cultivait de la lavande, de la vigne, des oliviers, mais on faisait aussi du maraîchage. Phylloxéra, à la fin du XIXe sièclee siècle, avait contraint les vignerons à replanter puis le succès commercial des vins fit que la monoculture se répandit. La soie s’est progressivement arrêtée, les plateaux de lavande ont migré. L’idée n’est pas de revenir au modèle de 1912, car la spécialisation a du bon car elle permet de produire plus de vins de qualité, mais de trouver un équilibre« , il explique. La polyculture, un outil au service de la biodiversité ? Parce que les données climatiques sont bouleversées, que la monoculture appauvrit les sols et favorise la propagation des maladies, les vignerons s’efforcent de diversifier leurs plantations. Cette évolution du paysage peut consister en une meilleure gestion des espaces boisés mais aussi en l’introduction de cultures liées à la vigne, ou dans la vigne, en opérant une forme de retour à une polyculture ancestrale. Si chacun a à cœur de mettre cette dynamique écologique globale au service de la bonne santé des vignobles, certains envisagent de tirer des revenus complémentaires de ces nouvelles plantations.
Utilisez tout ce que la nature offre
Dans le Var, au Château Sainte-Roseline et au Château des Demoiselles, Aurélie Bertin, la propriétaire, se lance dans la plantation de 300 arbres pour créer des haies sur son vignoble des Demoiselles, avec des espèces endémiques comme le pistachier et le caroubier. . « L’objectif est de revitaliser nos sols et de renforcer notre écosystème. Ces haies ont intérêt à imiter l’érosion et à favoriser l’infiltration de l’eau. Ils feront également office de corridors végétaux où différentes espèces viendront nicher.« , elle explique. L’adaptation des pistachiers productifs est actuellement à l’étude. « La pistache verte est très appréciée en pâtisserie, elle offre des opportunités financières à condition de trouver un emplacement de plantation adapté.», poursuit Aurélie Bertin.