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pourquoi la Pennsylvanie pourrait faire basculer le vote

A quelques jours de l’élection présidentielle, prévue le 5 novembre, la Pennsylvanie retient l’attention des observateurs. Cet État du nord-est américain est considéré comme clé dans une élection qui s’annonce très serrée.

Un état particulièrement convoité. Depuis plusieurs mois, les deux candidats à la présidentielle Kamala Harris et Donald Trump multiplient les déplacements en Pennsylvanie.

Dimanche 27 octobre, la démocrate s’est de nouveau rendue dans cet Etat du nord-est américain pour sa quatorzième visite en seulement quelques mois de campagne. Son rival Donald Trump a également étudié cet État de manière approfondie ces dernières semaines. L’homme d’affaires y a tenu un grand meeting début octobre aux côtés du milliardaire de la tech Elon Muskà Butler, lieu de sa première tentative d’assassinat en juillet dernier.

Ce n’est pas par hasard que les candidats concentrent leurs efforts sur la Pennsylvanie. Cet Etat fait partie des sept « swing states », c’est-à-dire les Etats pivots considérés comme clés pour remporter l’élection présidentielle du 5 novembre.

Parmi les sept États clés, la Pennsylvanie est particulièrement convoitée. En cause, le nombre élevé de voix électorales qu’il permet de remporter, 19, contre par exemple seulement 6 pour le Nevada, autre « swing state » à l’issue très incertaine.

Un « infime » écart entre les candidats

La Pennsylvanie apparaît comme un Etat « très indécis », estime sur BFMTV.com Alexis Pichard, professeur de civilisation américaine à l’université Paris-Nanterre.

L’écart entre Kamala Harris et Donald Trump dans les sondages d’opinion est de l’ordre de quelques dixièmes de point, selon les derniers sondages, ce qui est « infime », selon ce spécialiste des Etats-Unis. De quoi laisser planer l’incertitude sur l’identité du vainqueur dans cet Etat le 5 novembre.

« Dans les sondages, la tendance change d’un jour à l’autre », résume le chercheur.

Cette indécision pourrait être le signe que le vote se jouera à quelques milliers de voix. En 2020 déjà, Joe Biden s’était imposé grâce à une avance minime face à Donald Trump en remportant 50,01 % des voix, soit seulement 80 000 voix de plus que son rival. Quatre ans plus tôt, c’était l’homme d’affaires qui l’avait emporté, là encore de justesse, avec à peine plus de 40 000 voix devant son adversaire de l’époque, Hillary Clinton.

La plupart des dépenses publicitaires

Cette indécision pèse sur le résultat final du vote. « Pour Kamala Harris, il sera quasiment impossible de gagner sans la Pennsylvanie », estime Alexis Pichard, soulignant ainsi l’importance de cet État dans la course à la Maison Blanche.

Aurore Portet, professeur à Sciences Po Lyon et spécialiste de la politique américaine, est moins formelle. Pour elle, « toute l’attention est portée sur les sept Etats clés » actuellement car « l’élection est déjà décidée dans de nombreux Etats, comme la Californie, qui sera démocrate, ou le Mississippi, qui sera, sans surprise, républicain ». L’enseignant estime toutefois qu' »à ce stade, (il est) impossible de faire une prédiction sur le candidat qui l’emportera dans (les Etats clés), et donc au niveau national ».

Il n’en demeure pas moins que pour convaincre les électeurs de ces régions, les deux partis investissent des sommes colossales. Selon AdImpact, une agence qui compile les dépenses publicitaires des partis politiques, le camp démocrate a dépensé 159,1 millions de dollars et le parti républicain 120,2 millions rien que pour cet État, entre le 22 juillet, qui correspond à l’annonce du retrait de Joe Biden, et 7 octobre. La Pennsylvanie est l’État où les deux partis ont dépensé le plus d’argent ces dernières semaines.

Le vote latino particulièrement convoité

Avec cette abondance de publicité, démocrates et républicains entendent influencer le vote en Pennsylvanie en jouant notamment sur deux facteurs, selon Aurore Portet.

« Les deux partis essaient d’inciter les gens à aller voter dans cet Etat parce que le taux de participation va faire la différence », souligne-t-elle d’abord sur BFMTV.com, rappelant au passage que les Américains sont en moyenne beaucoup moins nombreux à aller aux urnes. bureaux de vote que les Français. Toutefois, compte tenu du faible écart annoncé entre les deux candidats, « l’élection peut se décider par la participation », estime-t-elle.

(Bonjour Washington) – L’importance du vote latino-américain

Par ailleurs, les deux partis « tentent de jouer sur le vote des Latino-Américains », selon Aurore Portet, alors qu’il existe une communauté importante dans cet Etat, avec près de 600 000 Hispaniques susceptibles de participer au scrutin.

« Ce n’est pas un électorat engagé dans une cause particulière », rappelle Aurore Portet, qui souligne qu’il s’agit d’une population composée de « nombreuses sous-catégories » selon leur pays d’origine notamment et amenée à voter de différentes manières. divers. Face à cette incertitude, ils font donc l’objet d’une cour assidue de la part des deux parties. Reste à savoir si les récents propos polémiques du comédien Tony Hinchcliffe, qui comparait Porto Rico à une « île flottante d’ordures » lors d’un meeting de Donald Trump, auront une influence sur le vote de cet électorat.

Un État marqué par la désindustrialisation

Au-delà de cette population latino-américaine, l’enjeu principal pour Kamala Harris et Donald Trump, s’ils veulent gagner en Pennsylvanie, sera de séduire des électeurs touchés par la désindustrialisation et inquiets pour leur emploi.

En fait, la Pennsylvanie appartient à la « ceinture de la rouille », nom donné à ces États du nord-est du pays confrontés à un déclin économique provoqué par le fort déclin du recours aux industries lourdes à partir de la fin des années 1950.

« La Pennsylvanie a longtemps été démocrate parce que c’est un État historiquement ouvrier avec des syndicats puissants soutenus par le camp démocrate », rappelle Aurore Portet.

La fracture hydraulique, un enjeu crucial

Malgré cette tradition démocrate en Pennsylvanie, Etat où le discours de Donald Trump sur l’immigration et les questions sociales ne trouve généralement pas beaucoup de résonance, le candidat républicain parvient à créer la surprise en 2016 et à s’imposer aux dépens d’Hillary Clinton.

Pour y parvenir, Aurore Portet estime que Donald Trump s’est appuyé avant tout sur un discours « populiste » en défendant le « portefeuille des Américains » et « l’America First, c’est-à-dire le protectionnisme américain ». Il s’est donc concentré sur les questions d’emploi et de revenus, chères aux habitants de Pennsylvanie.

Donald Trump a notamment séduit une partie des habitants de cet État en 2016 en défendant la fracturation hydraulique, cette technique d’extraction du gaz naturel qui a permis de relancer l’emploi dans le secteur industriel de la région. Des arguments sur lesquels il espère encore une fois prospérer cette année.

De son côté, Kamala Harris a été contrainte de « modifier son discours » sur cette technique controversée, selon Alexis Pichard. Alors qu’elle s’était déclarée favorable à son interdiction il y a quelques années, pour des raisons environnementales, la démocrate a depuis inversé sa position pour ne pas se couper de l’électorat travailleur.

Un État qui « reflète l’ensemble » du pays

Outre cette importante population ouvrière, la Pennsylvanie est composée d’électorats très divers. On y retrouve notamment « une fracture entre électorats ruraux et urbains notamment » avec de grandes villes comme Philadelphie et Pittsburgh habitées par une importante population afro-américaine et des banlieues aisées à majorité blanche. Il existe également une « opposition en termes de niveau d’études et en termes de niveaux socio-économiques », indique l’enseignant de Sciences Po Lyon.

En Pennsylvanie, les « statistiques reflètent l’ensemble des États-Unis », résume Aurore Portet.

Au soir du 5 novembre, cet état clé devrait être « scruté avec attention », estime Alexis Pichard. Il vaudra toutefois mieux être patient avant l’annonce des résultats. Car entre le faible écart de voix attendu et le dépouillement des votes à distance qui ne peut commencer que le jour du scrutin, l’attente devrait donc être longue.

« Il y aura des cas de litiges possibles », ajoute le chercheur, alors que Donald Trump a affirmé à plusieurs reprises que la seule possibilité pour lui de perdre l’élection serait si les démocrates truquaient les résultats. « Nous allons vivre une élection serrée et tendue », prévient Aurore Portet.

Gérard Truchon

An experienced journalist in internal and global political affairs, she tackles political issues from all sides
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