Pourquoi la mise en service de l'EPR de Flamanville ne pouvait plus attendre
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Pourquoi la mise en service de l’EPR de Flamanville ne pouvait plus attendre

Pourquoi la mise en service de l’EPR de Flamanville ne pouvait plus attendre

Le réacteur nucléaire français le plus puissant a commencé à charger de l’uranium ce mercredi 8 mai 2024 après un projet semé d’embûches, à un coût pharaonique.

Mercredi 8 mai, 14 heures EDF communique. « Les équipes ont commencé à charger les assemblages combustibles dans la cuve du réacteur. » Le célèbre EPR (Réacteur Pressurisé Européen) de la centrale électrique de Normandie Flamanville (Manche) est enfin lancé. L’opération consiste à transférer 241 assemblages combustibles depuis une piscine de stockage jusqu’au fond de la cuve du réacteur, qui mesure 10,6 mètres de haut. « Le raccordement au réseau électrique national de l’unité de production est prévu pour l’été 2024 », poursuit l’électricien.

57 réacteurs

L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) avait donné son feu vert la veille, le 7 mai, soit exactement six mille jours après la pose du premier béton du bâtiment nucléaire, le 3 décembre 2007. Au terme d’un laborieux chantier de Âgé de 17 ans, ponctué de multiples problèmes et de surcoûts colossaux, l’EPR de Flamanville, réacteur de 1 600 MW, sera le plus puissant du parc nucléaire français, qui sera désormais au nombre de 57.

« Un soulagement »

Nicolas Goldberg, Energy Partner chez Columbus Consulting, se félicite de cette mise en service. « C’est un grand soulagement pour tout le monde. Cela signifie que nous pourrons charger du combustible, réaliser des tests de démarrage et envisager de produire de l’électricité d’ici l’été», réagit l’expert, pour qui cette étape marque le début d’une nouvelle ère pour l’énergie nucléaire en France.

Et si la France abandonnait complètement le nucléaire ? Que faudrait-il pour compenser…

Déceptions

Démarré en 2007, le projet EPR a connu de nombreuses vicissitudes. Défauts dans le béton
anomalie dans la composition de l’acier de la cuve et du couvercle
accident mortel, écarts de qualité détectés sur certaines soudures
… La facture totale est estimée à 13,2 milliards d’euros, selon EDF, soit quatre fois l’estimation initiale de 3,3 milliards.

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Désindustrialisation

Jean-Charles Risbec, ancien responsable de la politique industrielle au comité régional CGT et co-auteur du livre EPR Flamanville : un chantier sous tension (éditions du Croquant, 16 €), voit dans les multiples dysfonctionnements du chantier de Flamanville le résultat de la désindustrialisation de la France. « Avant la décision de construire un EPR à Flamanville, il faut rappeler qu’il y a eu vingt ans pendant lesquels on n’a pas construit. Et ça, c’était terrible. Pendant cette grande période de non-construction, il y a eu une rupture de toutes les équipes. On a eu des départs massifs, des pertes de savoir-faire.» Nicolas Goldberg ajoute : « Trouver un soudeur industriel, avoir un prestataire qui coule du béton suffisamment fiable pour le nucléaire, on ne savait plus comment faire. Il y avait beaucoup de retard à cause de ça.

Problèmes de sécurité

Toujours. Le démarrage de l’EPR de Flamanville continue d’alimenter les critiques de ses opposants historiques. Le réseau Exit Nuclear met en garde contre une mise en service précipitée, motivée par des enjeux politiques plutôt que techniques. « Cette mise en service précipitée peut s’expliquer par la volonté du gouvernement de démontrer que son EPR français peut fonctionner », tacle l’association, qui rappelle que la population, appelée à se prononcer du 27 mars au 17 avril 2024 sur la décision de projet de l’ASN autorisant la mise en service de l’EPR, a rendu « 105 avis pointant le problème de la cuve du réacteur et 85 celui du couvercle » (qui ne sera remplacé qu’en 2025 au plus tôt, après un premier cycle d’exploitation).

Place à l’EPR2

En tout cas, le réacteur nucléaire français le plus puissant voit enfin le jour, comme le souhaitait le président de la République. « Il faut reprendre le fil de la grande aventure du nucléaire civil en France », déclarait en février 2022 Emmanuel Macron, en lançant le programme de construction de nouveaux réacteurs qui visait, aux côtés des énergies renouvelables, à garantir l’approvisionnement électrique de la France et à contribuer à l’objectif carbone. neutralité.

Macron annonce la construction de six réacteurs EPR2 et d’une cinquantaine de parcs éoliens offshore d’ici 2050

« L’EPR de Flamanville va ouvrir un grand nouveau chapitre, celui de l’EPR2 », estime Nicolas Goldberg. Censé être « plus simple à construire », bénéficiant d’un effet série (construction par paires) et d’une préfabrication ou d’une modularisation en usine, selon EDF, l’EPR 2 donnera lieu à la construction de six EPR 2 par paires. « Ce projet bénéficiera de l’apport de Flamanville retour d’expérience : plutôt lancer une série, construire les réacteurs par paires, avoir réalisé les études de conception avant de démarrer le chantier, mettre sur place une équipe de maîtrise d’œuvre, fédérer toute une école de compétences. C’est le nouveau chapitre qui s’ouvre.

L’Autorité de sûreté nucléaire autorise la mise en service du réacteur EDF de Flamanville

Nicolas Faucon

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