pourquoi Ismaël Boudjekada, condamné pour apologie du terrorisme, est-il toujours élu à la République ?
Conseiller municipal d’opposition au Grand-Charmont dans le Doubs, Ismaël Boudjekada, 29 ans, vient de faire l’objet d’une nouvelle dénonciation devant la justice pour apologie du terrorisme. Au sein de l’équipe municipale, on ne cache pas que cette situation est « douloureuse » à vivre.
Grand-Charmont, à quelques kilomètres de Montbéliard et des usines Stellantis de Sochaux. Cette commune de 5 800 habitants fait régulièrement parler d’elle. Dans la section Justice. Et ça aurait été bien sans ça.
Quand on parle du Grand Charmont, c’est lié à des actes de vandalisme dans une école détruite, et là, pour un élu accusé d’apologie du terrorisme. Laissons tranquille cette ville, elle ne demandait rien, surtout de ne pas être associée à ce type d’événement. Nous avons des dossiers à compléter qui sont bien plus importants
Aurélie Dzierzynski, maire du Grand-Charmont, Doubs depuis septembre 2024
Elu aux élections municipales du Grand-Charmont en 2020 dans la liste Union citoyenne de gauche et écologistes (opposition), Ismaël Boudjekada est une amère charge pour la majorité municipale.
Car, engagé dans la défense de la cause palestinienne, le conseiller municipal d’opposition a été condamné en juin 2024 pour apologie du terrorisme par le tribunal judiciaire de Nanterre. Deux jours après les attentats sanglants du 7 octobre 2023 en Israël (plus de 1.200 morts), l’élu du Doubs a qualifié le Hamas, organisation basée à Gaza et reconnue terroriste par l’Europe, de « mouvement de résistance ».
Il a récidivé mi-octobre en appelant « héros » Le chef du Hamas Yahya Sinouar, tué par des soldats israéliens le 16 octobre dans la bande de Gaza. L’homme est considéré comme le cerveau de l’attentat contre Israël du 7 octobre 2023. Le député du Doubs, Mathieu Bloch (LR-RN), porte à nouveau une action en justice sur le fondement de l’article 40 visant cet élu de gauche, selon lui.
COMMUNIQUÉ DE PRESSE
Suite à des messages sur le compte X de Monsieur Ismaël Boudjekada, j’ai décidé de saisir le Procureur de la République de Montbéliard, en vertu de l’article 40 du code de procédure pénale.
Mon devoir de parlementaire m’oblige à signaler tout… pic.twitter.com/sVHOdb5LBK—Matthieu BLOCH (@MatthieuBloch) 19 octobre 2024
Jean-Paul Munnier, ancien maire du Grand-Charmont, ne mâche pas ses mots envers celui qui fut le plus jeune candidat à l’élection présidentielle de 2017. « Ismaël Boudjekada est un élu de l’opposition, nous avons dit à plusieurs reprises que nous ne soutenions pas ses propos » explique-t-il à France 3 Franche-Comté.
« Dès le début, c’était difficile avec M. Boudjekada. J’ai aussi dû utiliser l’article 40, il faisait des montages qui me présentaient comme un clown quand j’étais maire, il enregistrait des conseils municipaux à notre insu » se souvient le maire élu depuis 41 ans.
« Nous ne l’avons pas vu depuis un an ; on dit qu’il est en Egypte. Pour moi, il est en fuite » estime Jean-Paul Munnier qui dit avoir été régulièrement contacté par téléphone par des personnes à qui Ismaël Boudjekada aurait emprunté de l’argent. « Boudjekada est quelqu’un qui s’épanouit dans les conflits, il faut être serein » dit-il.
Certes, c’est un élu de la République. Nous exigeons que les tribunaux se prononcent rapidement à ce sujet.
Aurélie Dzierzynski, maire du Grand-Charmont, Doubs
Ismaël Boudjekada, élu de la République, répand régulièrement sa haine des juifs sur les réseaux sociaux. « Cafards sionistes »non-condamnation du 7 octobre… mais aussi des propos homophobes : il avait estimé, alors qu’il était candidat aux élections législatives de 2024 dans une circonscription de Français de l’étranger, que l’homosexualité « n’est pas dans l’ordre naturel des choses ».
Au sein de son groupe d’opposition municipale, l’homme est-il aussi un « caillou dans le chaussure » ? «Le groupe d’opposition ne souhaite pas faire de commentaires sur cette question. Cela concerne personnellement M. Ismaël Boudjekada. Nous nous abstenons de prendre position. » réagit un élu contacté par France 3 Franche-Comté.
Ismaël Boudjekada a été condamné en juin 2024 pour apologie du terrorisme, à 20 000 euros d’amende et trois ans d’inéligibilité, mais il a fait appel. Sa peine est donc suspendue. Il est toujours officiellement conseiller municipal dans cette commune du Doubs où il ne perçoit aucune indemnité. S’il est déclaré inéligible, le préfet suspendra son mandat par arrêté.
Ismaël Boudjekada ne réside plus au Grand-Charmont depuis un an, mais est domicilié en région parisienne, a également annoncé le procureur de la République de Montbéliard Paul-Edouard Lallois. Le parquet de Nanterre sera donc compétent pour juger une nouvelle fois l’élu pour apologie du terrorisme.
Le procureur de Montbéliard a également prévenu la préfecture du Doubs que M. Boudjekada « qui profite d’un mandat au sein d’une commune, n’y réside plus depuis des mois ».
Contacté par France 3, Ismaël Boudjekada explique qu’il n’a pas pu participer aux conseils municipaux du Grand Charmont depuis plusieurs mois, car il était en Algérie pour faire la tournée médiatique. Il explique qu’il se trouve actuellement en Egypte pour rejoindre Rafah dans la bande de Gaza où au moins 42 718 Palestiniens, principalement des civils, ont été tués lors de l’offensive israélienne menée en représailles à Gaza.
Il assure néanmoins gérer les affaires courantes de sa commune de Franche-Comté où, selon lui, il aurait «un des taux de présence les plus élevés au conseil municipal». « Je serai condamné, c’est une certitude en appel (pour l’apologie du terrorisme, ndlr)Je porterai l’affaire devant la Cour européenne des droits de l’homme. » il prévient, car « sanctions disproportionnées ».
Ismaël Boudjekada dit vouloir aller au bout de son mandat de conseil municipal de Grand-Charmont, jusqu’en 2026. Et même devenir maire si des élections partielles ont lieu dans les prochains mois.