Pourquoi était-il possible d’extraire des dents saines dans l’ancien Taïwan ?

« Les premières communautés agricoles de Taïwan pratiquaient un marqueur bioculturel distinctif de leur identité sous la forme d’extraction délibérée des dents de devant. »C’est ce qu’expliquent des chercheurs de l’Université nationale australienne et de l’Université de Guam dans une étude qui paraîtra dans le numéro de décembre 2024 de la revue Archaeological Research in Asia.

Une pratique qui s’est développée sur « près de cinq millénaires »

Bien que la pratique de l’extraction des dents ait été documentée ailleurs dans le monde, elle est souvent associée aux premières communautés austronésiennes, notamment aux populations de Taïwan, d’Asie du Sud-Est et de Polynésie, rapporte Live Science.

Selon l’étude, les premières traces de cette pratique dans la région remontent à environ 4 800 ans, pendant la période néolithique, et les plus récentes au tout début du XXe siècle. Les chercheurs, Yue Zhang, Hsiao-chun Hung, Mike T. Carson, expliquent dans leur étude : « « Grâce à une exploration approfondie des preuves archéologiques et ethnographiques, notre étude met en évidence comment cette pratique s’est développée à Taiwan sur près de cinq millénaires et établit davantage son rôle par rapport aux questions d’identité de groupe. »

Le rituel consistait à extraire des dents saines, notamment des incisives et des canines, sans anesthésie. De la cendre était ensuite placée dans les cavités des dents extraites pour limiter les saignements et l’inflammation, rapporte Live Science.

Pour arriver à ces conclusions, les chercheurs ont étudié les données de 250 sites archéologiques en Asie et ont découvert que 47 d’entre eux contenaient des sépultures – dont les plus anciennes remontaient au Néolithique – dans lesquelles les défunts (hommes, femmes et parfois enfants) avaient des dents manquantes.

Une pratique considérée comme un « test de courage »

En s’appuyant sur des exemples donnés dans la littérature historique et des documents plus modernes, les chercheurs suggèrent que la raison principale de cette procédure serait « esthétique ». « La première motivation, et la plus fréquemment mentionnée, était l’embellissement, né du désir de se distinguer des traits du visage des animaux, ainsi que d’améliorer son attractivité, en particulier pour le sexe opposé. » expliquent les chercheurs.

L’extraction dentaire était également considérée à l’époque, selon l’étude, comme une « épreuve de courage » : « Dans de nombreux cas, le résultat visible a été perçu comme une preuve de courage ou une mesure de maturité. »

En étudiant les documents ethnologiques de Bornéo et les descriptions historiques du sud-ouest de la Chine, les chercheurs suggèrent également qu’une troisième explication est que cette procédure est une forme de prévention d’autres troubles, y compris la prévention liée aux symptômes du tétanos : « Bien que les cas de tétanos soient rares, les soins préventifs apportés par l’extraction des dents ont surpassé les perspectives mortelles », expliquent les chercheurs.

Ces « Les résultats pourraient élargir notre compréhension des pratiques culturelles, des processus de formation de l’identité et des voies de migration des anciennes populations austronésiennes dans la région Asie-Pacifique » ils concluent.