Pourquoi Emmanuel Macron et le gouvernement continuent-ils à utiliser les smartphones, malgré les risques d’espionnage ?
Y a-t-il une faille dans la sécurité du président de la République ? Le 17 avril, une plainte de l’Elysée contre Marc Doyer a été classée sans suite. La présidence s’est inquiétée du contenu d’un message que ce militant opposé au vaccin anti-Covid de Pfizer avait laissé sur le répondeur d’un des téléphones d’Emmanuel Macron.
Marc Doyer a obtenu ce numéro en 2017, alors qu’il faisait campagne pour la campagne de celui qui allait devenir président de la République. Comment se fait-il que cette ligne soit toujours active, alors qu’Emmanuel Macron est entre temps devenu chef de l’Etat ? Une situation d’autant plus surprenante que le président de la République est la cible d’espionnage de puissances étrangères. En 2021, Le monde avait révélé que le chef de l’Etat était une cible potentielle du logiciel Pegasus, ainsi que le premier ministre et quatorze ministres.
Discussions confidentielles sur Osiris
Emmanuel Macron n’est pas le seul dirigeant à faire circuler un numéro : celui de Boris Johnson était disponible en ligne lorsqu’il était Premier ministre du Royaume-Uni. Comment, dans ce cas, limiter le risque que de grandes oreilles interceptent des échanges confidentiels ? Lors des réunions les plus sensibles, Conseil des ministres ou Conseil de défense, les smartphones et autres objets connectés restent à la porte pour tous les participants.
Lorsque les ministres ne peuvent pas se voir physiquement, ils discutent des sujets les plus confidentiels via les téléphones Osiris, dotés d’un haut niveau de sécurité. Cet appareil, qui n’est pas portable, ressemble à un téléphone de bureau.
Un téléphone sécurisé mais lent
Le président dispose, comme certains ministres, d’un téléphone mobile sécurisé, mais qui ne ressemble pas à l’Android ou à l’Apple d’un citoyen lambda : cet appareil ne dispose pas de boutique d’applications et ne fonctionne qu’avec des numéros d’autres terminaux connectés au même réseau, indique à 20 minutes une source proche du dossier. Mais là encore, pas question d’aborder des sujets classés secret défense.
Ce téléphone présente l’inconvénient d’être plus lent et moins ergonomique qu’un smartphone grand public, ce qui conduit les membres du gouvernement et le président à continuer d’utiliser leur téléphone portable personnel. Par ailleurs, « un ministre est quelqu’un qui peut être élu, qui est appelé par les journalistes, les parlementaires, par le monde entier », note la même source. Ces personnes n’auront aucun moyen d’accéder au réseau protégé de l’État. Difficile dans ces conditions de priver les ministres de leur iPhone ou de leur Samsung.
« Si c’est secret, ce n’est pas au téléphone »
La solution passerait-elle par des applications chiffrées ? Depuis décembre, il est demandé aux ministres et membres de cabinets d’arrêter Telegram ou WhatsApp et d’utiliser Olvid, une application française qui, selon ses créateurs, garantit un haut niveau de cybersécurité.
Une solution qui constitue une première ligne de défense contre les menaces, mais qui ne protège pas contre toutes les attaques, comme celles de type Pegasus. La défense la plus sûre « est que si c’est secret, ce n’est pas par téléphone », ajoute cette même source. Il n’y a pas que les échanges qui sont sensibles sur un smartphone grand public : d’autres données, comme la géolocalisation, peuvent être exploitées par des acteurs malveillants. Un risque supplémentaire avec lequel les services de sécurité de l’État doivent composer.