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« Pour se débrouiller sur un ring, il faut avoir quelque chose à crier, à revendiquer »

Fort de sa formation d’éducateur, Arthur Thomas-Pavlowsky a tenté de lier son métier à ses engagements. Investi dans la nuit à Grenoble, il a aussi été bénévole puis éducateur dans la jungle de Calais. Avant de raccrocher les gants. C’est paradoxalement à partir de là qu’il découvre les rings de boxe, au sein du collectif de boxeurs marseillais, Boxe Massillia. Séduit par l’ambiance conviviale, la revendication d’une boxe prolétarienne et l’interdépendance du sport et de la lutte sociale, il signe un documentaire passionnant qui rompt avec les codes des films sur l’art du pugilisme. Pas de héros ou d’héroïne, en quête de rédemption comme dans rocheux Et Bébé à un million de dollars ou reconquérir un titre tel Quand nous étions rois. Mais des syndicalistes, des militants queer, beaucoup de femmes aussi qui se forment à la symbolique bourse du travail de Marseille.

Comment avez-vous lié le portrait d’un groupe mais aussi l’histoire d’un lieu, le marché du travail ?

Lorsque j’ai rencontré le collectif pour la première fois, la bourse du travail ne faisait pas partie du projet. Mais avec la crise sanitaire, il est devenu compliqué pour le collectif de boxe de trouver un lieu pour s’entraîner. Un lien a été créé avec le comité chômeurs et précaires de la CGT 13, qui leur a offert la possibilité d’utiliser la bourse du travail Benoit Frachon à Marseille tous les vendredis soirs. Le collectif de boxe a investi les lieux. La bourse du travail est très emblématique de la représentation d’une place dans l’histoire des syndicats et des travailleurs. Il est imposant, fait de pierre. Les gravures représentent le travail. Les références très imposantes, presque saisissantes sont en même temps très mélancoliques. Les chambres s’appellent Salvador Allende, Jean Jaurès. Il en émane du pouvoir et quelque chose de l’ordre du passé, quelque peu révélateur de l’état de la lutte syndicale. Le collectif de boxe vient apporter espoir et nouveauté par sa présence dans ces lieux et ce lien créé avec le comité chômeurs et précaires.

Vous intégrez aussi des formes de luttes et de revendications plus contemporaines….

Le collectif de boxe a apporté cet espoir, cette contemporanéité et des enjeux de luttes qui bougent. L’idée est de se battre pour soutenir une lutte syndicale. Lors du gala, le lien se dessine. Filmer ce moment a été un aboutissement. Le collectif de boxe est venu monter un imposant ring métallique fait maison. Le changement de lieu a eu lieu la veille du gala. Au fur et à mesure que le gala de boxe se déroule, tout se confond. C’est le clou du spectacle. L’entourage des boxeurs est venu de toute la France. Ce sont des gens du monde du sport, pas forcément politisés. Parallèlement, des syndicalistes sont également présents car ils ont entendu parler de cet événement. Il y a aussi des personnes issues du milieu queer, puisque le collectif a toujours eu l’ambition de promouvoir la pratique du sport auprès de personnes qui en ont été assez éloignées à la base, à savoir les femmes et les minorités de genre. De nombreuses personnes issues du milieu queer appartiennent à ce collectif de boxeurs, ce qui crée un mélange assez atypique avec les milieux politiques de gauche et d’extrême gauche. D’après mon expérience, c’est assez rare. Les milieux syndical, anarchiste et queer ont paradoxalement du mal à se rencontrer malgré leurs points communs. Ce sont même souvent des environnements qui s’affrontent. Grâce à la rencontre sportive et à la pratique de la boxe, les gens se rassemblent pour ce gala. Il vient incarner tout l’espoir mis dans ce film et dans ce que ce collectif de boxe met en place.

Que signifie ce terme de boxe prolétarienne ?

Leurs T-shirts lors du gala sont floqués « Pour la boxe prolétarienne ». C’est un terme qu’ils assument et revendiquent. Tout un pan du monde de la boxe est un monde d’argent, surtout avec ce business mis en scène dans des combats professionnels. Les membres du collectif veulent se réapproprier ce sport, ce sport emblématique des pauvres. En quelque sorte, ils en ont été dépossédés. Ils se le réapproprient en allant le pratiquer dans un lieu bien à eux, en ayant une pratique accessible financièrement. Tout est politique puisque la boxe enseignée est la boxe cubaine, la danse, l’esquive, peu offensive ou virile comme la boxe américaine. L’idée est de ne pas être touché pour pouvoir toucher l’autre. C’est une boxe avec une esthétique très propre et très particulière.

De nombreux champions ont trouvé dans la boxe un sport qui leur a permis de s’en sortir. Dans le collectif, « s’en sortir » prend une autre approche où la lutte sociale est mise en avant…

C’est l’aboutissement de leur collectif. Ils l’assument et le revendiquent. On dit que la boxe est un sport pour les pauvres, les pauvres. Pour se débrouiller dans un ring, il faut avoir quelque chose à crier ou à revendiquer. Cela peut paraître caricatural mais c’est tellement vrai par rapport à leur collectif. Ce n’est pas seulement une revanche individuelle sur la vie. Ils veulent sortir ensemble. Et ils le portent. Le collectif et l’individu sont très respectés dans leur groupe. Tout l’enjeu du film est de réussir à rendre compte de la manière dont les luttes individuelles et collectives se nourrissent de ces pratiques. Les individus ne disparaissent pas au profit du collectif et inversement. Il est assez rare et très difficile de réussir dans les collectifs politiques. C’est une sorte de cercle vertueux très fort. D’où l’idée d’appeler le film «la lutte est une fin » comme une analyse de toutes les strates de la lutte où l’intime rejoint le collectif, le besoin de se réapproprier son corps et de s’affirmer dans l’espace public.


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Cammile Bussière

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