Pour sa Switch 2, Nintendo doit proposer un vrai « Seal of Quality » pour son eShop, il y a urgence !

Avec la démocratisation des Stores en ligne sur nos consoles et l’acceptation de l’auto-édition par Sony, Microsoft et Nintendo, les développeurs indépendants ont désormais un boulevard pour publier toutes leurs créations. Cependant, cela engendre parfois de la tôle froissée chez les joueurs et les créateurs. Serait-il temps de rendre le système moins perméable aux dérives ?

Sommaire

  • Numéro d’équilibriste
  • Faux-semblant sur la qualité
  • Assurance quantité
  • Royaume champignon vénéneux
  • Policy partout, justice nulle part ?
  • Hop, un nouvel eShop !

Numéro d’équilibriste

Au début des années 1980, quand Nintendo sort sa Famicom (NES) au Japon, l’industrie du jeu vidéo est bien différente de celle que l’on connaît actuellement. La société américaine Atari détient 80 % de parts de marché tandis que les géants du jouet, tels que Mattel et Coleco, font tout ce qui est en leur pouvoir pour inverser la tendance. Ni SEGA, ni Sony, ni Microsoft n’ont encore sorti de machines reliées aux écrans cathodiques. Alors que les cartouches de jeux se multiplient dans les boutiques et que tout laisse à penser que le gaming va s’envoler, c’est l’ombre menaçante du Game Over qui plane. En 1983, la dynamique dont profitait l’industrie naissante du jeu vidéo s’arrête. Les ventes de softs et de consoles s’écroulent, tandis que les studios ferment. Pourquoi ? Tout simplement parce que le marché est inondé de mauvais jeux et de clones copiant des recettes à succès. Outre-Atlantique, le grand public en a marre et débranche les consoles.

Pendant que cette crise du jeu vidéo fait des ravages principalement aux Etats-Unis, Nintendo est face à un dilemme. Certes, laisser tous les développeurs confectionner des jeux pour un hardware peut engendrer une pléthore de softs affligeants, voire d’attrape-nigauds, mais une pénurie d’expériences inédites peut également être fatale à la Famicom. Conscient qu’il ne pourra pas abreuver à lui seul les acheteurs de son système avec ses productions maison, le groupe japonais accepte – non sans hésitation – que d’autres entreprises publient des jeux sur sa console. En 1984, Hudson, Namco, Konami, Jaleco, Capcom et Taito deviennent officiellement des éditeurs tiers via un contrat plutôt avantageux pour Nintendo. En effet, les papas de Super Mario Bros. reçoivent des royalties sur chaque soft vendu. Rapidement, tout le monde trouve son compte. L’entreprise derrière la Famicom gagne des milliards de yens grâce au pourcentage gagné sur chaque vente, et les éditeurs profitent du succès de la machine pour distribuer des millions de cartouches.


Faux-semblant sur la qualité

Cette relation gagnant-gagnant est un chamboulement dans une industrie du jeu vidéo encore à ses balbutiements. Petit à petit, elle se développe avec l’arrivée de nouveaux partenaires triés sur le volet, Nintendo ne souhaitant pas reproduire les mêmes erreurs que celles commises par Atari. Les lignes des contrats se complexifient également. Les géniteurs de Mario s’octroient le droit de produire les cartouches des tiers, fixent un maximum de jeux à sortir en une année que les studios ne peuvent dépasser et imposent un droit de regard sur le contenu. Cependant, contrairement aux idées reçues, Nintendo n’empêche pas les “mauvais” jeux de sortir. Le constructeur s’assure avant tout que les titres ne comportent ni gros bugs, ni contenu pouvant choquer les enfants à cause d’éléments violents ou sexuels.

Le célèbre “Seal of Quality” de Nintendo n’apparaît qu’en 1988 aux Etats-Unis, soit trois ans après la sortie de la machine outre-Atlantique. “Ce sceau est l’assurance que Nintendo a approuvé et garanti la qualité de ce produit”, lit-on sur les boîtes des jeux. Ce tampon qui fait beaucoup parler de lui tient plus d’une brillante idée marketing que d’une quelconque assurance d’un produit véritablement réussi. La crise du jeu vidéo de 1983/1984 ayant avant tout touché les Etats-Unis, Nintendo of America décide d’imprimer sur toutes les jaquettes ce message promettant que le produit a été testé et filtré. Le mot “qualité” a fait croire à de nombreux joueurs que la firme de Kyoto avait évalué positivement le contenu du jeu, alors qu’il signifiait tout simplement qu’il était capable de fonctionner sur une NES sans détériorer cette dernière.


Assurance quantité

Que ce soit sur NES, SNES ou même Nintendo 64, le Seal of Quality n’a donc jamais assuré la qualité intrinsèque d’un jeu. Au cours des années 2000, il disparaît au profit d’un simple “official Nintendo Seal”, sûrement plus en accord avec ce qu’il est vraiment, à savoir la promesse que le produit a respecté diverses normes pour sortir officiellement sur une plate-forme Nintendo. Aujourd’hui, cependant, l’industrie est bien différente de celle des années 1980. Le marché s’est élargi et les barrières à l’entrée sont réduites. Tous les constructeurs encore en lice – Nintendo, Sony, Microsoft – ont dû céder à l’appel de l’auto-publication.

Être un gardien procédant scrupuleusement au tri de ce qui peut sortir ou non sur sa console pourrait pousser certains développeurs, éditeurs et joueurs à aller voir ailleurs. L’absence d’auto-publication sur Xbox 360 a d’ailleurs tendu les échanges entre Microsoft et les indépendants, obligeant le constructeur américain à revoir sa politique avec la Xbox One, en 2013. Dix ans plus tard, les valves sont grandes ouvertes et presque n’importe qui peut sortir n’importe quoi sur PC, Switch, PlayStation 5 et Xbox Series. Si cela s’avère positif en théorie, les joueurs comme les développeurs constatent que les rouages ne tournent plus très bien.


Royaume champignon vénéneux

Il suffit d’allumer une Switch et d’aller faire un tour sur l’eShop, section “sorties récentes”, pour constater la pagaille. Le Store regorge de jeux à l’intérêt plus que discutable et de “clones” low-cost de softs à succès. “Deep Space” pour Dead Space, “Body Cam Shooter” pour Bodycam, “Zombie Garden vs Plants Defence” pour Plants vs Zombies, “Unpacking Deluxe Edition” pour Unpacking… il est parfois compliqué de faire la différence entre le vrai jeu et la mauvaise copie. Encore récemment, un certain Wukong Sun : Black Legend est apparu, histoire de surfer, comme on peut l’imaginer, sur la bonne réputation de Black Myth Wukong. Le titre, l’illustration… tout fait penser au soft développé par Game Science. Quant à “The Last Hope”, la copie ratée de The Last of Us, il a été retiré de l’eShop après la grogne intervenue sur le Net.

Bien sûr, un nombre conséquent de jeux proposés sont codés sommairement et possèdent des graphismes générés par IA. Du côté des joueurs, les moins renseignés peuvent se faire avoir facilement. En ce qui concerne les développeurs indépendants, la saturation provoquée par des productions qui ne sont parfois que des scams empêchent toute mise en avant de leurs créations. C’est d’une banalité confondante : plus il y a de mauvais jeux visibles, moins il y a de visibilité pour les bons jeux.


Policy partout, justice nulle part ?

Au moment où nous écrivons ces lignes, tout ce que demande Nintendo pour publier une création sur l’eShop est de s’assurer que le jeu soit “conforme aux normes et politiques établies par Nintendo, notamment en ce qui concerne “le contenu approprié”, “les performances techniques et l’expérience utilisateur”. “Une fois votre jeu développé, vous devrez le soumettre à Nintendo pour une évaluation approfondie. Cette étape vise à garantir que le jeu respecte toutes les exigences techniques et qualitatives de la plateforme”, lit-on.

Voir Nintendo Switch OLED sur Amazon

Les constructeurs jurent faire leur possible afin que les utilisateurs puissent tomber sur le jeu de leur rêve en se baladant sur les Stores. Il y a évidemment des rubriques dédiées, des mises en avant diverses censées écrémer la sélection. Sans que cela ne convienne à tout le monde. Faudrait-il que nos géants soient plus regardants sur ce qu’ils autorisent à mettre dans leurs boutiques virtuelles ? Nous serions tentés de répondre par l’affirmative, mais cela voudrait dire que, premièrement, un indé qui passerait du temps à créer un soft pourrait se le faire arbitrairement refuser et que, deuxièmement, cette régulation à la tête du projet pourrait effrayer bon nombre de développeurs, et donc causer hypothétiquement du tort à Nintendo.


Hop, un nouvel eShop !

Alors, que faire ? Chez NintendoLife, plusieurs spécialistes ont fait part de leur mécontentement envers l’eShop. Dan Muir de Hound Picked Games déplore que la visibilité des titres s’estompe trop rapidement. Kate Gray (Moonstone Island, Dimensional Double-Shift) regrette que les barrières à l’entrée soient si faibles que “de mauvais acteurs peuvent également créer des jeux” et que sur l’eShop, “il y a beaucoup de déchets”. “Nintendo n’a pas l’air de vouloir s’en occuper”, explique-t-elle, en ajoutant que même si d’autres plateformes ont ce problème, le constructeur japonais pourrait au moins vérifier les contenus générés par IA et les clones de jeux. “La vérification de Nintendo ne sert qu’à checker si les jeux fonctionnent, et j’imagine que les studios qui produisent la plupart de ces jeux connaissent les failles”, dit-elle. Un autre développeur, préférant rester anonyme, répète que les pages des librairies sont remplies de “camelotes”, ce qui donne envie d’arrêter toutes les recherches après seulement quelques minutes.

Tous s’accordent à dire que pour la Switch 2, Nintendo doit absolument repenser son eShop, de la manière dont les jeux sont catégorisés jusqu’à la façon dont ils sont mis en avant. Joshua Van Kuilenburg, de HomeBearStudio, précise que Nintendo doit trouver un moyen pour que “les consommateurs n’aient pas à se frayer un chemin à travers des pages de shovelware à faible effort pour trouver un jeu”. “Idéalement, de tels jeux ne devraient même plus exister sur l’eShop”, ajoute-t-il. Dan Muir de Hound Picked Games conclut : “Nintendo a désespérément besoin de contrôler les clones de divers jeux. Les développeurs et les éditeurs s’inquiètent de voir leurs softs clonés/thématisés/apparentés sans autorisation”. Il ne reste plus qu’à voir ce que les papas de Mario feront avec leur prochaine console, en espérant que des solutions soient trouvées pour faire de l’eShop un lieu plus fréquentable.

A propos de la Nintendo Switch

Cette page contient des liens affiliés vers certains produits que JV a sélectionnés pour vous. Chaque achat que vous faites en cliquant sur un de ces liens ne vous coûtera pas plus cher, mais l’e-commerçant nous reversera une commission.
Les prix indiqués dans l’article sont ceux proposés par les sites marchands au moment de la publication de l’article et ces prix sont susceptibles de varier à la seule discrétion du site marchand sans que JV n’en soit informé.
En savoir plus.

Jewel Beaujolie

I am a fashion designer in the past and I currently write in the fields of fashion, cosmetics, body care and women in general. I am interested in family matters and everything related to maternal, child and family health.

Share
Published by
Jewel Beaujolie

Recent Posts

Le TFC porte plainte contre l’OL et dénonce une arnaque concernant Thiago Almada

Auteur d'une autre prestation insipide, samedi soir, face à Toulouse, l'OL peut-il aussi perdre le…

1 minute ago

qu’est-ce qu’une grâce préventive, accordée par Joe Biden à certaines cibles de Donald Trump ?

Alors qu'il s'apprête à céder le pouvoir à Donald Trump, le président démocrate a accordé…

4 minutes ago

Le gouvernement remet sur la table les 7 heures de travail non rémunérées par an

Après avoir suscité la polémique, sera-t-il enfin mis en œuvre ? La proposition d'instaurer 7…

5 minutes ago

Une faille de sécurité critique affecte les systèmes Windows, une alerte appelle à une action rapide sur ces produits

Cybermalveillance.gouv.fr a publié ce lundi une CyberAlert mettant en avant une faille critique dans de…

7 minutes ago

« On se retrouve bientôt » : Temporairement absent, Bertrand Chameroy remplacé dans « C à vous » sur France 5

Par Raphaël Gioia | Journaliste Du goûter devant le Club Dorothée aux soirées pizza/Koh-Lanta, il…

8 minutes ago

Mercato : Toulouse conteste l’arrivée d’Almada à Lyon

Thiago Almada, dans la formation de l'OL (crédit : David Hernandez) Recruté en prêt gratuit…

12 minutes ago