Pour réduire les déficits et les inégalités, Oxfam veut taxer les « super-héritages »
Selon l’ONG, 0,1% des héritiers reçoivent en moyenne 13 millions d’euros, soit 180 fois l’héritage médian, mais ne paient que 10% de droits de succession contre un taux marginal de 45% en principe.
Face à des déficits croissants et à des inégalités qui se creusent, la France doit taxer davantage « super-héritages »exhorte l’ONG Oxfam, qui dénonce dans un rapport des échappatoires fiscales et des exonérations excessives. « Il y a un casse-tête budgétaire et le seul sujet qui est mis en avant est «Quelles économies»» « Cela ne peut pas être atteint », a déclaré la directrice générale d’Oxfam France, Cécile Duflot, lors d’une conférence de presse présentant le rapport, publié mardi. Il serait toutefois possible de trouver des recettes supplémentaires en augmentant la taxation des plus grosses successions, selon l’ONG, selon laquelle les riches échappent largement à l’impôt sur les successions.
Selon le rapport réalisé par Layla Abdelké Yakoub, responsable de la justice fiscale et des inégalités d’Oxfam France, le débat sur l’héritage est d’autant plus vif que la France est à la veille de la « grande transmission de richesse »une période pendant laquelle la richesse accumulée par les « baby-boomers » sera transférée aux générations suivantes « ont accumulé 20 % de richesses en plus que les générations précédentes »Les « super-héritiers » français sont particulièrement dans le viseur de l’ONG : 0,1 % des héritiers reçoivent aujourd’hui environ 13 millions d’euros en moyenne, soit 180 fois l’héritage médian, mais ne paient que 10 % de droits de succession contre un taux marginal de 45 % en principe, affirme Oxfam, tandis que « Près de la moitié de la population hérite de peu ou de rien ».
Une perte de 160 milliards pour l’Etat
Par ailleurs, plus de 460 milliards d’euros pourraient être transférés dans les trente prochaines années par 25 milliardaires français aujourd’hui âgés de plus de 70 ans. S’ils ne sont taxés qu’à 10% là aussi, le manque à gagner pour l’Etat est estimé à 160 milliards d’euros, selon les calculs de l’ONG à partir des données du Conseil d’analyse économique (CAE). Parmi les niches fiscales et exonérations dont bénéficient les riches, le rapport cite le pacte Dutreil – qui permet les transmissions d’entreprises – et l’assurance-vie, qui représentent ensemble un manque à gagner de plusieurs milliards d’euros pour les finances publiques chaque année selon Oxfam, même si les données sont très parcellaires sur le coût réel du pacte Dutreil. Oxfam met aussi en avant les allègements fiscaux sur les donations entre parents et enfants ou entre grands-parents et petits-enfants qui permettent, selon elle, aux plus riches de léguer plusieurs centaines de milliers d’euros tous les quinze ans sans payer d’impôt.
Attendu cette semaine, le gouvernement du nouveau Premier ministre Michel Barnier devrait annoncer des économies dans le prochain budget, faute de quoi, prévient le Trésor dans une note datée de juillet, le déficit public s’aggravera par rapport aux prévisions alors que Paris est déjà épinglé par la Commission européenne pour déficit excessif. Celui-ci pourrait atteindre 5,6% du PIB cette année (contre 5,1% prévu) et 6,2% en 2025 (contre 4,1%). Un retour aux normes européennes en 2027 nécessiterait 110 milliards d’économies d’ici là.
Si vous êtes le fils de Bernard Arnault, vous paierez un pourcentage de droits de succession moins élevé que si votre tante ou votre marraine vous laissait 15 000 euros.
Cécile Duflot, directrice générale d’Oxfam France
Parmi ses propositions, Oxfam appelle à réformer les échappatoires fiscales et les exonérations jugées « inutile »de supprimer le cumul des allocations et d’imposer un barème d’impôt unique et progressif qui ne soit plus différencié selon les liens familiaux. « Si vous êtes le fils de Bernard Arnault, vous paierez un pourcentage de droits de succession moins élevé que si votre tante ou votre marraine vous laissait 15 000 euros. »a résumé Cécile Duflot lors de la présentation du rapport, illustrant les différents taux d’imposition en cas d’affiliation directe ou indirecte.
La fiscalité des successions revient régulièrement dans le débat français. Lors de la campagne présidentielle de 2022, Emmanuel Macron a proposé d’augmenter l’abattement fiscal sur les successions en ligne directe de 100 000 à 150 000 euros, sans mettre en œuvre cette réforme par la suite, et son adversaire Jean-Luc Mélenchon a proposé d’instaurer un plafond de 12 millions d’euros pour les successions. Les propositions d’Oxfam interviennent alors que les pays développés du G20 discutent d’une possible augmentation de l’impôt sur les successions cette année. « super-riche » dont les actifs ont considérablement augmenté ces dernières années grâce à l’explosion des cours boursiers.
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