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« Pour moi, c’est la corrida d’une vie », confie Hugo Lavigne, le président qui a accordé la grâce au taureau Delicado.

« Pour moi, c’est la corrida d’une vie », confie Hugo Lavigne, le président qui a accordé la grâce au taureau Delicado.

Un mot pour décrire la soirée de jeudi, du paseo à la sortie triomphale de Clemente et Miguel Ángel Perera ?

C’est la quatrième ou cinquième fois que je suis président à Dax. Cette année, j’ai aussi été président à Mont-de-Marsan et à Vic, mais quand je vais à Dax, c’est autre chose. Et ce qui s’est passé jeudi est extraordinaire. Je suis encore sur un nuage, on vient me féliciter, mais je n’y suis pour rien ! La commission taurine, Santiago Domecq, Clemente, c’est à eux qu’il faut dire merci ! Après, si je devais choisir un mot pour qualifier cette soirée dans son ensemble, pas seulement la gourmandise, ce serait : « étrange ».

Pourquoi ce sentiment d’étrangeté ?

Cela commence avec le premier taureau de Miguel Ángel Perera : on met la deuxième oreille, ce qui est rare sur un premier taureau. Ensuite, je refuse l’oreille à Marin, je trouve qu’il est passé complètement à côté d’un très grand taureau, même si c’est un torero que j’adore. Et puis il demande la musique alors qu’on vient de la faire, je n’ai pas compris. Plus tard, le sixième taureau arrive, la décision de le changer arrive trop tard. Et Delicado entre dans l’arène. Ce n’est pas le scénario attendu, et pourtant, à un moment, tout s’emboîte !

Pouvez-vous nous parler de ce taureau qui n’a pas été sélectionné par les toreros ?

En débarquant, j’ai tout de suite dit que je préférais ce taureau. Dès que j’ai vu ce « chorreado » (robe rayée de la colonne vertébrale au ventre, NDLR), j’ai trouvé ça incroyable. J’ai regretté qu’il ne soit pas choisi, mais l’éleveur Santiago Domecq, que j’ai rencontré la veille de la corrida, m’a dit : « Tu vas voir, ça va rentrer ! » J’ai revu l’éleveur en sortant des arènes, on s’est pris dans les bras, et il m’a dit que la chemise bleue qu’il portait ce soir-là pour la deuxième fois était la même qu’à Valence, la nuit où Roman a gracié Escondido. Et puis Delicado est trinqué au torero Julien Guillé, à qui Daniel Luque avait trinqué son toro Sardinero en 2022, gracié lui aussi !

Qu’avez-vous pensé au début de la faena de Clémente, et quand avez-vous pris votre décision de gracier le taureau ?

Dès la première série, il est allé directement à 15 mètres. Puis il y en a eu une deuxième, on s’est regardé avec les évaluateurs, puis une troisième… Il a été très mal battu pour le tercio de pique, mais sur tout le reste, il a été excellent.

Clément a compris le truc, il a fait la faena de sa vie. J’ai l’impression de traîner les pieds pour donner l’indulgence, alors qu’en fait, je l’ai donnée à 10 minutes, c’est très tôt ! ​​J’ai fait un signe « non » la première fois, et j’ai vu 1000 personnes se lever et râler. Qui suis-je pour leur dire non à ce moment-là ?

Vous avez alors été submergée par l’émotion. Pouvez-vous nous raconter ce moment ?

Il y a trois choses. D’abord, le fait de gracier un taureau ici, à Dax. Ensuite, ces trois dernières années, à part Luque, ces succès ont été trop rares. Et troisièmement, c’est très égoïste, mais j’ai pensé à ceux qui sont absents, mon grand-père, mon oncle Jacques, des proches qui nous ont quittés… A la présidence, on est déconnecté de tout ce qui se passe ailleurs que sur la piste, donc je n’ai pas cherché à cacher mon émotion. Honnêtement, pour moi, c’est la corrida d’une vie ! J’ai d’autres présidences à honorer, mais, j’en parlais hier avec mon père, j’ai presque envie d’arrêter après celle-là, pour ne pas être frustré.

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