Ils ont commencé leur journée de travail avec cette annonce difficile et inattendue : le magasin va fermer. LE 73 salariés du groupe Auchan à Woippy sont concernés par le vaste plan social annoncé par le groupe de distribution, qui touche 2 389 emplois dans toute la France.
« Nous avons été réunis par notre directeur, qui a commencé ses explications calmement, avant de s’effondrer pour nous dire que nous faisions partie du lot. Nous avons tous pleuré » témoigne Brigitte, qui travaille chez Woippy depuis 38 ans.
Embauché par l’ancienne marque Mammouth, c’est la perspective de la fin d’une vie professionnelle qui s’impose à elle bien plus tôt que prévu : « Je me suis dit : « Non, pas notre magasin ! Je suis ici depuis que j’ai 22 ans, vous imaginez. Cela me fait mal au cœur. Je pensais prendre ma retraite ici, il me restait deux ans et demi. J’ai pris un poste de cadre, trois jours par semaine, pour continuer à voir mes collègues. Et puis nous voilà là-dedans », dit-elle, sans savoir si elle pourra bénéficier d’une éventuelle retraite anticipée, à 59 ans.
«Le magasin existe depuis des années»
La marque ouvre maintenant une procédure de recherche d’un acheteur, qui pourrait durer jusqu’au printemps prochain, précise la communication du groupe. Celui-ci étudiera les possibilités de reclassement des salariés de Woippy dans d’autres magasins. Auchan aux alentours, sans pouvoir encore fournir de chiffres sur le nombre d’emplois concernés.
Si les salariés n’ignoraient pas les difficultés du groupe, ils n’envisageaient pas que leur hypermarché, présent depuis plus de 20 ans dans le quartier Saint-Eloy, qu’il ferme ses portes : « Je ne m’y attendais pas si vite. Non, en fait, je ne m’y attendais pas du tout. Je suis arrivée ici étant une jeune fille, j’en repars, je suis vieille. Je suis triste », Brigitte déclare sobrement.
«On abandonne les quartiers en difficulté»
Pour les clients qui déambulent dans le centre commercial ce mardi, la surprise est totale : « Je n’arrive pas à y croire. Cela fait 30 ans que je viens ici, tous les jours à la galerie acheter mon pain. Si Auchan disparaît, ça laissera un grand vide. Surtout dans la galerie où il y a du monde, tout le le monde se connaît »témoigne Sophie, une cliente incrédule.
Le magasin sert de une vraie entreprise locale pour de nombreux habitants : « Ça va me déranger beaucoup, j’habite à proximité et je ne peux compter que sur le bus. Je n’ai pas les moyens de voyager. » explique Karima, qui trimballe son cabas dans les allées depuis 23 ans.
Même colère pour Brigitte, une autre cliente : «Il n’y a rien d’autre à proximité même s’il y a beaucoup de maisons. Il faut arrêter de punir les citoyens, ils n’ont pas demandé à prendre leur voiture pour faire leurs courses. Ça va être la misère, on abandonne les quartiers en difficulté ! « , s’enthousiasme-t-elle.
«C’est la convivialité qui nous est enlevée»
Les commerçants craignent perdre une partie de leur clientèleet de voir ce lieu de passage se transformer en galerie fantôme »Il y a de tout ici : un coiffeur, une pharmacie, un téléphone taxi, une laverie… on peut imprimer, poster un courrier, faire ses courses… Il y a même un restaurant. Comment remplacer ça ? C’est là le problème : où aller ? » partage Mohammed, attablé dans l’un des cafés de la galerie.
Parmi les clients : de nombreux habitués, des actifs mais aussi de nombreux retraités : « C’est la convivialité qui nous est enlevée. Si nous n’avons plus d’endroit où nous réunir et boire du café, c’est une mort sociale.» commente Mohammed.
Dans un communiqué, le maire de Woippy, Cédric Gouth, annonce qu’il «je veillerai à aider d’autres marques à s’implanter » à la place d’Auchan et « sera attentif à ce que les salariés qui n’ont pas pu bénéficier d’une reconversion ou d’un plan de retraite anticipée puissent y retrouver du travail. »
Le syndicat Force ouvrière Moselle a quant à lui exprimé son refus d’accepter les licenciements et la fermeture du magasin de Woippy, et a déclaré qu’il «mènera le combat aux côtés des salariés.