L’extrême droite continue de se regrouper au Parlement européen. Après le Rassemblement national qui a rejoint le groupe Patriotes pour l’Europe, créé par le Premier ministre Viktor Orban, proche de la Russie de Vladimir Poutine, le parti Reconquête d’Eric Zemmour a rejoint le nouveau groupe créé par l’AFD, le parti d’extrême droite allemand.
Ce groupe baptisé « Europe des nations souveraines » est actuellement composé de 25 députés européens issus de 8 États membres différents. Le contingent le plus important est celui de l’AFD avec 14 députés allemands. Il comprend également d’autres partis d’extrême droite : trois députés du parti bulgare Wasraschdane et trois élus du parti polonais Konfederacja. Sarah Knafo sera la seule eurodéputée de Reconquête à siéger dans ce groupe, puisque Marion Maréchal, suivie de Guillaume Peltier, Nicolas Bay et Laurence Trochu ont quitté le parti d’Eric Zemmour juste après les élections européennes pour rejoindre le Rassemblement national.
« Cela signifie que le parti d’Eric Zemmour va s’asseoir aux côtés des identitaires les plus radicaux d’Europe, y compris des néonazis, explique le politologue et spécialiste de l’extrême droite Erwan Lecoeur. La ligne politique sera anti-islam et anti-immigrés et s’appuiera sur la théorie du Grand Remplacement qui se répand depuis plusieurs années, en France, mais aussi dans d’autres pays européens. »
L’AFD jugée injoignable par le RN
Le groupe « Europe des nations souveraines » sera présidé par René Aust, élu de l’AFD, parti qui fut, par le passé, allié au Rassemblement national, mais avec lequel Marine Le Pen a rompu politiquement lors de la campagne des élections européennes, certaines polémiques le rendant inapprochable pour le RN.
En janvier dernier, le média d’investigation allemand Correctiv révélait que des membres de l’AFD avaient participé à une réunion avec des néonazis autrichiens au sujet d’un projet de remigration vers l’Allemagne, c’est-à-dire l’expulsion d’étrangers mais aussi de citoyens allemands d’origine étrangère. Lors de la campagne européenne, le candidat tête de liste de l’AFD, Maximilian Krah, avait déclaré que « pendant la Seconde Guerre mondiale, un SS n’était pas automatiquement un criminel ». Autre affaire visant Maximilian Krah : ses collègues sont soupçonnés d’espionnage des institutions européennes, pour le compte de la Russie et de la Chine.
« Depuis un an, toutes ces affaires ont fait perdre des points à l’AFD dans l’opinion publique allemande, mais ce parti a quand même réussi à faire entrer 14 députés au Parlement européen », commente Erwan Lecoeur.
« Ce petit groupe répugnant va normaliser Marine Le Pen, Giorgia Meloni et Viktor Orban en Europe »
A l’extrême droite de l’hémicycle européen, le nouveau groupe « Europe des nations souveraines » rejoint deux formations plus larges : le groupe Patriotes pour l’Europe (84 députés), formé cette semaine autour d’une alliance entre le Hongrois prorusse Viktor Orban et le Rassemblement national, et le groupe Réformistes et Conservateurs européens (78 députés), issu de la droite radicale, emmené par la formation Fratelli d’Italia, le président du Conseil italien. (Lire notre article).
« Ce petit groupe répulsif autour de l’AFD va normaliser les groupes de Marine Le Pen, Giorgia Meloni et Viktor Orban, comme Eric Zemmour a normalisé Marine Le Pen à la présidentielle de 2022 », estime le politologue. Avec près de 190 députés sur 720, l’extrême droite, sortie renforcée des élections européennes, va peser sur le fonctionnement des institutions européennes. « Giorgia Meloni va essayer de chercher des positions au sein des institutions européennes, et sur certains textes, de nouvelles alliances pourront se former entre la droite et l’extrême droite. » Lors de la précédente mandature, les voix de l’extrême droite et de la droite du Parti populaire européen, premier groupe de l’hémicycle, s’étaient alliées pour affaiblir certaines dispositions du Green Deal.