« Où est le devoir d’exemplarité de l’État ? : les élus alertent sur les loyers impayés par la gendarmerie nationale
Nous avons vu des locataires se faire expulser pour bien moins que ça… »La gendarmerie nous doit 236 388 euros de retard de loyer« , fulmine Édith Pugnet, maire de Cabestany, commune proche de Perpignan qui accueille une brigade dans des locaux communaux. « Pour nous, ces loyers représentent une ligne de trésorerie vitale« , explique l’élue qui s’inquiète de ne pas pouvoir boucler son budget 2024.
« Réalisez-le ! Cette somme représente près de la moitié de notre allocation globale de fonctionnement. Cela signifierait par exemple qu’il faudrait tirer un trait sur l’ensemble de notre budget consacré aux espaces verts« , ajoute Cyrille Bernardin, premier adjoint chargé des finances. « La situation est d’autant plus grave et choquante que la gendarmerie est une fonction souveraine de l’Etat. Encore une fois, ce sont les collectivités locales qui paient le prix des erreurs de l’Etatalors qu’ils sont déjà étranglés par les coupes dans les financements« .
La commune de Cabestany est loin d’être un cas isolé. La majorité des communes en France héberger une gendarmerie dans des locaux communaux se trouve dans une situation comparable. Contactés par France Bleu Roussillon, de nombreux maires des Pyrénées-Orientales évoquent une situation « inacceptable« , « omniprésent » Et « désastreux en termes d’image : où est le devoir d’exemplarité de l’État ?«
Un trou de « 200 millions d’euros » dans les caisses de la gendarmerie
« J’ai été alerté par plusieurs collègues très inquietsconfirme Edmond Jorda, président de l’association des maires des Pyrénées-Orientales. Ces communes se sont endettées pour pouvoir construire des locaux de gendarmerie et les loyers leur permettent de payer les annuités des emprunts. Si l’État ne paie pas ce qu’il doit, ils se retrouvent en grande difficulté.« . Selon Edmond Jorda, l’association des maires de France (AMF) constate des hausses similaires dans toute la France.
Face à une inquiétude croissante, la sénatrice LR des Pyrénées-Orientales, Lauriane Josende, a contacté le ministère de l’Intérieur pour obtenir des explications. « On m’a en effet indiqué que la gendarmerie n’était plus en mesure de payer ses loyers sur tout le territoire. Dès son arrivée, la nouvelle équipe gouvernementale s’est rendu compte que la situation budgétaire était bien plus grave que prévu et queIl manquerait environ 200 millions d’euros aux fonds alloués à la gendarmerie pour l’année 2024. De plus, la loi actuelle ne permettrait pas au gouvernement de transférer des fonds d’un ministère à un autre. »
Selon les informations rapportées par le sénateur, une loi de finances rectificative est en préparation pour régulariser la situation. Mais jusqu’à ce qu’il soit voté d’ici la fin de l’année, les loyers ne pourront pas être payés. Ou goutte à goutte. L’État a demandé à ses services d’identifier les communes les plus en difficulté, pour les résoudre en priorité. « Dans les Pyrénées-Orientales, le commandant de gendarmerie doit procéder à un inventaire ce lundi »précise Lauriane Josende.
Pour l’instant, le ministère de l’Intérieur n’a pas répondu à nos demandes.