Orban pourrait inaugurer sa présidence de l’UE en se rendant à Moscou pour rencontrer Poutine
Jeudi 4 juillet, la nouvelle a fait l’effet d’une bombe dans les milieux diplomatiques : le Premier ministre hongrois Viktor Orban s’apprête à rendre visite à Vladimir Poutine à Moscou vendredi 5 juillet, quatre jours après le début de la présidence hongroise de l’UE.
L’information donnée par un journaliste d’investigation du groupe VSquare a été rapidement confirmée par plusieurs sources : le dirigeant hongrois, qui joue sur le registre de la provocation depuis des années, ferait escale à Moscou en route pour l’Azerbaïdjan, où il doit participer à une réunion des États turcs.
Cette rencontre avec le président russe intervient juste au début du semestre où la Hongrie doit coordonner le travail des Vingt-Sept au niveau de l’UE. Budapest avait déjà choisi un slogan en forme de camouflet pour sa présidence : « Make Europe great again ». Une référence explicite à la formule trumpienne « Make America great again » qui a donné naissance à l’acronyme « MAGA » par lequel est désignée la base électorale de l’ancien président américain.
Oppositions hongroises
L’UE vient d’adopter un quatorzième paquet de sanctions contre Moscou, avec pour objectif d’affaiblir la machine de guerre russe contre l’Ukraine. Mais Viktor Orban s’oppose depuis 2022 au soutien militaire des Vingt-Sept à Kiev. Budapest bloque ainsi le fonctionnement de la Facilité européenne pour la paix (EFF), un véhicule extrabudgétaire utilisé par les Vingt-Sept pour acheminer du matériel militaire vers l’Ukraine.
« Le fait que nous assumions la présidence tournante de l’UE ne nous fera pas changer de position », a déclaré jeudi le commissaire hongrois à la présidence tournante de l’UE, Zoltán Kovács, devant un groupe de journalistes européens. « Nous avons formulé des exigences claires à l’Ukraine concernant la mise sur liste noire des entreprises hongroises ou le respect des droits des minorités hongroises en Ukraine », a-t-il déclaré.
En juin, avant sa présidence, la Hongrie s’était montrée flexible sur certains dossiers (sanctions contre la Russie, ouverture des négociations d’adhésion de l’Ukraine et de la Moldavie à l’UE) mais pas sur l’EPF. Viktor Orban avait déjà choqué ses partenaires en octobre dernier en serrant la main de Vladimir Poutine lors d’un sommet à Pékin.
Manifestation à Bruxelles
Jeudi déjà, le président du Conseil européen, Charles Michel, et le Premier ministre polonais, Donald Tusk, ont exprimé leurs inquiétudes face aux informations qui fleurissaient sur les réseaux.
« La présidence tournante de l’UE n’a pas de mandat pour engager un dialogue avec la Russie au nom de l’UE », a écrit jeudi Charles Michel sur X. « La position du Conseil européen est claire : la Russie est l’agresseur, l’Ukraine est la victime. Aucune discussion ne peut avoir lieu sans l’Ukraine », a-t-il ajouté.
Si cette visite à Moscou se confirme, ce sera la première visite d’un dirigeant européen à Moscou depuis celle du chancelier autrichien Karl Nehammer en avril 2022. Depuis l’invasion de l’Ukraine, Viktor Orban n’a jamais rencontré le président russe dans son pays.
Nouvelle force parlementaire
Lors d’une visite à Kiev mardi dernier, Viktor Orban a appelé l’Ukraine à respecter un « cessez-le-feu », contrairement aux positions de l’UE et de Volodymyr Zelensky, qui lui a suggéré de s’aligner plutôt sur les efforts de paix ukrainiens.
Le champion hongrois de l' »illibéralisme » a également annoncé dimanche dernier la création d’un nouveau groupe politique au Parlement européen, baptisé « Patriotes pour l’Europe », qui pourrait devenir la troisième force de l’hémicycle strasbourgeois. A Bruxelles, la rumeur se répand que la plupart des partis du groupe ID rejoindraient cette nouvelle structure souverainiste d’extrême droite.
Rassemblement national
Le Rassemblement national et ses trente députés européens serait en effet sur le point d’adhérer, mais pas officiellement avant le second tour des législatives françaises du 8 juin. Si tel était le cas, le groupe centriste Renew des macronistes français serait relégué en cinquième position, derrière un autre groupe d’extrême droite, l’ECR, dominé par les Fratelli d’Italia du Premier ministre italien Giorgia Meloni.
Cela aurait un impact sur le financement des groupes. Les nouveaux « Patriotes » devraient cependant être isolés des prises de décision au Parlement en établissant un cordon sanitaire comme celui qui entourait le groupe ID lors de la précédente législature. Le Parlement européen tiendra sa plénière constitutive du 16 au 18 juillet.