on vous explique pourquoi les élus locaux souhaitent le retour de la taxe d’habitation
Plusieurs élus locaux regrettent la fin de cette taxe. Le camp présidentiel ne veut pas le restaurer, malgré des finances publiques en mauvais état.
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L’examen du projet de loi de finances (PLF) pour 2025 en séance publique à l’Assemblée nationale s’est ouvert, lundi 21 octobre, dans une ambiance pesante. Le déficit public devrait atteindre 6,1% du produit intérieur brut (PIB) en 2024, selon les prévisions, et le gouvernement compte réaliser 60 milliards d’économies pour l’année 2025. « Nous avons trop de dettes, trop de déficit »a résumé Antoine Armand, ministre de l’Économie, mardi 22 octobre sur TF1.
Face à cette situation budgétaire très dégradée, les élus locaux ont proposé ces dernières semaines de reconsidérer la fiscalité des collectivités locales, afin de disposer de davantage de leviers pour financer leurs investissements. Ainsi, plusieurs voix ont récemment dénoncé la suppression de la taxe d’habitation, l’un des totems de la politique fiscale portée par Emmanuel Macron depuis son accession à l’Elysée en 2017. Depuis janvier 2023, la taxe d’habitation sur la résidence principale est supprimée pour tous les Français. Parallèlement, il a été maintenu pour les résidences secondaires et les propriétaires continuent de payer une taxe foncière.
Mettre fin à cette taxe locale « C’était une mauvaise idée »a déclaré le maire de Meaux (Seine-et-Marne), Jean-François Copé, sur franceinfo, mardi. Pour l’élu, figure républicaine, la suppression de cette partie de la taxe d’habitation a provoqué une forme d’inégalité entre les contribuables : « Vous avez des locataires qui ne payaient que la taxe d’habitation, qui avaient des moyens et qui ne paient plus rien, et des propriétaires qui ont peu de moyens sur leur logement et qui continuent de payer la taxe foncière »il a dénoncé.
« On se retrouve avec plus de la moitié des habitants de la commune qui ne paient pas cet impôt de localité. (…) Aujourd’hui, tout le monde se satisfait des infrastructures locales, des gymnases, des stades, des écoles, mais tout cela a un coût et il est légitime de contribuer à ce coût.» a fait valoir auprès de France Bleu Provence Nicolas Isnard, maire LR de Salon-de-Provence (Bouches-du-Rhône).
« Je pense que la disparition de la taxe d’habitation était une erreur, voire une aberration. »
Nicolas Isnard, maire LR de Salon-de-Provenceà France Bleu Provence
Selon les calculs de l’Institut de politique publique réalisés en 2020, la suppression de la taxe d’habitation représente une perte annuelle de recettes fiscales. « 21,6 milliards d’euros pour les communes et intercommunalités ». Un manque à gagner important à comparer aux 16 milliards d’euros que des dépenses supplémentaires des collectivités locales pourraient coûter aux comptes publics cette année, selon l’ancien ministre de l’Économie, Bruno Le Maire. Le gouvernement a également demandé aux collectivités locales un effort de 5 milliards d’euros, concentrant la majorité des économies à réaliser sur 450 d’entre elles. UN « accusation » contre lequel s’insurge l’Association des maires de France (AMF).
Face à ces récriminations, le gouvernement refuse d’ouvrir la porte au retour de cet impôt local. Le rétablissement des comptes publics locaux ne doit pas « certainement pas » passer « par le retour de la taxe d’habitation, qui est encore une fois un gain de pouvoir d’achat pour nos concitoyens »» a martelé lundi soir sur France 2 Laurent Saint-Martin. Le ministre du Budget et des Comptes publics s’est dit déterminé à « préserver » ce « acquis ». « Il n’y a aucun projet de la part du ministre ou du gouvernement de créer un nouvel impôt local »a également balayé le cabinet de la ministre du Partenariat avec les territoires, Catherine Vautrin, pour La Tribune dimanche.
Aux yeux du camp présidentiel, remettre en cause cette mesure reviendrait à toucher au porte-monnaie français. « C’est 20 milliards d’euros de pouvoir d’achat que nous avons restitué à l’ensemble de nos concitoyens. Nous en sommes fiers, nous avons baissé les impôts dans ce pays”a souligné Laurent Saint-Martin sur France 2.
Parmi ceux qui critiquaient la décision du camp présidentiel de supprimer la taxe d’habitation, certains craignent désormais de semer la confusion parmi les contribuables si la taxe revenait sous une forme similaire. « Si vous commencez à modifier les décisions prises il y a deux ans et que la taxe foncière augmente, comment pouvez-vous croire la parole de l’État ?prévient Eric Woerth, membre d’Ensemble pour la République (ex-Renaissance) et ancien ministre du Budget, auprès de franceinfo. Selon un rapport de la Direction générale des finances publiques (DGFiP) publié en juillet 2022, cité par le journal Les Échosune forte augmentation des impôts locaux (taxe foncière et taxe sur les ordures ménagères) a suivi la suppression de la taxe d’habitation.
En revanche, la possibilité d’une refonte de la fiscalité locale n’est pas enterrée. « Là où les collectivités ont raison de s’interroger sur le sujet de la fiscalité, c’est quel levier fiscal on crée sur le territoire, le lien avec les citoyens, avec les entreprises »a concédé Laurent Saint-Martin. Lors de la dernière Commission des Finances Locales, début octobre, Catherine Vautrin « s’est montré ouvert au débat sur la fiscalité locale et estime que les collectivités doivent retrouver le pouvoir d’agir et une meilleure maîtrise de leurs revenus »selon les déclarations de son bureau à La Tribune dimanche.
Alors que les dotations aux collectivités locales n’ont pas suivi le rythme de l’inflation, plusieurs élus locaux défendent un nouveau modèle de fiscalité locale. A Manosque (Alpes-de-Haute-Provence), le maire Camille Galtier (LR) plaide pour une « taxe sur les loyers », qui ne concernerait que les locataires ayant des revenus suffisants pour s’en acquitter. « On voit que certains propriétaires vivent en dessous du seuil de pauvreté et doivent payer la taxe foncière et, à l’inverse, des locataires aux revenus aisés qui ne paient pas d’impôts dans la localité où ils habitent »explique-t-il à France Bleu Provence. L’idée s’apparente à celle de Jean-François Copé et sa proposition d’une « taxe d’habitation », qui remplacerait la taxe foncière et l’ancienne taxe d’habitation. « Ce serait beaucoup plus juste et concernerait tout le monde, sauf les plus modestes »assure-t-il.
Ces propositions rappellent la création d’une contribution territoriale universelle, défendue depuis plusieurs années par l’Association des maires de France. « Le principe serait simple : chaque foyer le paierait et son montant pourrait ne représenter que quelques euros par mois pour les ménages les plus modestes sans peser sur les impôts »explique à Figaro André Laignel, vice-président de l’AMF.