jeIl pleut abondamment à Sarlat (Dordogne) ce lundi 25 novembre. Une véritable Toussaint qui reflète l’ambiance morose qui règne parmi les salariés de Rougié. La quasi-totalité des 73 présents sur le site bloquent l’usine de foie gras, implantée dans la capitale du Périgord Noir depuis 1977.
L’annonce de la fermeture de l’atelier sarladais, mercredi 20 novembre, en a surpris plus d’un. Surtout la façon dont celui-ci a été réalisé. « Nous venions à peine de sortir de la réunion avec la direction que nos collègues en étaient déjà informés, par la presse », pointe, irrité, l’un des salariés, en poste depuis quarante ans. C’est un vrai manque de respect. »
Un marteau
Cela dit, la situation n’est pas non plus surprenante. Venant en voisin, Didier Bourdet, secrétaire local de la CGT, appuie : « Il y a plusieurs mois, nous avons interrogé le maire sur la situation d’Euralis, pour les voir. Pendant deux mois, nous n’avons eu aucune nouvelle. Il y avait des rumeurs, suffisamment pour être prises au sérieux. » Il va même plus loin : « Ils (NDLR : la direction du groupe Euralis, propriétaire de Rougié) ont investi dans le site de Maubourguet, dans les Hautes-Pyrénées, pour tuer le site de Sarlat. »
Mais pour de nombreux salariés rassemblés devant l’usine ce lundi 25 novembre, ce fut un coup dur. « Nous n’y croyons pas », admettent-ils. Cela nous est arrivé si soudainement… »
Le salarié présent depuis quarante ans va plus loin : « Et ils osent parler du bien-être du salarié ? Ce ne sont même pas eux qui sont venus à la réunion, mais le directeur du site qui a également été licencié.» Didier Bourdet est lui aussi en colère. « Ils crachent au visage de la famille Rougié venue s’installer ici en 1977 », affirme-t-il. Pour les autres salariés, pas question de voir la marque Rougié s’exporter. « J’espère qu’ils n’auront pas l’audace de s’en servir », prévient l’un d’eux. Ni nos recettes, d’ailleurs. La qualité du luxe peut être cultivée. »
«Ils crachent au visage de la famille Rougié»
Au-delà de la perte de leur emploi, pour beaucoup, Rougié fait partie de leur vie. Malgré des salaires assez bas (1). « Nous ne sommes rien payés », déclare Fatiha, une ancienne représentante syndicale. Après quarante ans de service, certains gagnent 13,17 € de l’heure. On sait que, en ce moment, c’est compliqué pour les conserveries, mais quand même. »
En attendant, le site est bloqué depuis lundi matin. Aucun camion ne sort ni n’entre.
Autres actions prévues
D’autres actions sont prévues dans la semaine, mais, pour l’instant, elles restent secrètes. Ce qui est sûr, c’est que le blocage de l’usine va se poursuivre. Si face à l’inévitable, les salariés semblent résignés, ce qu’ils demandent, c’est de pouvoir négocier au mieux leur départ. «Renouer le dialogue avec la direction ne serait pas mauvais», reconnaît Fatiha. «Ils voulaient tuer l’entreprise», fulmine un employé. Quand je vois que le magasin fait 800 000 euros de chiffre d’affaires, ce n’est pas là qu’ils perdent de l’argent, non ? » Quant aux raisons avancées par la direction, elles font grincer des dents. « La grippe aviaire et le Covid entretiennent une bonne relation », poursuit-elle. Le vaccin (contre la grippe aviaire) est remboursé à 75 %. »
Prochaine étape, vendredi 29 novembre, avec la réunion du comité social et économique au cours de laquelle un calendrier devrait être fixé.
(1) Un fonds de soutien aux salariés a été lancé sur leetchi.com (taper « soutien aux salariés de Rougié » dans l’onglet Soutenir une cause).