On élève nos Verts à la santé de la Ligue 1 !
Humeur – L’écrivain-journaliste se réjouit du retour en Ligue 1 de Saint-Étienne, son club fétiche.
François Cérésa est écrivain et journaliste. Son dernier ouvrage publié : « Total western » chez Séguier.
Après deux ans de purgatoire, ils retrouvent la Ligue 1. Les Verts peuvent trinquer. Les Verts, je sais. Je suis tombé dedans quand j’étais enfant. À l’école, je jouais ailier droit. Nous avons joué la finale de la Coupe de Paris. Mon grand-père maternel, originaire de Saint-Étienne, avait un ami : Jean Snella (entraîneur de Saint-Étienne). Lorsqu’il m’a demandé si je serais intéressé à suivre l’équipe, mon sang (encore très vert) a bouilli. Ce jour-là, je suis parti en bus pour Paris. C’était en 1966. J’avais 13 ans. Direction Saint Ouen. J’étais avec Robert Herbin, Aimé Jacquet, Hervé Revelli et le virevoltant Rachid Mekhloufi, qui avait une dent en or et la moustache de David Niven.
Avant le match, j’ai échangé quelques passes avec eux. Le roi n’était pas mon cousin. Le match d’aujourd’hui s’est terminé sur un cinglant 5-1 contre le Red Star. Trois buts d’Herbin (milieu et futur entraîneur mythique des Verts), un de Revelli (attaquant), un de Mekhloufi (attaquant). Si l’ASSE n’était pas championne de France cette année-là, Saint-Étienne est devenu mon équipe. Comme Bernard Pivot, je ne les lâche jamais. J’avais lu Michel Déon. J’étais un jeune homme vert.
Poteaux carrés
Et puis il y a eu la finale de la Coupe d’Europe en 1976. Contre le Bayern Munich. Les Allemands comptaient dans leurs rangs Rummenigge, Beckenbauer, Gerd Müller, Hoeness. L’équipe des Verts était composée de Curkovic, Janvion, Repellini, Piazza, Lopez, Bathenay, Patrick et Hervé Revelli, Larqué, Santini, Sarramagna… Rocheteau, « l’Ange Vert », (un surnom qu’il détestait), fils de L’ostréiculteur né en Charente-Maritime (oh non, il n’était pas stéphanois), était sur le banc de touche, blessé. Il a attendu sur le banc avant de tout donner dans les sept dernières minutes. N’avait-il pas été le principal artisan de la qualification des Verts pour la finale ? A Hampden Park, les poteaux carrés ont repoussé à deux reprises les espoirs stéphanois (Bathenay et Santini). C’était David contre Goliath. Un petit club de professionnels face à une armada de stars. Pas de miracles. Les Allemands ont gagné 1-0. Mais il y a des défaites victorieuses. Titres des journaux : « Les Verts écrivent la légende ! »
Saint-Étienne a réveillé le football français. Si la France a remporté deux Coupes du monde, c’est grâce à Saint-Étienne. Quand Platini jouait chez les Verts, on mouillait nos maillots. » Tout pour le club », a déclaré Herbin. On ne réfléchit pas, on fonce. On ne tergiverse pas, on se lance. Aujourd’hui, les nouveaux Verts ont repris de l’élan (vert). La ville tient son chant du geste. A Saint-Étienne, ville minière, ville d’acier, ville de Manufrance (fermeture en 1985), ville du textile, ville de prolétaires magnifiques et une gauche aux accents barrésiens, nous nous battons. A Saint-Étienne, cité des arquebuses de François 1ereuh, le Maréchal Grouchy, Jean Guitton, Maurice Denuzière, Charles Exbrayat, Pierre Gagnaire et Bernard Lavilliers, on a le cœur au ventre. Et du panache. Du jeu, encore du jeu, toujours du jeu. Le style est le vêtement de la pensée, disait Paul Morand. Nous élevons nos Verts à la santé de la prochaine saison de Ligue 1. Nous sommes tous de jeunes hommes verts.