Nouveau bras de fer entre les laboratoires de biologie médicale et la Sécurité sociale
Les biologistes médicaux relancent le combat avec la Sécurité sociale. Mercredi, les syndicats représentant les laboratoires de ville ont dénoncé les baisses de tarifs que veut leur imposer l’Assurance maladie, arguant qu’elles entraîneraient la « disparition d’une partie importante du réseau » des laboratoires d’analyses en France.
Si l’Assurance maladie met en oeuvre « son plan désastreux », les biologistes n’auront « pas d’autre choix » que de fermer des sites, de ralentir les laboratoires et de réduire les effectifs, affirment dans un communiqué les quatre syndicats représentant le secteur, soutenus par deux syndicats de biologistes hospitaliers.
Aucune économie supplémentaire
A l’origine de ce bras de fer : la volonté affichée par l’Assurance maladie de contenir le coût des remboursements d’analyses médicales pour la Sécurité sociale, qui s’élève à plus de 3,5 milliards d’euros en 2023. Face à une envolée des dépenses de santé de proximité, l’organisme veut débloquer 120 millions d’euros d’ici la fin de l’année, en s’appuyant sur la révision à la baisse des tarifs payés aux laboratoires privés pour un certain nombre d’actes.
Ce serait un « coup de grâce », assurent les syndicats du secteur. « On ne peut plus accepter de telles baisses, assure Jean-Claude Azoulay, président du Syndicat national des biologistes médicaux. On est sur des marges qui se réduisent de plus en plus ». Il rappelle que les biologistes ont déjà dû accepter des baisses de prix l’an dernier et en début d’année. Et assure que 17 % des laboratoires étaient dans le rouge en 2023.
« Nous ne demandons pas d’économies supplémentaires, a expliqué aux « Echos » Thomas Fatôme, le patron de l’Assurance maladie. La demande est simple : appliquer le protocole que nous avons signé ensemble en juillet 2023. » Après avoir fait grève à plusieurs reprises durant l’hiver 2022-2023 pour protester contre les coupes financières décidées par l’exécutif, les biologistes avaient en effet trouvé un accord avec l’Assurance maladie à l’été 2023.
Renégocier le protocole d’accord
Destiné à fixer les règles du jeu de la régulation du secteur par la Sécurité sociale pour trois ans (2024-2026), ce « protocole d’accord » avait été salué à l’époque par les professionnels qui réclament désormais sa « renégociation au plus vite ». Il reposait sur une hausse des dépenses de biologie de 0,4% par an et impliquait des baisses de prix de 80 à 90 millions d’euros par an.
Depuis le début de l’année, la facture de biologie pour la Sécurité sociale a pourtant augmenté bien plus que prévu dans l’accord. D’où la volonté de l’Assurance maladie de rectifier le tir en agissant sur les prix. « Comme on le fait habituellement, quand les volumes vont un peu plus vite que prévu, il y a des baisses de prix qui s’amorcent », argumente Thomas Fatôme.
Celle-ci rejette l’idée d’une remise en cause dès la première année de l’accord de l’été 2023. Ce serait « un coup très important » porté au système de négociation des règles du jeu entre les libéraux et l’Assurance maladie.
Le nombre de laboratoires d’analyses augmente
L’Assurance maladie est également peu sensible aux alertes sur la fragilité financière du secteur. Concentrée entre les mains d’une poignée de grands groupes soutenus notamment par des fonds d’investissement, elle tourne à plein régime pendant la crise du Covid. Elle est « très rentable » avec des « taux de marge atteignant des niveaux élevés », assure l’organisme dans un rapport publié en juillet.
À l’hiver 2022-2023, les laboratoires d’analyses avaient déjà brandi la menace d’une réduction de leurs implantations, mais « le nombre de laboratoires est en constante croissance depuis le début 2023 », assure l’Assurance maladie, avec près de 4.421 sites répertoriés au printemps 2024, soit environ 150 de plus qu’un an plus tôt.
L’organisation a déjà engagé des démarches pour imposer les baisses de prix aux laboratoires d’ici l’automne. Reste à savoir si l’absence de gouvernement à ce stade pourrait entraver leur mise en œuvre à l’automne. Si tel était le cas, le dérapage des dépenses de santé déjà anticipé en fin d’année n’en serait que plus important.