NouvellesNouvelles locales

« Nous n’avons pas assez de crèches, et le rôle de l’État est de les contrôler, qu’elles soient privées ou publiques » estime Jean Viard



Cette semaine, le nouveau livre d’enquête de Victor Castanet, Les Ogres, fait la une des journaux. Après avoir dénoncé les maltraitances dans certains Ephad, il s’en prend désormais aux garderies privées : manque de personnel, de nourriture, maltraitance des enfants. Le tableau est loin d’être reluisant.

franceinfo : Que s’est-il passé pour que nous ne soyons plus capables de protéger les plus vulnérables, les personnes âgées et les enfants ? ?

Jean Viard : Ne prétendons pas que nous parlons de toutes les crèches. De même que toutes les maisons de retraite n’ont pas les mêmes problèmes qu’un certain groupe dont le nom a changé. Il y avait 4 millions de personnes de plus de 80 ans, le public cible, il n’y en a que 700 000 dans les maisons de retraite, et là on parle de 450 000 enfants qui sont dans des structures privées, publiques ou associatives, sur 2 millions, soit environ un enfant sur quatre.

Donc ça veut dire que la majorité des soins aux enfants et aux personnes âgées sont faits par les familles. Très souvent, c’est une charge pour les femmes, avec tout ce que cela implique en termes de contraintes de temps, etc. Après, ce que ce livre démontre, c’est que, que ce soit privé ou public, au fond, c’est la même question, on a besoin de contrôle, et pour qu’on ait confiance, il faut avoir confiance dans le contrôle. Parce qu’effectivement, quand on confie un enfant ou une personne âgée, on n’est pas très coupable d’une certaine manière, et on veut surtout une confiance absolue. Donc, à mon avis, le rôle de l’État est de garantir la confiance et il faut qu’ils soient contrôlés, qu’ils soient privés ou publics.

Ce qui est le plus critiqué, c’est la gestion du secteur privé. Faut-il pour autant tout jeter à la poubelle ? ?

Mais non, chacun a son idéologie. Je pense que le rôle de l’État est d’abord de contrôler. Je peux comprendre qu’il y ait des gens qui préfèrent les structures publiques. Il y a 40 ans, j’ai participé à la création d’une crèche associative parce qu’à une époque, il fallait les créer soi-même, ensuite, cette crèche a été municipalisée, il y en a d’autres qui sont privatisées.

Le gros problème, c’est qu’on n’a pas assez de crèches, parce que quand on garde un enfant sur quatre, ça veut dire que beaucoup de gens arrêtent de travailler, ou que les mères ne travaillent pas, et ne peuvent pas travailler. C’est ça le vrai problème. On crée aussi beaucoup de crèches dans les entreprises. Mais ce qui est clair, c’est qu’il y en a d’abord un manque, et ensuite un manque de contrôle.

Et tout cela est entre les mains des politiques, on sait les améliorations, les meilleurs salaires, plus de contrôles, une réévaluation des aides publiques aussi ?

Oui, mais ce n’est pas seulement une question d’argent. Beaucoup de gens font ça par passion, par amour des enfants. Il y a eu tout un débat parce que maintenant on accepte un certain nombre de salariés dans les crèches qui n’ont pas les diplômes. Ça ne me choque pas. Qu’il y ait des gens qualifiés qui encadrent, c’est la moindre des choses. Mais il y a aussi une culture des diplômes en France sur laquelle il faut mettre un peu de souplesse. Mais après évidemment, c’est un peu une question d’argent. Donc attention, parce que les crèches privées sont payées essentiellement par les familles.

La situation que nous vivons en France est-elle spécifique à notre pays, ou nos voisins européens prennent-ils mieux soin de leurs aînés et de leurs enfants ? ?

Non, ce n’est pas qu’ils s’occupent mieux d’eux… Prenons la question de l’Allemagne. Historiquement, une mère qui travaillait était un peu rejetée parce qu’on considérait que le rôle d’une mère était de s’occuper de ses enfants. Et si elle travaillait, on considérait qu’elle abandonnait un peu ses enfants, c’est de l’histoire ancienne. Mais dans des pays comme l’Allemagne, c’est encore extrêmement présent.

Et donc, en Allemagne, il y a beaucoup de femmes qui ne travaillent pas quand elles ont des enfants, non seulement parce qu’il n’y a pas de crèches, mais aussi parce que l’image de la mère qui dépose son enfant le matin, le récupère le soir, et va travailler, est encore une image très négative. Ce qui est bien en France, c’est qu’on est arrivé au point où une mère a le droit de travailler, et c’est tout à fait légitime qu’elle dépose son enfant le matin, ou que le père le dépose le matin, etc. Et c’est là où la France est plutôt en avance sur beaucoup de pays. J’ai pris l’exemple de l’Allemagne parce que c’est juste à côté de nous.

Je crois que la France n’est pas en retard dans ce domaine d’un point de vue culturel, on est plutôt en avance, d’un point de vue des équipements, on n’est pas en retard, et notamment dans les grands quartiers populaires. C’est là qu’il y a surtout des femmes seules, avec des enfants, qui ne travaillent pas, notamment parce qu’il n’y a pas de crèches, souvent dans les grands quartiers les plus défavorisés de notre territoire.

francetvinfo

Malagigi Boutot

A final year student studying sports and local and world sports news and a good supporter of all sports and Olympic activities and events.
Bouton retour en haut de la page