Norman Thavaud sort de deux ans de silence pour balayer les « fausses accusations » – Libération

Dix mois après la clôture de l’enquête pour viol et corruption de mineurs à son encontre, le vidéaste dénonce « l’injustice » qu’il aurait subie et se dit prêt à intenter à l’avenir des poursuites pour diffamation.

Norman (re)fait une vidéo. De son nom complet Norman Thavaud, le YouTubeur aux 11 millions d’abonnés s’est exprimé dimanche 11 août dans une vidéo postée sur le réseau social dans lequel il investit depuis 2011. Seize minutes pour dénoncer ce qu’il considère comme une « injustice ». Libération avait révélé en décembre 2022 son placement en garde à vue pour viols et corruption de mineurs, en publiant les témoignages de huit jeunes femmes. L’enquête préliminaire a été classée sans suite en octobre 2023, pour des infractions « insuffisamment caractérisé ». Sept jeunes femmes ont été interrogées. « Je ne suis plus présumé innocent. Je suis innocent. » insiste le vidéaste, détaillant les répercussions « cataclysmique » de ces accusations « FAUX » à propos de sa famille et de sa carrière« Je vous le dis, j’ai envisagé le pire », il dit.

Un non-lieu ne signifie pas que les faits n’ont pas eu lieu, que l’accusé est innocent, mais que, faute de preuves, le procureur décide de ne pas engager de poursuites. L’affaire n’est donc pas traitée en justice. De manière générale, entre 2012 et 2021, 86 % des plaintes pour violences sexuelles ont été classées sans suite, selon une note de l’Institut de politique publique, publiée début avril. Ce taux atteint même 94 % pour les viols, un chiffre en constante augmentation puisqu’il était de 82 % en 2012. Dans 57 % des cas, le non-lieu est justifié par des infractions « insuffisamment caractérisé ».

« Défaillances du système judiciaire »

Dès août 2018, le nom de Norman Thavaud émergeait sur les réseaux sociaux après un tweet de Squeezie – de son vrai nom Lucas Hauchard – dénonçant le comportement inapproprié de certains vidéastes, qui « profiter de la vulnérabilité psychologique des jeunes abonnés pour obtenir des relations sexuelles. » Dans la foulée du mouvement #BalanceTonYoutubeur, en 2020, une fan québécoise, Maggie D., a publiquement accusé Norman Thavaud de l’avoir manipulée pour obtenir des photos et des vidéos à caractère sexuel, alors qu’elle n’avait que 16 ans, et a porté plainte.

Lorsque l’affaire a été classée, elle a annoncé sur son compte Instagram son intention, avec d’autres plaignants, de « déposer une plainte avec action civile. » Déjà en 2021, Maggie D. anticipait dans une enquête publiée par Urbanie : « Je n’attends pas grand-chose de la justice, ce ne serait pas la première fois qu’un agresseur serait acquitté. Je sais qu’il y a des failles dans la justice. Mais j’ai quand même porté plainte, par principe. Et puis je veux que Norman assume enfin ses actes. »

« Inélégant et immature »

Alors que les jeunes femmes décrivaient un système de contrôle psychologique basé sur le statut d’icône Internet du YouTubeur, celui-ci reconnaît, dans sa vidéo publiée ce dimanche, que son « Son rapport aux rencontres et à la séduction était certainement parfois inélégant et immature. » Il continue : « J’ai probablement été impoli à certains moments, j’ai aussi probablement blessé des gens parfois, sans le vouloir, et je le regrette sincèrement. Si mon rapport à la séduction était absolument irréprochable, bien sûr, il n’y aurait rien eu de tout cela. »

Faisant référence au mouvement #MeToo, il commente également : « Libérer la parole des victimes est essentiel, mais pour que ce mouvement soit durable, nous devons être capables de faire la différence entre les vraies accusations et les fausses. Ne pas le reconnaître enlève de la crédibilité à la voix des femmes. » Le vidéaste assure que, désormais, il « engagera systématiquement des poursuites judiciaires » quand « Quelqu’un le diffamera. » Une manœuvre judiciaire très courante. Depuis l’affaire Denis Baupin en 2016, les mesures de silence se multiplient contre les personnes dénonçant des violences sexistes et sexuelles.