Du trou normand en 1952, à La très bonne et très joyeuse histoire de l’étui à chemise Colinot En 1973, l’actrice iconique Brigitte Bardot tourne dans une cinquantaine de films, avant de décider de se retirer du cinéma pour se consacrer à la défense de la cause animale.
Le 28 septembre prochain, celle qui a enflammé le monde entier avant de se passionner pour la cause animale fêtera ses 90 ans. « Je ne sais pas qui a créé le mythe BB, en tout cas je suis ravi d’être un mythe, si j’en suis un, mais je n’y crois pas spécialement non »» déclarait Bardot en 1960 sur le tournage de La véritéde Clouzot. Une longue vie en partie racontée récemment dans Bardotune série de six épisodes de Danièle et Christopher Thompson.
« J’en ai marre de cet anniversaire ! (…) Heureusement, ce n’est pas tous les jours que j’ai 90 ans ! a déclaré l’ancienne actrice dans un entretien à l’AFP. « C’est adorable, mais au bout d’un moment, ça ne s’arrête plus ! Il y a un moment où je pense que je préférerais avoir 20 ans ! » ajoute-t-elle, précisant toutefois qu’elle est « très heureux d’être arrivé à un âge aussi canonique !
Pour célébrer cet anniversaire, franceinfo Culture revient en vidéo sur neuf films marquants de la carrière cinématographique de l’actrice, courts, intenses, et révélateurs de la personnalité pleine d’ambivalences de Brigitte Bardot, qui a aussi suscité la polémique avec son soutien à l’extrême droite.
1 Ses premiers pas devant la caméra : « Le Trou normand » (1952)
Brigitte Bardot avait à peine 18 ans lorsqu’elle tient son premier rôle au cinéma, dans cette comédie de Jean Boyer. Elle incarne Javotte Lemoine, une jeune fille utilisée par sa mère pour prévenir le naïf et quelque peu niais Hippolyte (Bourvil), qui doit percevoir un héritage à condition d’obtenir son certificat de scolarité. Dans son autobiographie Initiales BB publié en 1996 Brigitte Bardot confiait avoir eu une très mauvaise expérience avec ce premier tournage, sur lequel elle disait avoir été maltraitée par les membres de l’équipe, des producteurs jusqu’aux acteurs, au point qu’elle envisageait d’arrêter sa carrière naissante.
2 « Et Dieu créa la femme » (1956) : Brigitte Bardot devient BB
Dans ce film tourné à Saint-Tropez réalisé par son futur mari Roger Vadim, Brigitte Bardot incarne Juliette, convoitée par trois hommes, « une fille de son temps »libre dans sa vie et dans sa sexualité. Mal accueilli et controversé en France, le film fut un triomphe aux États-Unis et un immense succès dans toute l’Europe. C’est avec ce rôle que Brigitte Bardot est devenue une star et un sex-symbol international. Et Dieu créa la femme Il rentre enfin en France où il connaît cette fois un enthousiasme extraordinaire. Bardot incarne les changements de société à venir et un modèle de féminité à réinventer. En 1973, l’actrice déclarait dans une interview télévisée : « Je pense que j’ai été le premier dans le monde cinématographique comme ça, dénué de tout artifice, naturel. » Ce film a forgé son image de femme libre. « Je pense qu’être une femme libérée, c’est être au-delà de tout ce que l’on peut vous dire ou vous faire. » Bardot a déclaré en 2003 dans l’émission Tu ne peux pas plaire à tout le mondesur France 3.
3 «En cas de malheur», de Claude Autant-Lara (1958) : un parfum de scandale
Dans cette adaptation du roman de Simenon, Brigitte Bardot partage la vedette avec Jean Gabin. Elle incarne Yvette Maudet, 22 ans, prostituée occasionnelle, qui assomme la femme d’un horloger lors d’un braquage. Très impressionnée par ce monstre sacré du cinéma français, Brigitte Bardot a oublié son texte. Mais Gabin, d’abord réticent à jouer le rôle de Bardot, se laisse charmer par l’actrice et la met à l’aise : « Mademoiselle, j’aime les femmes grandes. Tu es grand, alors je t’aime.« Mais toiUne scène dans laquelle son personnage relève sa jupe pour convaincre l’avocat de défendre sa cause fait scandale. La scène est coupée par la censure et le film est interdit aux moins de 16 ans. Il sera réintroduit bien plus tard dans une version restaurée du film. En cas de malheur fut un triomphe au cinéma. A la Mostra de Venise, Brigitte Bardot est agressée par les fans et les journalistes, debout vingt-quatre heures sur vingt-quatre dans le hall de son hôtel.
4 « Veux-tu danser avec moi » (1959) : la rencontre avec Serge Gainsbourg
C’est sur le tournage de ce film qui raconte un meurtre sur fond d’adultère que Bardot rencontre Gainsbourg. C’est elle la star, lui est encore inconnu, jeune et timide. Il n’ose pas lui parler. Il attendit près de dix ans, la gloire, et l’occasion d’une nouvelle rencontre pour lui offrir sa chanson en 1967, Harley-Davidson, écrit pour elle. Cette chanson marque le début d’une histoire d’amour qui durera trois mois. Une deuxième chanson, Je t’aime… moi non plus, écrit pour elle à sa demande, arrivera trop tard pour être interprété par son inspiration. Il sera chanté plus tard, mais par Birkin. Après trois mois d’amour fou, Bardot décide de quitter Serge Gainsbourg sous la menace de divorcer d’avec son mari, le milliardaire allemand Gunter Sachs. Gainsbourg sort de cette idylle le cœur brisé. Après la rupture, il écrit la chanson Initiales BB qu’il a enregistré en mai 1968.
5 « La Vérité » d’Henri-Georges Clouzot (1960) : son « meilleur film »
Maître du film noir, Henri-George Clouzot s’est inspiré d’un fait divers survenu dans les années 1950 : l’affaire Pauline Dubuisson. Il a confié à Brigitte Bardot le rôle de la meurtrière, qu’il a nommé Dominique Marceau, et à Sami Frey celle de son amant assassiné. À propos de la scène du tribunal dans laquelle l’accusée se défend en criant son amour pour son amant, Bardot explique :« C’était une scène que je devais connaître au rasoir, il y avait 150 figurants, il y avait des acteurs extraordinaires (…) Si j’étais bien parce que je pleurais en jouant, parce que j’étais à la place de cette fille. Ce film d’essai mettant en vedette Charles Vanel et Paul Meurisse fut un triomphe en salles. Il est considéré par Brigitte Bardot comme le meilleur de sa carrière. « Monsieur Clouzot n’est pas le tyran qu’on croit »affirmait Brigitte Bardot au moment du tournage de La vérité. Par dépit, l’actrice aurait souffert sous la direction d’un réalisateur exigeant et pas toujours très tendre. Elle l’aurait giflé pour avoir écrasé ses pieds nus. Suite au tournage, Brigitte Bardot a vécu avec Samy Frey, une liaison qui a duré plusieurs années.
6 « Vie privée », de Louis Malle (1962) : « un film sur Bardot »
« On m’a demandé de faire un film avec Bardot. Etant donné que Bardot reste une star très intrusive, je me suis dit que tant que je faisais un film avec Bardot, c’était peut-être plus intéressant de faire un film sur Bardot » a déclaré Louis Malle un an après la sortie du film dans la série Cinépanorama. Confidentialité raconte l’histoire d’une star harcelée par les journalistes et le public, qui sombre dans la dépression. Certaines scènes du film, comme celle où elle se fait insulter dans l’ascenseur, sont des aventures qui sont réellement arrivées à l’actrice. Brigitte Bardot a dit qu’elle n’aimait pas ce film, non pas pour des raisons de qualité, mais parce« il racontait trop de choses qui lui étaient personnelles et insupportables » rapporte Henry-Jean Servat dans Bardot la légende, une nouvelle édition de son livre consacré à l’actrice publiée en septembre 2024 à l’occasion de son 90e anniversaire. Sans compter que Bardot ne tenait pas sa compagne dans son cœur : « Elle ne s’entendait pas du tout avec Marcello Mastroianni. »
7 « Le Mépris », de Jean-Luc Godard (1963) : la Nouvelle Vague
Adapté du roman d’Albert Moravia, Mépris est le sixième film de Jean-Luc Godard. Il raconte l’histoire del’écrivain et scénariste Paul Javal (Michel Piccoli) est marié et heureux avec sa femme Camille (Brigitte Bardot). Le célèbre producteur américain Jeremy Prokosch (Jack Palance) lui propose de travailler sur une adaptation de L’Odyssée, réalisée par Fritz Lang (qui joue lui-même dans le film) à Cinecittà. Prokosch s’avance bientôt vers Camille devant Paul. « C’est super ! J’ai désormais rejoint la Nouvelle Vague” dit Bardot. Mais une fois le montage terminé, les producteurs ont trouvé le film trop timide et ont demandé au réalisateur d’ajouter des scènes de nu avec Bardot. Godard en ajoute une dans laquelle Camille énumère toutes les parties de son corps et demande à son mari si elles lui plaisent. Même si cette scène n’était pas prévue initialement, elle est devenue par la suite une scène culte. Le film est tourné en partie sur l’île de Capri en Italie, dans l’incroyable villa surplombant la mer de l’écrivain italien Curzio Malaparte qui la fit construire dans les années 30 par l’architecte Adalberto Libera.
8 « Viva Maria », de Louis Malle (1965)
Trois ans après avoir raconté les horreurs de la vie de star de BB dans ConfidentialitéLouis Malle confie à Bardot un rôle aux côtés de Jeanne Moreau dans un western. Viva Maria raconte les aventures de deux danseurs de music-hall impliqués dans une révolution au début du XXe siècle dans une république d’Amérique centrale. « Quand j’y pense, il était un peu inconscient. Impliquez Jeanne et moi, ensemble ! Chacun risquait d’être mangé par l’autre. C’était fou et magique. J’ai aimé l’idée. Mais le pauvre, qu’est-ce qu’il n’avait pas sur le dos. »
9 « La très bonne et très joyeuse histoire de la trousse Colinot » (1973) : les adieux de BB au cinéma
Ce film inclassable, le 46ème dans lequel joue Bardot, est l’ultime contribution de BB au cinéma. C’est en effet lors du tournage de ce film que Nina Companeez qui se déroule au Moyen Âge que l’actrice annonce soudain qu’elle quitte le cinéma pour se consacrer à la défense de la cause animale. A l’origine de cette décision, le sauvetage de Colinette, une chèvre destinée à servir de déjeuner à la communion du petit-fils d’une vieille dame rencontrée par l’actrice entre deux prises. « Je veux consacrer mon temps à m’occuper des droits des animaux. Et je pense que j’aurai beaucoup de travail, c’est pourquoi il vaut mieux que je ne fasse plus de cinéma. BB a quitté définitivement les décors et a créé le Fondation Brigitte-Bardot. L’actrice a tenu parole et n’a plus fait d’apparition au cinéma jusqu’à aujourd’hui. «J’ai évolué pendant plus de 50 ans. Je suis très fière de ma première partie de vie que j’ai réussi et qui me permet désormais d’avoir une notoriété mondiale ce qui m’aide beaucoup pour la protection animale », Brigitte Bardot a déclaré à l’AFP, ajoutant « Je fuis l’humanité, et j’ai une solitude silencieuse qui me convient très bien. »
L’acteur Francis Huster garde un autre souvenir de ce tournage. Dans une émission de Michel Drucker consacrée aux 80 ans de Brigitte Bardot en 2014, il confiait qu’il « mettre un pansement sur son willy » cacher une éventuelle manifestation de son émotion dans la scène de nu avec cette femme « sublime ».