Nathan Thrall, Prix Pulitzer 2024 : vit en Palestine
C’est l’histoire d’une tragédie, celle d’Abed Salama, un Palestinien des territoires occupés dont le fils a perdu la vie dans un accident de la route. Mais l’histoire est plus vaste. Elle raconte les fractures, les murs, les vies, les humiliations, les haines tenaces et transmises, les solidarités trop rares de la Cisjordanie.
Son auteur, Nathan StrollJournaliste et essayiste américain, ancien responsable du programme israélo-arabe de l’Groupe de crise internationals’inspire de sa vie à Jérusalem. Son essai, « Une journée dans la vie d’Abed Salam », récompensé par le prix Pulitzer, offre une dimension personnelle des enjeux du conflit israélo-arabe à la lumière des attentats du 7 octobre.
Le destin brisé d’Abed Salama sur fond de fractures géopolitiques
« Abed Salama est un Palestinien qui vit dans la ville d’Anata, de l’autre côté du mur par rapport à l’endroit où je vis à Jérusalem. La ville d’Anata a été partiellement annexée par Israël en 1967, et partiellement retirée. Abed est le père d’un garçon de 5 ans, Milad, qui est en voyage de vacances avec sa classe. Et comme les enfants de ce bus ne peuvent pas accéder aux terrains de jeux qui se trouvent de l’autre côté du mur, ils doivent faire un long trajet jusqu’à un terrain de jeux beaucoup plus loin, en direction de Ramallah. Sur le chemin, leur bus est touché. »
À travers la quête d’un père à la recherche de son fils, Nathan Stroll raconte les répercussions concrètes et tragiques du conflit sur la vie des civils de la région.
Une histoire humaniste contre la rationalisation excessive
Nathan Stroll explique sa démarche :
« Le choix d’écrire un livre sur un sujet aussi banal qu’un accident de voiture était délibéré. Mon objectif en choisissant un sujet qui se produit partout dans le monde, comme un accident de voiture, était vraiment de mettre en lumière le système de contrôle exercé par les Israéliens sur les Palestiniens. »
Cet accident, bien qu’universel, intervient néanmoins dans un contexte très particulier que le journaliste a observé lors de son séjour. Il témoigne :
« L’endroit où se déroule ce livre est une zone très ségréguée. Il y a des colonies juives à côté de ces localités arabes, et ces communautés n’ont aucune interaction entre elles. Lorsqu’il existe un système de domination d’un groupe sur un autre, les gens doivent le rationaliser, trouver une logique dans la déshumanisation des personnes qu’ils soumettent, dans des conditions qu’ils n’accepteraient jamais pour eux-mêmes. »