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Moscou suit de près la crise politique française

La presse russe voit positivement l’action du RN, soulignant la lutte du groupe d’extrême droite contre l’Union européenne et son soutien militaire actif à Kiev.

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Marine Le Pen et Jordan Bardella le 9 juin 2024 à Paris.  (JULIEN DE ROSE / AFP)

La guerre en Ukraine a eu un fort impact sur la campagne européenne et le résultat du vote n’a pas échappé à Moscou. Le Kremlin, officiellement, n’a pas commenté la montée de l’extrême droite en France et la convocation d’élections législatives anticipées, estimant qu’il s’agit là d’une « une affaire intérieure de la France », selon les mots du porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov. Mais « Nous surveillerons tout cela attentivement, en raison de l’attitude extrêmement inamicale, voire hostile, des dirigeants français à l’égard de notre pays »a-t-il toutefois commenté, comme le rapporte l’agence de presse gouvernementale russe Ria Novosti.

Tous les dirigeants politiques n’ont pas ces précautions linguistiques. L’ancien président Dmitri Medvedev, dans son style fleuri habituel, a envoyé Emmanuel Macron et le chancelier allemand Olaf Scholz, « dans la poubelle de l’histoire. »

« Les commentaires de Peskov semblent indiquer qu’ils ont peut-être été un peu surpris par les résultats.souligne, sur France Culture, le journaliste Paul Gogo, spécialiste de la Russie. Mais PPour le Kremlin, c’est forcément très intéressant, car il voit les gens du RN comme des relais de sa rhétorique, à minima (…). Une opportunité inattendue apparaît. Le groupe français appelle certes au soutien de l’Ukraine depuis le début du conflit, mais il dénonce l’usage des armes occidentales sur des cibles situées sur le territoire russe. Elle préconise également une solution de paix immédiate, qui pourrait geler de facto l’occupation des territoires ukrainiens envahis.

« Nous entrons dans une période qui va plaire au Kremlin », résume auprès de l’AFP Bertrand Badie, spécialiste des relations internationales à l’Institut d’études politiques de Paris. La parenthèse qui vient de s’ouvrir « fermera au mieux début juillet » à l’issue des élections législatives, ajoute-t-il, prédisant dans tous les cas « un affaiblissement objectif de la politique étrangère française et de sa capacité d’action ».

D’emblée, la presse russe salue la percée de l’extrême droite en France, interprétée comme un pas supplémentaire vers un affaiblissement de l’UE et la fin du soutien militaire à l’Ukraine. « Ils ne veulent pas mourir pour l’Ukraine : les Français s’opposent à l’envoi de troupes à Kiev »s’enthousiasme l’hebdomadaire russe Arguments et faitsqui attribue le fiasco de la majorité française aux déclarations d’Emmanuel Macron sur la guerre.

La cohabitation compliquerait la prise de décision à Paris, sans changer complètement les orientations françaises, nuance Fiodor Loukyanov, politologue interrogé dans l’article. Quand même: « La Russie en sera contente. »

« Les Français ressentent sans doute une certaine lassitude face au poids du soutien socio-économique et militaire à l’Ukraine », relève également le politologue Lioubov Bisson, interviewé par la chaîne RTVI. Il estime que les dernières déclarations d’Emmanuel Macron sur l’hypothèse d’un rôle plus actif de la France dans le conflit ont pu effrayer les électeurs.

Jordan Bardella répète souvent qu’il « a grandi dans la rue et a littéralement survécu dans une ville sale et dangereuse en proie à la drogue, au crime organisé et aux radicaux islamistes »souligne le quotidien Komsomolskaïa Pravda, à propos de l’eurodéputé de Saint-Denis. Et s’il soutient l’Ukraine, le quotidien le rappelle tout de même, il critique aussi sans relâche Emmanuel Macron. « pour ses déclarations qui menacent d’impliquer directement la France dans un conflit armé ». Le journal souligne également les positions anti-européennes du candidat et son rejet d’une expansion de l’union.

En mars, le président du RN réclamait pourtant sur franceinfo le retrait des troupes russes d’Ukraine, sur la base, « dans un premier temps, depuis la frontière initiale avant le déclenchement de la guerre début 2022 ».

Mais il a également ajouté que la Crimée était « historiquement et culturellement russe, évidemment », une position déjà défendue par Marine Le Pen depuis l’annexion de 2014. Les propos de Jordan Bardella ont été relayés par l’agence pro-Kremlin Tass, notamment. Il n’a d’ailleurs pas échappé aux observateurs russes que le RN s’est opposé aux sanctions économiques, et qu’il s’est abstenu à plusieurs reprises sur des textes soutenant l’Ukraine.

L’hypothèse d’une démission d’Emmanuel Macron, évoquée lundi matin par Europe 1 avant d’être démentie par l’intéressé, a été particulièrement reprise et commentée sur Telegram et dans les médias russes. Malgré tout, certains commentateurs sympathisants des thèses du Kremlin ne semblent rien attendre des élections françaises. « Nous verrons comment le président Macron et le Premier ministre tentent de coexister, conclut Andreï Perla, commentateur politique pro-Kremlin, cité par le média Absatz. Il n’y aura aucun changement dans la politique de Paris à l’égard de Moscou. Le Pen ne fera rien pour empêcher la France de fournir des armes à l’Ukraine ou d’envoyer des instructeurs militaires. »

Le RN a très vite dénoncé l’agression russe après le début de la guerre, mais sa proximité réelle ou supposée avec la Russie revient régulièrement. Un rapport de la commission d’enquête de l’Assemblée nationale sur les ingérences étrangères dénonçait en mai 2023 le « des liens privilégiés avec le Kremlin »ainsi que « un soutien idéologique et une proximité » qualifié de« indéniable » du RN avec le Kremlin. Marine Le Pen avait dénoncé les travaux « politisé ».

Le rôle de Thierry Mariani, tout juste réélu au Parlement européen, fait également débat. L’ancien ministre des Transports de Nicolas Sarkozy, régulièrement accusé d’être un mandataire du Kremlin, n’a cessé de faire des allers-retours en Russie. « Elle n’est pas une menace pour la France, ni pour l’Europee », a-t-il encore déclaré le 22 mai sur Sud Radio.

« Je ne peux pas vous laisser dire que je prends la position d’un pays qui a envahi un Etat-nation, que j’ai condamné sans la moindre ambiguïté et qui menace aujourd’hui mon pays », » s’est défendu Jordan Bardella sur France 2, juste avant les élections européennes. Sa liste a recueilli 25% des voix au bureau de vote de Moscou, devant celles de François Asselineau (18,83%), Marion Maréchal (13,23%) et Florian Philippot (9,67%). Sur un total de 393 suffrages exprimés, bien sûr, et avec 83 % d’abstention.

Ray Richard

Head of technical department in some websites, I have been in the field of electronic journalism for 12 years and I am interested in travel, trips and discovering the world of technology.
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