Mort de Nahel : après la relaxe du policier responsable de la fusillade, le passager de la voiture confie sa « peur »

La libération mercredi de Florian M., le policier qui a tiré sur le jeune Nahel, a plongé Fouad (le prénom a été modifié) dans un profond désarroi. Cet adolescent de 17 ans était le passager avant à bord de la Mercedes AMG jaune vif qui a terminé son périple encastré dans le mobilier urbain le 27 juin à Nanterre (Hauts-de-Seine). Il a vu son ami mourir sous ses yeux.
Pour lui, cette évolution est un mauvais signal envoyé à la police. «Je ne comprends pas comment il est possible qu’il s’en sorte. Aujourd’hui, j’ai peur pour moi et j’ai peur que d’autres jeunes soient tués lors de contrôles », réagit-il dans un très court texte, envoyé ce samedi au Parisien. « Nahel était dans ma classe, c’était mon ami. Je pense à lui tous les jours. »
Fouad a été entendu comme témoin par l’IGPN le 3 juillet. Il s’est alors constitué partie civile dans le cadre de l’information judiciaire. Les auditions des parties civiles, dont celle de Fouad, se sont achevées entre octobre et début novembre. C’est peu après que l’avocat de Florian M., Me Laurent-Franck Liénard, a déposé une troisième demande de mise en liberté de son client.
Une décision qui a « ravivé la douleur »
C’est dans ce contexte que les magistrats chargés de l’instruction du dossier ont ordonné la fin de la détention du policier. Ce motard de la DOPC (service de l’ordre public et de la circulation), qui reste mis en examen pour meurtre, a été placé sous contrôle judiciaire, avec interdiction notamment de se rendre à Nanterre et de porter une arme. Dans leur ordonnance, les juges d’instruction ont notamment estimé que si des « différences » existaient encore entre « les différentes versions », le risque de concertation entre les deux policiers était aujourd’hui « moins important », tous les protagonistes du dossier ayant été entendus.
Contrairement aux fois précédentes, la décision des juges d’instruction n’a fait l’objet à ce stade d’aucun recours, ni par la défense, ni par le parquet de Nanterre. La chambre de l’instruction de la cour d’appel de Versailles n’a donc pas été contactée. Les parties civiles n’ont donc pas eu l’occasion de faire la moindre observation. « Nous avons appris dans la presse que le policier mis en examen pour le meurtre de Nahel avait été libéré. Cette décision a ravivé la douleur de la partie civile que je représente, et l’a également laissée dans un état d’incompréhension », observe Me Karen Noblinski, l’avocate de Fouad et de sa famille.
VIDÉO. « Ce policier a pris deux vies » : la mère de Nahel s’exprime devant 900 personnes à Nanterre
« L’instruction continue. Mon client continuera à œuvrer pour que le récit des événements dont il a été témoin soit entendu et reconnu par l’institution judiciaire. Ce sont des faits qui ont indéniablement bouleversé sa vie, et qui ne le quittent plus depuis le 27 juin 2023″, prévient l’avocat pénaliste parisien. Contacté, l’avocat du passager arrière de Nahel, au moment des faits, n’a pas souhaité s’exprimer à ce stade. L’avocat de la mère de Nahel, Me Yassine Bouzrou, n’a pas non plus souhaité faire de « commentaires sur la détention provisoire du policier, comme (il l’a) toujours fait dans cette affaire ».
L’avocat du policier appelle au « respect de l’autorité judiciaire »
L’avocat du policier, Me Laurent-Franck Liénard, a pour sa part appelé « les personnes qui s’expriment sur cette détention et donnent leur avis » à « respecter la loi, l’autorité judiciaire et l’homme que je défends, et à ne pas dire rien. » « Ils ne respectent pas non plus l’autorité de la décision de justice qui a ordonné la libération de ce policier. Ils ont tort », a ajouté l’avocat pénaliste dans un communiqué transmis au Parisien.
Quelque 500 personnes se sont rassemblées pacifiquement dimanche 19 novembre à Nanterre, à l’appel de la mère de Nahel, pour protester contre la libération du policier. « Il n’a fait que quatre mois (de détention provisoire), ce n’est rien ! Il a pris une vie. Il a pris deux vies, dont la mienne», a déclaré Mounia M., au micro. Les amis de Nahel, le visage masqué, ont pris la parole pour critiquer cette décision. « Justice pour Nahel », « pas de justice, pas de paix », scandait la foule. Les images de la mort de l’adolescent de 17 ans, abattu à bout portant lors d’un contrôle routier, largement diffusées sur les réseaux sociaux, avaient soulevé une vague de colère et de violence qui a englouti le pays plusieurs nuits consécutives, la plus grave depuis 2005.
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