Mort de l’Homme en bleu : Limoges a une âme vague
« Tenez ! C’est l’Homme en Bleu ! » Tout automobiliste, chaque piéton circulant à Limoges et aux alentours connaît « l’Homme en Bleu ».
C’est avec le sourire, voire avec une certaine tendresse, que nous l’avons croisé, heureux de voir qu’il était toujours là, toujours vaillant et toujours en salopette, chaussé de ses bottes en caoutchouc, et bien sûr, toujours sur son vélo indestructible.
Personnage local
« L’Homme en Bleu » comme l’appellent tous les Limougeauds, Jean-Marc Chatard pour ceux qui l’ont connu, était devenu, sans l’avoir demandé à personne, une figure incontournable de Limoges. Un véritable symbole. Un webzine fondé par des jeunes Limougeauds, qui ont annoncé, il y a un mois, la fin de leur grande aventure, a même pris ce surnom de « l’Homme en bleu », comme un clin d’œil affectueux que seuls les Limougeauds peuvent comprendre.
De nombreuses personnes l’ont photographié, circulant à son rythme au fil des décennies, sur les routes de Haute-Vienne. Certains ont même pris une photo avec lui, heureux de pouvoir approcher cette véritable figure locale.
Frapper et courir
Malheureusement, c’est à vélo que Jean-Marc Chatard, cet habitant d’Eyjeaux et ancien maçon, est décédé. Ce vendredi 8 novembre, vers 18h20. Il circulait sur la route départementale 979, entre le lieu-dit « Les Chabannes », à la sortie de Feytiat et La ferme des Chabannes, à Eyjeaux, lorsqu’il a été percuté par un véhicule. . Retrouvé par les secours dans un fossé, il est décédé au CHU de Limoges dans la nuit des suites de ses blessures.
« Il creusait son jardin en pédalant : lentement », confie le maire d’Eyjeaux, Jacques Roux, qui évoque un homme discret et solitaire.
« L’Ange Bleu »
L’annonce de sa mort a fait l’effet d’une explosion. Aux portes des commerces, sur les terrasses, les Limougeauds ont du mal à cacher leur tristesse. Tout le monde a un jour rencontré, côtoyé ce personnage qui, selon certains, avait un côté énigmatique.
« Je n’ai jamais connu son nom, je ne savais pas où il habitait, mais le voir traverser la ville m’a rassuré. C’était un peu l’ange bleu de Limoges » confie une dame. « J’ai du mal à m’habituer à l’idée de ne plus le voir », poursuit-elle.
« Je ne le connaissais pas, mais je l’aimais beaucoup parce qu’il me rappelait mon père. Ce personnage était un mystère pour moi. C’est un peu comme si l’âme de Limoges s’estompe», raconte Marie-Laure, une autre Limogesoise.
« Je pêche la truite à Nedde et je le rencontrais souvent. Un jour, il a cassé la fourche de son vélo. Il n’a jamais voulu que je le ramène chez lui», se souvient Gérard, commerçant aux Halles centrales de Limoges. « Sa mort me peine et les circonstances me bouleversent. »
« Je pense qu’il a dû parcourir plus de kilomètres à vélo que tous les coureurs du Tour de France depuis la création de la grande boucle », estime Olivier, employé municipal. « Je me souviens, il y a une vingtaine d’années, de l’avoir rencontré près de Bellac. J’ai souvent échangé quelques mots avec lui. C’était un grand admirateur de Poulidor. »
« Limoges perd son emblème », déplore Charles, restaurateur de la ville. « Vous pouvez imaginer l’importance de ce personnage. Il avait, sans rien demander, sa page Facebook, un journal portant son nom. C’était l’Homme en Bleu, mais j’ai le blues. »
A toute sa famille, l’équipe Populaire du Centre présente ses plus sincères condoléances.
Coralie Zarb et Jean-François Julien