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« Mon peuple est perdu dans cette violence sans fin »

Manifestation pour un cessez-le-feu à Gaza et pour la libération des otages, à Tel Aviv, le 9 mai 2024.

« Le cœur pensant. Réflexions sur un chaos annoncé » (Halev Hamehourehar), de David Grossman, traduit de l’hébreu par Jean-Luc Allouche et Clément Baude, Seuil, 128 p., 15 €, numérique 11 € (en librairie le 4 octobre).

L’écrivain israélien et militant pour la paix David Grossman, né en 1954, a décrit au début de sa carrière d’écrivain, dans Le vent jaune (Seuil, 1988), l’atmosphère qui régnait dans les territoires palestiniens occupés avant la première Intifada (1987-1993), qui dissipa l’illusion d’une résignation tranquille des Palestiniens face à l’occupation israélienne, alors bercée par l’opinion de son pays . Il est sur le point de publier Le cœur pensant. Réflexions sur le chaos annoncérecueil d’articles et d’interventions publiés pour la plupart avant le 7 octobre mais dont certains ont été rédigés depuis. Il revient sur les événements.

Que ressentez-vous, un an après le 7 octobre, alors que la guerre actuelle est devenue l’un des conflits les plus longs qu’Israël ait connu et menace de s’étendre au Liban et à tout Israël ? le Moyen-Orient ?

Un sentiment de deuil, de douleur. Parce que l’essentiel, à mes yeux, le processus menant à un éventuel accord avec les Palestiniens, a subi un coup terrible, dont je ne sais pas s’il pourra se remettre. Mais devant l’occasion perdue de paix, je pense à nos otages, détenus dans des conditions inhumaines. Je pense aussi à la réflexion des Israéliens, qui vivaient dans l’illusion de pouvoir rester éternellement invaincus, illusion entretenue pendant des années par nos dirigeants. Le fait que nous n’aurions pas pu imaginer les Palestiniens capables d’une action aussi élaborée et meurtrière en dit long sur l’attitude israélienne à leur égard. Mais la douleur reste primordiale. On le voit dans l’apparence physique des gens qui marchent voûtés, maladifs, avec des visages tristes. Beaucoup envisagent de quitter le pays ou sont en train de le faire…

Parfois, je me surprends à penser que quelque chose de positif pourrait encore sortir d’une telle situation : une nouvelle façon de comprendre l’existence au contact de sensations comme l’épuisement, la faiblesse, la peur et toutes ces choses que nous ressentons. nous nous efforçons d’éviter, à travers notre vie, d’« évadés », de personnes fuyant leur engagement. Cette réalité, qui s’est imposée d’elle-même sur nos épaules, peut nous ouvrir une voie plus réaliste, plus empathique, y compris à l’égard des souffrances de l’ennemi. Peut-être qu’Israël finira par comprendre la nécessité de parvenir à la paix avec ses voisins. Parce qu’il ne les vaincra pas militairement. Le mieux pour son avenir est de parvenir le plus rapidement possible à un accord garanti par les grandes puissances, avec le soutien des pays arabes modérés qui ont besoin du soutien d’Israël contre l’Iran.

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Gérard Truchon

An experienced journalist in internal and global political affairs, she tackles political issues from all sides
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