C’est un texte qui en dit long sur le quotidien des élus locaux. Dans un communiqué diffusé sur ses réseaux sociaux le 17 octobre, Camille Pouponneau, maire PS de Pibrac (Haute-Garonne), a annoncé qu’elle quittait ses fonctions à la tête de la commune et de conseillère communautaire. Tout au long de ses explications, publiées « avec une profonde tristesse »l’élue de 35 ans tire l’amère conclusion de quatre années de mandat qui l’ont épuisée. « La détérioration de ma santé mentale, entraînant une détérioration progressive de ma santé physique, ne me permet plus d’exercer ces fonctions avec le recul et l’énergie nécessaires. J’ai atteint la fin de ce que je pouvais endurer »elle présente.
L’ancienne adjointe parlementaire de Carole Delga et Valérie Rabault la partage « un sentiment constant d’injustice et d’impuissance ». Elle déplore également le rôle dégradé des élus locaux et la frustration de ne pas pouvoir agir davantage au service des citoyens. « Malheureusement, je me sens aujourd’hui comme un simple manager sans marge de manœuvre, noyé sous le poids de règles étatiques rigides et de décisions intercommunales sur lesquelles il est difficile d’influencer, perdant tout sens de mon engagement »explique le nouvel ex-élu.
« Mon quotidien est plus consacré au contrôle des déjections canines qu’à des projets structurants pour l’avenir de la commune »ajoute-t-elle. Camille Pouponneau souligne cette incapacité des maires à agir concrètement pour leurs communes : « Je dois admettre avoir été bloqué (…) face à des situations réglementaires omniprésentes qui nous limitent dans notre action ».
Un engagement à 70 heures par semaine
Celle qui fut également conseillère départementale souligne, dans son communiqué, le manque de moyens qui pèse sur le niveau local. Elle l’avait déjà souligné après les élections législatives anticipées dans une lettre à Emmanuel Macron. L’élu a expliqué que l’organisation du vote à Pibrac avait coûté plus de 18 000 euros à la commune, pour une indemnisation de l’Etat d’à peine 1 000 euros. Cette dépense « les imprévus équivaut à un an d’achat de livres pour la médiathèque, la moitié des fournitures scolaires annuelles ou le recrutement de personnel technique pour six mois »a-t-elle expliqué au président de la République. L’état des finances municipales ne devrait pas s’améliorer avec le budget 2025. Une partie du projet de loi de finances prévoit de réaliser cinq milliards d’euros d’économies au détriment des collectivités locales.
Dans son communiqué de jeudi, Camille Pouponneau dénonce « un service public en morceaux faute de ressources suffisantes, ce qui entraîne des difficultés à améliorer les compétences de l’administration ». Elle se confie ensuite sur sa situation financière personnelle, expliquant avoir reçu 1 127 euros d’indemnisation, tout en ayant « exerçait deux fonctions : celle de maire et de chef de cabinet ». Celle qui avait mis un terme à toutes ses activités professionnelles pour se consacrer à ses mandats, a établi une comparaison cruelle entre le temps consacré à ses fonctions et la rémunération perçue en échange. « Au final, j’ai passé 70 heures par semaine payées à peine à 80 % du smic »résume-t-elle.
En novembre 2023, le Cevipof indiquait que 1 300 maires avaient démissionné en trois ans, depuis les dernières élections municipales de 2020. La décision de Camille Pouponneau intervient également quelques jours après la démission du maire de Plussulien, dans les Côtes-d’Armor, pour des raisons similaires. . Il déclare alors à France 3 Bretagne : «Nous sommes élus, ce n’est pas pour rien. Et là, on a l’impression qu’on ne sert à rien. Alors pourquoi rester s’ils ne nous écoutent pas ? Comme à Pibrac, d’autres maires devraient déposer les armes avant les prochaines élections municipales de 2026.