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Michel Barnier Premier ministre, une nomination qui ne résout pas (encore) la crise politique

LUDOVIC MARIN / AFP Emmanuel Macron et Michel Barnier, photographiés à l’Élysée en 2020 (illustration).

LUDOVIC MARIN / AFP

Emmanuel Macron et Michel Barnier, photographiés à l’Élysée en 2020 (illustration).

POLITIQUE – L’interminable feuilleton estival a (enfin) pris fin. C’est donc l’expérimenté Michel Barnier, figure historique de la droite, qui a été nommé à Matignon, pour prendre la succession de Gabriel Attal après la défaite du camp présidentiel aux législatives. Dans un communiqué diffusé à la mi-journée le 5 septembre, l’Élysée indique le cap que lui a demandé de suivre Emmanuel Macron. Pour le Savoyard de 73 ans, il s’agit de « former un gouvernement d’unité  » Un sommet qui sera particulièrement difficile à franchir pour cet alpiniste.

Car la nomination de Michel Barnier ne résout pas vraiment la crise politique déclenchée par la dissolution surprise du 9 juin, et la tripartition de l’Assemblée nationale en trois grands blocs après les élections législatives qui ont suivi. Les obstacles qui se dressent sur la route de l’ancien négociateur du Brexit sont nombreux et, plus délicatement, de nature différente.

Déficit de légitimité

Parmi eux, un sérieux déficit de légitimité, puisque la famille politique qu’il représente, Les Républicains, n’a récolté que 5,41% des voix au second tour des législatives anticipées, après un premier échec aux européennes. Résultat : 47 sièges pour LR à l’Assemblée nationale (contre 64 en 2022).

Une épine dans le pied qui s’accompagne d’un autre défaut majeur de Michel Barnier : il n’a pas appelé à la participation à la  » Front républicain  » contre le RN au second tour des législatives (pas plus que sa famille politique). C’était pourtant là l’enseignement majeur de ces élections anticipées marquées par une participation record : la persistance d’un solide barrage face à l’extrême droite. Raison pour laquelle Emmanuel Macron semblait vouloir entretenir cet esprit au sein de l’exécutif.

« Les Français souhaitent qu’il y ait une coalition gouvernementale à l’image de la barrière républicaine souhaitée », « C’est une question qui me préoccupe », a déclaré l’entourage du chef de l’Etat, en amont de la série de consultations organisées à l’Elysée. Pourtant, quelques jours plus tard, Emmanuel Macron, qui souhaitait surtout un Premier ministre qui ne toucherait pas à son bilan, s’est finalement tourné vers le représentant d’un parti qui a snobé ce fameux  » Front républicain « , auquel participaient le Nouveau Front Populaire et le camp présidentiel. Pas idéal pour rassembler dans ces conditions.

« On passe de Gabriel Harris à Joe Barnier »

Dès l’annonce, les critiques n’ont pas tardé à pleuvoir, notamment à gauche, qui a vu dans cette nomination une « insulte au peuple français « . Même au sein de la Macronie historique, le choix est choquant. En rupture avec son camp, le député de la Vienne Sacha Houlié a exprimé son  » incompréhension  » sur le réseau social X, et prévient que Michel Barnier n’aura pas son soutien. Toujours de l’aile gauche de la Macronie, un ministre démissionnaire rit jaune avec le HuffPost, pointer l’image pas tellement  » Nouveau Monde » renvoyé par cette nomination : « On passe de Gabriel Harris à Joe Barnier « .

L’enthousiasme est sans doute mesuré dans les rangs macronistes, où certains font délibérément circuler le vote de Michel Barnier en 1981 contre la dépénalisation de l’homosexualité, alors qu’il était député RPR. Le député MoDem du Finistère, Erwan Balanant, a même déclaré  » en colère «  après ce rendez-vous.

Preuve, s’il en était besoin, que le choix du chef de l’Etat ne convainc pas totalement ses troupes, où beaucoup craignent que le Premier ministre se retrouve désormais à la merci du Rassemblement national. Car si le parti lepéniste n’a pas opposé de censure automatique à l’option Michel Barnier, qui offre à Marine Le Pen un rôle d’arbitre qu’elle savoure avec gourmandise, la longévité du Premier ministre dépendra mécaniquement du bon vouloir du RN, qui pourrait saisir la moindre opportunité pour faire tomber le gouvernement.

Une situation particulièrement fragile sur le plan politique, d’autant qu’elle permet à la gauche de dénoncer cette alliance tacite entre Emmanuel Macron et le Rassemblement national en contradiction (à nouveau) avec l’esprit du  » Front républicain « Par exemple, Jean-Luc Mélenchon n’a pas attendu pour se dévoiler. » « Le Premier ministre est nommé avec l’autorisation et peut-être la suggestion du Rassemblement national. C’est presque un gouvernement de M. Macron et de Mme Le Pen », a-t-il ajouté. il a grogné à la suite de l’annonce.

Dilemme

Sur le fond, c’est peu dire que Michel Barnier constitue un pont entre les macronistes et les lepénistes. Lors de la primaire LR, il a défendu un programme économique libéral marqué notamment par le report de l’âge légal de départ à la retraite. Du miel aux oreilles de Renaissance. Dans le même temps, il a proposé un référendum et un « accord de libre échange » entre les deux partis. moratoire  » sur l’immigration, l’interdiction du voile dans l’espace public et l’expulsion des étrangers condamnés à de la prison. Tout comme la réorganisation des comptes publics. Comment le RN, qui a posé des conditions très similaires pour éviter de faire tomber un Premier ministre, pourrait-il sérieusement être insensible à cela ? « 

Ce faisant, et en l’absence de soutien de la gauche, Michel Barnier sera inévitablement confronté à un dilemme dont la réponse conditionnera sa survie à Matignon : doit-il tracer une voie sans le RN, au risque d’être censuré ? Ou doit-il aller dans sa direction, au risque de fracturer le camp présidentiel et de bafouer le message électoral du « parti de gauche ». Front républicain  » ? Expérimenté et négociateur, Michel Barnier a sans doute les ressources pour faire preuve d’imagination et tenter de résoudre l’équation. Il n’aura pas d’autre choix. Car les cicatrices de la crise provoquée par la dissolution n’ont pas disparu avec sa nomination.

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Gérard Truchon

An experienced journalist in internal and global political affairs, she tackles political issues from all sides

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