La nomination de Michel Barnier, 73 ans, au poste de Premier ministre marque un changement radical de profil à Matignon par rapport à Gabriel Attal…
Ce jeudi 5 septembre, le président Emmanuel Macron a nommé Michel Barnier, 73 ans, nouveau Premier ministre, en remplacement de Gabriel Attal, 35 ans. Une passation de pouvoir devait avoir lieu en fin de journée à Matignon. On ne sait pas vraiment si les deux hommes ont beaucoup à se dire, mais leurs profils sont en tout cas, à bien des égards, diamétralement opposés.
Gabriel Attal, le plus jeune membre du gouvernement, était le plus jeune Premier ministre de l’histoire de la Ve République lors de sa nomination en 2024. Issu du premier cercle, ce fidèle de la première heure d’Emmanuel Macron, dont il était le porte-parole, incarnait jusqu’à présent une nouvelle génération de dirigeants politiques. Marié et père d’un enfant, il symbolisait aussi une certaine modernité en étant ouvertement homosexuel.
Michel Barnier appartient à la vieille garde de la droite républicaine. Entré en politique en 1973, l’élu local, ancré dans son fief de Savoie, a été député européen, sénateur, plusieurs fois ministre dans les années 1990 et 2000, et même commissaire européen à deux reprises. Marié depuis plus de 40 ans et père de trois enfants, il se définit comme un « montagnard », fier de ses origines provinciales. Avec son allure de notable à l’ancienne, cheveux blancs et costume trois pièces, il tranche avec le style de son prédécesseur, plus que jamais associé à la « start-up nation » qu’appelait de ses vœux Emmanuel Macron en 2017.
Une différence d’âge sans précédent
Mais au-delà de ces différences de carrière et de style, c’est bien sûr l’écart d’âge entre les deux chefs de gouvernement qui sera sans doute le plus marquant en ces jours de transition. A 73 ans, Michel Barnier sera en effet le Premier ministre le plus âgé de la Ve République lors de sa prise de fonctions, battant le record détenu jusque-là par Pierre Messmer (71 ans). A l’inverse, en accédant à Matignon à seulement 35 ans, Gabriel Attal avait détrôné Laurent Fabius (37 ans) comme plus jeune chef de gouvernement.
Près de 40 ans séparent les deux hommes, du jamais vu sous la Ve République pour une passation de pouvoir à Matignon. Un tel écart interroge sur la stratégie d’Emmanuel Macron, après la jeunesse et le renouveau incarnés par Attal. En choisissant de passer du plus jeune au plus âgé des Premiers ministres, le chef de l’État joue en effet un rôle surprenant, voire audacieux. Ce choix d’un homme d’État aguerri, rompu aux négociations de haut niveau, notamment celle du Brexit dont Michel Barnier a été l’acteur côté européen, est sans doute lié au contexte politique très particulier, avec une Assemblée nationale fragmentée, sans réelle majorité, où il faudra engager un dialogue acharné avec tous les camps pour tenter de construire des compromis.
Mais la nomination de Barnier, qui avait opéré un virage à droite inattendu lors de la primaire LR en 2021, ne fait pas l’unanimité, y compris dans son propre camp. Pour un député LR, il incarne « tout ce dont les Français ne veulent pas » et risque de « tuer la droite ». A l’extrême droite, on se moque de ce « fossile politique de Jurassic Park ».
GrP1