Mgr Vigano, le « mystère » du Vatican
L’annonce publique d’un procès pour actes schismatiques n’est pas monnaie courante au Vatican. Loin de là. La médiatisation, par le principal concerné, de l’ouverture du procès de « crime de schisme » contre Mgr Carlo Maria Vigano, jeudi 20 juin, a fait l’effet d’une petite bombe au Saint-Siège. Acte pour le moins inhabituel, l’évêque a mis en ligne sur le réseau X (anciennement Twitter) la lettre de convocation à une audience du dicastère pour la doctrine de la foi, accompagné de son avocat.
Si l’impact a été si fort, c’est que Mgr Vigano est depuis plusieurs années l’un des plus farouches critiques du pape, allant jusqu’à l’accuser d’avoir « usurpé » Peter’s Seat, attaquant également le Concile Vatican II, qu’il a appelé « cancer idéologique ». Chacun de ses discours déclenche régulièrement des dizaines d’articles, notamment dans la presse américaine, sur celui qui est devenu l’une des figures marquantes d’un certain conservatisme américain des plus radicaux.
Cependant, cet évêque né en Italie n’a pas toujours été un farouche opposant au Vatican. Il a en effet longtemps été diplomate, représentant du pape auprès du Conseil de l’Europe, du Nigeria et des Etats-Unis. Il a également été, entre 2009 et 2011, secrétaire général du gouvernorat. Des postes stratégiques où il était très respecté, notamment pour avoir alerté sur la situation du cardinal Theodore McCarrick, ancien homme fort de l’Église aux États-Unis, finalement expulsé de l’État clérical en 2019 pour viols et attouchements sur de nombreux jeunes hommes.
« Lorsqu’il était nonce apostolique, il travaillait extrêmement bien », a réagi, quelques heures après l’annonce du procès, le cardinal Pietro Parolin, secrétaire d’État du Saint-Siège. En estimant » normale « que le dicastère a lancé une enquête, le cardinal n’a pas caché qu’il l’avait « apprécié »en parlant d’un homme « très travailleur et très fidèle au Saint-Siège ».
« Tout a changé en 2018, lorsqu’il a appelé à la démission du pape », se souvient un membre de la Curie. Un autre, qui le connaissait depuis longtemps, se souvient d’un homme « avec convictions »mais « très affable ». « Il semblerait qu’il se soit laissé avoir par certains réseaux anti-américains de Francis », estime la même source. Qui continue : « Avec le Covid, il s’est plongé dans les théories complotistes. Aujourd’hui, peu de gens ici ont des contacts avec lui. Son comportement est un mystère. »