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« Merde de vice-président », « racaille »… Jusqu’où peuvent aller les candidats à la campagne ?

« Vice-président de merde », « paresseux », « racaille » ou encore « faible QI »… Chaque jour, Donald Trump trouve de nouveaux adjectifs insultants pour qualifier son adversaire dans la course à la Maison Blanche, Kamala Harris. Le démocrate a répondu que « l’ancien président a vraiment rabaissé la fonction présidentielle ». Difficile d’imaginer de tels combats en France : « on n’a pas le monopole du cœur », petite phrase emblématique de Valéry Giscard d’Estaing à François Mitterrand.

En février 2008, Nicolas Sarkozy, alors président, avait suscité la polémique en répondant « tire-toi, pauvre idiot » à un homme qui refusait de lui serrer la main au Salon de l’agriculture. Mais l’ancien président ne s’adressait pas à un opposant politique et considérait lui-même en 2016 avoir « abaissé la fonction présidentielle » dans son livre. La France pour la vie. Chez nous, les sorties de Donald Trump semblent donc inimaginables. Et beaucoup seraient punis par la loi.

Le premier des amendements

Mais, outre-Atlantique, il existe une « culture américaine de la liberté d’expression, voire une sacralisation, qui conduit à tolérer des discours incendiaires », explique Kamel El Hilali, docteur en droit public à l’université Paris-II Panthéon-Assas. De nombreux Américains considèrent la liberté d’expression comme l’un des fondements de leur pays. C’est aussi le premier amendement à la Constitution des États-Unis, devant le deuxième qui consacre le droit de porter une arme.

Adoptée par le Congrès en 1791, elle stipule : « Le Congrès ne fera aucune loi concernant l’établissement d’une religion, ou interdisant le libre exercice de celle-ci ; ou pour limiter la liberté d’expression, de la presse ou le droit des citoyens de se réunir pacifiquement ou de demander au gouvernement réparation des griefs subis. » Cet amendement, destiné à « protéger les individus contre l’État et les lois arbitraires du gouvernement », selon Kamel El Hilali, protège également la parole politique.

Protection du discours de haine

«Les discours incendiaires et les insultes de Donald Trump font partie de la campagne et le discours politique est protégé par le premier amendement. Les candidats ont le droit d’être grossiers ou de mentir », explique-t-il. Aux Etats-Unis, il est possible d’insulter son adversaire sans être inquiété, pour peu que cette insulte n’entraîne pas de trouble à l’ordre public. De même, contrairement à notre pays, les États-Unis ne sanctionnent pas les discours de haine, particularité qui a notamment protégé les agissements du Ku Klux Klan.

Dans l’arrêt Brandenburg c. Ohio de la Cour suprême, la plus haute instance juridique du pays a statué que les discours prônant une conduite illégale sont protégés par le premier amendement tant qu’ils n’incitent pas à une conduite illégale. pas « une action illégale imminente ». Ainsi, « certains discours insupportables en France, comme une pancarte ouvertement nazie tenue en pleine rue, seraient considérés comme relevant de la liberté d’expression aux Etats-Unis », explique Kamel El Hilali.

Un homme qui « franchit toutes les lignes rouges »

Il n’en demeure pas moins que depuis l’arrivée de Donald Trump dans la politique américaine, le magnat de l’immobilier a dynamité la tradition de retenue historiquement associée aux hautes fonctions du pays. «Même si la tolérance est assez forte, Donald Trump franchit toutes les lignes rouges. Il profite du flou juridique », poursuit Kamel El Hilali. Car si la violence verbale du républicain s’inscrit certes dans un pays qui consacre la liberté d’expression, elle dépasse néanmoins largement les limites de la loi.

Alors pourquoi le milliardaire s’en sort-il toujours ou presque toujours ? En près de dix ans de vie politique, Donald Trump n’a été inquiété qu’à deux reprises pour ses invectives – si l’on exclut son discours séditieux qui a conduit à l’assaut du Capitole. En octobre 2023, il a été condamné à une amende de 5 000 $ puis de 10 000 $ pour un message désobligeant à l’égard d’un greffier qui le jugeait pour fraude financière. Plus impressionnant encore, en janvier 2024, l’ancien président a été condamné à verser 83,3 millions de dollars à E. Jean Carroll pour l’avoir diffamée. Reconnu coupable d’agression sexuelle à son encontre, Donald Trump continue néanmoins de régulièrement traiter l’ancienne journaliste de menteuse.

« Il peut tout dire »

Pour expliquer les maigres poursuites face à la litanie quotidienne d’insultes du Républicain, Kamel El Hilali évoque un « effet Trump ». « C’est difficile de l’imaginer en France mais Donald Trump est une vraie star, il peut tout dire », précise le docteur en droit public. En 2016, lors de la primaire républicaine, le magnat de l’immobilier avait déclaré : « Je pourrais tirer sur les gens de la 5e Avenue sans perdre une seule voix. » « Au fond, même s’il ne tire pas vraiment, il tire avec ses mots et, effectivement, il ne lui arrive rien », glisse Kamel El Hilali qui ajoute qu’en étant continuellement outrancier, Donald Trump se protège un peu en retrait de l’usure. .

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« Si toutes les personnes concernées se lançaient dans une bataille devant un juge pour défendre leurs droits, il faudrait mobiliser des ressources tous les quatre matins », résume-t-il, ajoutant que Kamala Harris pourrait être accusée de faiblesse si elle se tournait vers la justice pour se défendre des attaques de son rival. attaques. La vice-présidente a donc tout intérêt à répondre, avec un peu plus de hauteur certes, mais comme son adversaire, sur des bases politiques plutôt que juridiques.

Gérard Truchon

An experienced journalist in internal and global political affairs, she tackles political issues from all sides
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