Elle en a rêvé tout haut, elle a été acclamée, son vœu a été exaucé : une icône du sport français, qui est restée « Marie-Jo » Dans l’imaginaire collectif, près de 30 ans après ses plus grands exploits sur la piste, Marie-José Pérec a enflammé la vasque des Jeux olympiques de Paris, vendredi soir, avec Teddy Riner.
Un autre temps fort vers l’éternité pour cette légende du sport français à la foulée inoubliable, seule athlète française triple championne olympique (200 m en 1992, 200 m et 400 m en 1996), porte-drapeau de la délégation française aux Jeux d’Atlanta en 1996, restée dans les mémoires aussi pour son évasion spectaculaire de Sydney en 2000.
A 56 ans, son aura intacte, Pérec a été largement appelée comme dernière relayeuse de la flamme olympique, par le sélectionneur de l’équipe de France de football olympique Thierry Henry – « il n’y a personne au-dessus d’elle » – ; son camarade, le champion du monde 1998 Lilian Thuram – » Une preuve « – ; ou la lanceuse de disque porte-drapeau sur la Seine Mélina Robert-Michon, « 100% team Pérec ».
« Les Jeux sont ma vie »la Guadeloupéenne a l’habitude de répéter, vantant l’éducation qu’elle a reçue de sa grand-mère Éléonore, à Basse-Terre, dans sa trajectoire dorée.
» Regard vers le haut «
« Grand-mère nous appelait pour écouter les combats de Mohamed Ali à la radio », se souvient-elle à l’AFP. « Elle disait que c’était le sauveur. Elle était amoureuse des grands. Elle a dû semer des petites graines qui m’ont donné envie de devenir quelqu’un moi aussi ».
« En fait, j’ai toujours essayé de laisser ma marque sur mon temps »résume Perec.
Repérée par son professeur de sport, la championne en herbe, qui mesure déjà 1,75 m à 13 ans, arrive en métropole en 1985, à peine majeure. Mais sa collaboration avec Fernand Urtebise est de courte durée, au point qu’elle arrête un temps l’athlétisme. Elle revient deux ans plus tard, entraînée par François Pépin, mais c’est Jacques Piasenta qui l’accompagne vers ses premiers titres internationaux sur 400 m : or mondial en 1991 et or olympique en 1992.
« Quand je suis arrivée en métropole, j’ai vécu beaucoup de choses par rapport aux Antillais. Les gens disaient qu’on n’avait pas de projet, qu’on était nonchalants, etc. Je voulais leur montrer que ce n’était pas le cas, qu’on savait faire les choses. Je voulais que les gens nous regardent différemment. À l’époque, les gens ne disaient pas ce qu’ils vivaient. Je voulais être leur voix, les aider à relever la tête », raconte-t-elle. « Mais pour cela, il fallait gagner, sinon sa parole n’était pas entendue. »
« En colère contre tout le monde »
Partie « en colère contre tout le monde » Aux Etats-Unis début 1994, pour rejoindre le groupe de sprinteurs de John Smith en Californie, Perec enchaîne les victoires : or européen et mondial sur 400 m en 1994 et 1995, avant l’apothéose, un rare doublé olympique 200 m-400 m à Atlanta en 1996 – comme la légende américaine Michael Johnson.
Rien ne se passe bien aux JO suivants, entre mononucléose et myocardite qui mettent sa carrière en péril, un traitement à la cortisone qui lui fait prendre douze kilos, et un départ choc quelques mois avant les JO de 2000 pour Rostock, en Allemagne, auprès du sulfureux Wolfgang Meier.
Le point d’orgue – et finalement le point de rupture : sa fuite de Sydney, sans y avoir couru, emportée par la pression médiatique et populaire entourant son duel avec sa rivale australienne Cathy Freeman, d’origine aborigène et érigée en symbole de la réconciliation de tout un pays. Clin d’œil de l’histoire, cette dernière avait allumé le chaudron de ses Jeux à domicile – avant Pérec.
« Je monte dans l’avion, et puis c’est la descente aux enfers »dit l’icône française dans le documentaire que Canal+ vient de lui consacrer, intitulé « Marie-Jo »Elle n’a jamais retrouvé sa meilleure forme après cela.
Près d’un quart de siècle plus tard, Perec rêvait tout haut d’être celui qui serait choisi pour embraser la vasque olympique – comme Mohamed Ali à Atlanta, légende de la boxe et figure de la lutte pour les droits civiques aux Etats-Unis, idole de sa grand-mère.
« Si j’étais choisie, ce serait comme gagner une médaille d’or supplémentaire, par rapport à tout ce que cela représente », espérait-elle il y a quelques mois. « Et je deviendrais, en quelque sorte, le petit Mohamed Ali de ma grand-mère. »
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